Eco Perspectives

Atmosphère de crise

16/12/2021

Une fois les restrictions liées au Covid-19 levées, l’économie devrait fortement rebondir en 2022, portée en premier lieu par la consommation des ménages. L’année prochaine, l’orientation de la politique budgétaire va probablement se durcir avec la suppression progressive des mesures d’aide spéciales. L’un des principaux risques politiques est l’éclatement de la coalition formées par les conservateurs de l’ÖVP et les Verts.

Après une légère récession au début de l’année, la levée progressive des mesures de confinement a permis à l’économie de retrouver son niveau de pré-crise au T3. La reprise a toutefois été freinée par des pénuries de main-d’œuvre et de matières premières. Elle devrait l’être encore dans les prochains mois avec les nouvelles mesures de restrictions annoncées par le gouvernement devant l’augmentation rapide du nombre de nouveaux cas de Covid-19. Un confinement généralisé a été instauré pour une durée maximale de vingt jours à compter du 22 novembre, ainsi que la vaccination obligatoire contre la Covid-19 à partir du 1er février 2022. Après cette annonce, le nombre de bénéficiaires des dispositifs de chômage et de chômage partiel a de nouveau augmenté.

Une réforme fiscale ambitieuse

CROISSANCE ET INFLATION

L’orientation budgétaire devrait se durcir l’année prochaine, en raison de la suppression de certaines aides spéciales. Le gouvernement prévoit, par ailleurs, une réforme fiscale à partir de juillet 2022. Une fois celle-ci pleinement mise en œuvre en 2024, la baisse de la fiscalité s’élèvera à EUR 7,8 mds par an (2 % du PIB). Cet allégement devrait permettre de compenser le non-ajustement des tranches d’imposition à l’inflation ou «bracket creep». En 2024, le taux d’imposition des sociétés sera ramené de 25 % à 23 %. À partir du 1er juillet 2022, une taxe carbone sera introduite pour les secteurs qui ne sont pas couverts par le système d’échange de quotas d’émissions (Emissions Trading Schemes, ETS) de l’Union européenne. Initialement fixée à EUR 30 par tonne de carbone, la taxe sera portée à EUR 55 en 2025. Le prix du carbone dans le cadre du système EU ETS était, ces derniers mois, proche de EUR 80. Cette taxe augmentera de dix centimes le prix de l’essence et de EUR 130 le coût annuel du chauffage pour un ménage moyen. Les recettes de cette taxe seront redistribuées sous forme de crédit d’impôt pour les familles, de prime spéciale pour les personnes résidant en zone rurale et de subventions pour les entreprises afin de maintenir leur compétitivité par rapport à d’autres entreprises étrangères dont le prix du carbone est plus faible.

Une croissance vigoureuse dans les années à venir

L’économie pourrait rapidement se redresser une fois les mesures de confinement levées. La consommation privée va probablement connaître un fort rebond, porté par l’épargne accumulée pendant la crise Covid-19 et par la réforme fiscale à partir de juillet 2022. Les exportations de biens seront soutenues, dans le courant de 2022, par la réduction attendue des perturbations des approvisionnements, en particulier dans l’industrie automobile allemande. De plus, les exportations de services touristiques pourraient quasiment doubler en 2022. Le passage aux technologies de production à faible émission de carbone et les pénuries persistantes de main-d’œuvre, qui conduiront à une plus grande automatisation, stimuleront les investissements. L’inflation va probablement grimper temporairement au-dessus de 3 % a/a en 2022, en raison, notamment, de la flambée des prix de l’énergie. De plus, à partir du 1er janvier 2022, les taux de TVA appliqués à la restauration, à l’hôtellerie et à l’événementiel, qui représentent environ 13 % du panier de consommation, passeront de 5 % à leur niveau initial de 8 %. Cette hausse ne sera probablement répercutée qu’en partie sur les consommateurs. Le 1er juillet, l’introduction de la taxe carbone contribuera, quant à elle, à hauteur d’environ 0,2 point à l’inflation.

Valse des ministres

Le scandale de corruption, dans lequel est englué l’ÖVP (conservateurs), principal membre de la coalition au pouvoir, constitue un important facteur d’incertitude. Accusé d’avoir, entre 2016 et 2017, utilisé l’argent du contribuable à hauteur de EUR 1,2 md pour financer des groupes de presse servant ses intérêts politiques, le président de l’ÖVP, Sebastian Kurz, a donné sa démission comme chancelier en octobre. Il a été temporairement remplacé par le ministre des Affaires étrangères, Alexander Schallenberg. M. Kurz ayant décidé, début décembre, de quitter la vie politique, M. Schallenberg a retrouvé son portefeuille au ministère des Affaires étrangères et Karl Nehammer, ministre de l’Intérieur, a été nommé chancelier. Le ministre des Finances, Gernot Blümel, a, lui aussi, donné sa démission. Pour le moment, les Verts souhaitent rester dans la coalition aux côtés de l’ÖVP pour mener à bien leur programme politique.

LES ÉCONOMISTES EXPERTS AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

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