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EcoEmerging// 1 trimestre 2018
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saisonnières) en mars 2017. Dans une première phase, la hausse
rapide du taux de chômage a reflété un ralentissement du rythme
des embauches brutes jusqu’à mi-2015. Puis, dans une seconde
phase, alors même que les embauches brutes retrouvaient un peu
de vigueur, les licenciements se sont accélérés. Plus de 3,9 millions
d’emplois (4% de l’emploi total) ont été détruits entre fin 2014 et le
printemps 2017, dont 3,1 millions dans le secteur privé et plus de
3- Amélioration sur le front de l’emploi et hausse des salaires
Taux de chômage (%, cvs) — Salaires réels (%, glissement annuel)
— Emploi total (%, glissement annuel)
—
14
12
1
0
8
6
4
2
0
2
4
6
7
00 000 dans le secteur public. Le secteur manufacturier a payé le
plus lourd tribut (2,1 millions soit 15% d’emplois perdus entre fin
014 et février 2017), suivi du secteur de la construction, au cœur
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de « Lava Jato » (1,1 million d’emplois supprimés soit aussi 15% du
secteur entre fin 2014 et mai 2017). Plus gros pourvoyeur d’emplois
(
près de 50% de l’emploi total), le secteur des services au sens
-
-
-
large a mieux résisté, soutenu par le rebond de l’emploi informel et
indépendant à partir de mi-2016. La crise a donc interrompu la
baisse tendancielle du secteur informel (environ 40% de l’emploi
total fin 2017), qui explique a priori la stabilité (voire la légère
augmentation) du taux de participation à la population active durant
la crise. Au final, la productivité du travail a chuté de 7% entre 2013
et 2016 (données Conference Board).
2013
2014
2015
2016
2017
Sources: IBGE, BNP Paribas
population dont le revenu est inférieur à USD 10 par jour) aurait
ainsi grimpé de 14,7% en 2014 à 16,1% en 2016.
La reprise économique aidant, 3 millions d’emplois nets ont été
créés entre mars et novembre 2017. Toutefois, se pose la question
de la qualité et de la pérennité de ces nouveaux emplois puisque
près des deux-tiers concernent les secteurs informel et indépendant.
Du point de vue sectoriel, la moitié des créations d’emplois s’est
concentrée dans les services et un quart dans l’administration et les
services publics. L’emploi industriel a progressé de 5% (+556 000
postes) et l’emploi dans la construction de 1%.
Selon une seconde définition plus étroite de la classe moyenne (du
quatrième au septième décile) excluant les 30% des ménages les
plus pauvres et les 30% les plus aisés, la part des revenus des
ménages de la classe moyenne dans les revenus disponibles totaux
a stagné à environ 27% depuis 2014 après une progression
ininterrompue depuis 1990. Toutefois, la part relative des revenus
des ménages les plus pauvres (trois premiers déciles) a baissé très
légèrement depuis 2014 par rapport au reste de la population. En
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016, les revenus des 10% des Brésiliens les plus pauvres ne
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Mais un bilan socio-économique de la crise lourd
représentaient que 2,9% des revenus des 10% les plus riches, en
baisse pour la première année depuis 1990 et suggérant une légère
augmentation des inégalités.
L’intensité de la crise économique et la faiblesse des amortisseurs
sociaux dans un contexte de finances publiques dégradées ont
remis en cause les avancées sociales en réenclenchant un
processus de paupérisation et de « déclassement social » d’une
frange de la population.
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Réformes en suspens et élections à suspense :
hantise des investisseurs
Jusqu’en 2014, la vigueur de l’activité économique accompagnée
de politiques redistributives et sociales relativement avisées durant
la « décennie dorée » a permis une croissance significative du
revenu moyen par habitant de 66% en parité de pouvoir d’achat
entre 2002 et 2014 (selon le FMI), la baisse des inégalités (toujours
élevées) et de la pauvreté, ainsi que l’émergence d’une classe
moyenne.
Dans un environnement international potentiellement moins porteur,
la consolidation de la croissance et des finances publiques en 2019
soulèvent des inquiétudes. Relativement apaisés en 2017, les
marchés pourraient être plus volatils à l’approche des élections
générales d’octobre. Vainqueurs des élections municipales
d’octobre 2016, le PMDB et le PSDB, partis menant la coalition
gouvernementale (centre-centre droit) du président Michel Temer
depuis la destitution de Dilma Rousseff (PT, gauche), ont été
écornés depuis par l’exercice du pouvoir, les politiques d’austérité et
les affaires de corruption. La réforme des retraites, l’un des piliers
du programme de consolidation budgétaire, pourrait ne pas être
votée avant les élections, conduisant Standard & Poor’s à dégrader
la notation souveraine le 11 janvier. La défiance de la population à
l’égard des partis traditionnels et l’épée de Damoclès judiciaire au-
dessus de la candidature de l’ex-président Lula (PT), en tête dans
les sondages, n’excluent plus l’hypothèse d’un vote radical.
Entre 2014 et 2016, le PIB par habitant (en PPA) a reculé de 6% à
USD 15 211. Selon nos estimations effectuées à partir des données
d’Euromonitor International, le revenu médian par ménage (en PPA)
a reculé d’USD 23 900 à USD 22 700 en deux ans. D’après une
définition absolue (large) de la classe moyenne mesurant la part de
la population dont le revenu disponible est compris entre USD 10 et
USD 100 en PPA par jour, la classe moyenne brésilienne, en
progression de 45% à 67% de la population totale entre 2002 et
2014, a baissé de 2 points en deux ans. Environ 2,4 millions de
personnes (en termes nets) ont été exclues de la classe moyenne
en 2015-2016. Le « déclassement social » touche à la fois les
ménages dits « aisés » qui ont rejoint la classe moyenne par le haut,
et ceux l’ayant quitté par le bas. Le taux de pauvreté (la part de la