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Europe du Sud : des bilans bancaires assainis face à des perspectives assombries

10/28/2022

Selon les derniers chiffres de l’Autorité bancaire européenne, les ratios des prêts non performants des systèmes bancaires espagnol, italien et portugais ont atteint des plus bas historiques au deuxième trimestre 2022. Il apparaît également que leur coût du risque se maintient à un niveau relativement faible après leur forte hausse en 2020. Toutefois, le coût du risque des banques d’Europe du Sud est fortement susceptible de repartir à la hausse au cours des trimestres à venir sur fond de ralentissement de l’activité économique en lien avec une inflation élevée, une remontée des taux d’intérêt et une augmentation des prix de l’énergie.

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Europe du Sud : des bilans bancaires assainis face à des perspectives assombries

Selon les derniers chiffres de l’Autorité bancaire européenne, les ratios des prêts non performants des systèmes bancaires espagnol, italien et portugais ont atteint des plus bas historiques au deuxième trimestre 2022. Il apparaît également que leur coût du risque se maintient à un niveau relativement faible après leur forte hausse en 2020. Toutefois, le coût du risque des banques d’Europe du Sud est fortement susceptible de repartir à la hausse au cours des trimestres à venir sur fond de ralentissement de l’activité économique en lien avec une inflation élevée, une remontée des taux d’intérêt et une augmentation des prix de l’énergie.

En Espagne, en Italie et au Portugal, l’encours des prêts non performants est tombé à un plus bas historique au deuxième trimestre 2022. Ceci s’explique premièrement par un début de reprise, bien que contrariée, après le reflux de la pandémie et, deuxièmement, par une poursuite des plans de cessions et de titrisations. Depuis son pic à EUR 500 mds au troisième trimestre 2014, l’encours des prêts non performants a ainsi été divisé par plus de trois pour s’établir en dessous de EUR 150 mds.

L’encours des prêts sains s’est, à l’inverse, accru au deuxième trimestre 2022 sous l’effet de l’augmentation des prêts, principalement immobiliers, aux ménages et des prêts aux entreprises. La croissance de l’encours de ces derniers est entièrement imputable aux crédits de trésorerie qui ont été contractés afin de répondre aux besoins de reconstitution des stocks et qui ont plus que compensé la baisse de l’encours des crédits d’investissement.

Les ratios des prêts non performants ont ainsi subi un effet de ciseau positif qui les a poussés à s’établir à environ 2% en Espagne et en Italie contre 3% au Portugal. Ces chiffres sont à comparer aux pics observés entre 2014 et 2016 à plus de 14% en Italie et au Portugal et, plus modestement, à 7% en Espagne.

Après avoir doublé en Espagne et au Portugal entre 2019 et 2020 et avoir progressé de 50% en Italie, le coût du risque des banques d’Europe du Sud s’est jusqu’à présent maintenu à un niveau relativement faible. Pour l’heure, et contrairement aux réserves émises après leur mise en œuvre, il n’y a pas eu d’augmentation sensible du risque de crédit de certains emprunteurs au moment de la levée des mesures de soutien public.

Au-delà de ces indicateurs jusque-là rassurants, la part des prêts sous performants dans le total des prêts est 20 à 30% supérieure aux niveaux qui prévalaient avant la pandémie. La part des prêts dont le risque de crédit a augmenté significativement depuis leur comptabilisation initiale, sans pour autant être non performants, est fréquemment utilisée comme un indicateur avancé de la qualité des bilans bancaires. Son maintien à un niveau élevé tend à suggérer que le coût du risque des banques d’Europe du Sud pourrait s’accroître au cours des trimestres à venir. L’ampleur de cette hausse dépendra naturellement de la persistance d’une inflation élevée et de la hausse des taux d’intérêt ainsi que de leur effet sur le ralentissement économique. Par ailleurs, l’augmentation des prix de l’énergie pourraient avoir des effets sensibles sur le risque de crédit de certains emprunteurs. Dans une certaine mesure, l’augmentation de la part des prêts à taux fixe, notamment pour les prêts à l’habitat aux ménages, observé ces dernières années dans les pays d’Europe du Sud à la faveur de la période prolongée de taux bas, devrait protéger davantage les emprunteurs contre les hausses de taux, préservant leur solvabilité.

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