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Eco Perspectives // 1 trimestre 2021
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Le rebond de la demande des ménages va se poursuivre, mais celle-ci
devrait rester en sous-régime encore quelque temps étant donné la
hausse du nombre d’emplois précaires qui a accompagné la reprise
du marché du travail et la progression encore limitée des revenus
disponibles (+0,6% en g.a. en termes réels sur les neuf premiers mois
de 2020). En même temps, de nouvelles mesures visant à soutenir la
consommation privée sont probables dès l’an prochain, puisque son
expansion reste un objectif prioritaire de la stratégie économique
chinoise. Le Plan quinquennal pour 2021-2025, dévoilé à l’automne,
définit en effet le marché intérieur comme un des piliers de la
croissance. Les détails du Plan seront précisés en mars.
NOUVELLE HAUSSE DES NIVEAUX D’ENDETTEMENT
3
2
2
00
70
40
25
Dette interne du secteur non financier, % du PIB (é.g.)
Crédits totaux, g.a., % (é.d.)
20
210
15
L’investissement s’est également renforcé en octobre (+1,8% en
g.a. sur les dix premiers mois de 2020), toujours tiré par les projets
d’infrastructures et immobiliers. La croissance de l’investissement
manufacturier est restée faible mais montre des signes de reprise,
grâce notamment à la solide performance des exportations. Leur
rebond depuis juin s’est en effet rapidement renforcé, atteignant une
moyenne de +10% en g.a. en dollars courants sur la période juillet-
octobre puis passant à +21% en novembre. La Chine a été en mesure de
répondre à la forte hausse de la demande d’équipements et matériels
médicaux, de biens technologiques et, plus récemment, d’autres
biens de consommation courante tels que les jouets. Les perspectives
d’exportation restent néanmoins incertaines, puisque dépendantes à
1
1
1
80
50
20
1
0
5
2017
2018
2019
2020
SOURCES : PBOC, BNP PARIBAS
GRAPHIQUE 3
la fois de la poursuite du redressement de la demande mondiale et MULTIPLICATION DES DÉFAUTS EN VUE
donc de l’évolution de la pandémie, et des négociations commerciales
à venir entre Washington et Pékin.
Une multiplication des défauts des entreprises est attendue en 2021,
à la fois conséquence de la crise de la Covid19 et corollaire des efforts
d’assainissement du secteur financier.
LES AUTORITÉS AJUSTENT LA POLITIQUE DE CRÉDIT
La Chine est entrée dans la crise de la Covid19 avec une dette
L’investissement dans les projets d’infrastructures devrait rester excessivement élevée, estimée à 258% du PIB (dette interne du secteur
dynamique à court terme et l’investissement immobilier pourrait perdre non-financier à fin 2019). Des efforts de réduction des risques financiers
de son élan en réponse aux ajustements de la politique économique. ont été mis en œuvre en 2017-2019 (durcissement réglementaire, recul
En effet, alors que la politique budgétaire et l’investissement public des activités du shadow banking, début de désendettement du secteur
devraient continuer de soutenir l’activité, les autorités ont entamé un des entreprises), mais la crise du T1 et l’assouplissement monétaire et
durcissement sélectif de la politique de crédit.
réglementaire qui l’a suivie ont interrompu cette dynamique. L’excès de
dette s’est aggravé. La croissance du crédit domestique a accéléré de
Étant donné le solide rebond de l’activité, les autorités monétaires
peuvent se permettre de réajuster leurs objectifs et redonner la priorité
à la maîtrise des risques financiers. Le resserrement des conditions
de crédit sera toutefois une opération délicate. D’une part, il ne devra
pas entraver le redressement de l’économie ni aggraver les pressions
1
0,7% en g.a. fin 2019 à 13,7% en octobre (elle devrait se stabiliser en
fin d’année), et le ratio de dette sur PIB devrait augmenter de près de
5 points de pourcentage en 2020 – après une hausse de 10 points sur
les trois années précédentes (graphique 3).
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déflationnistes. Pékin pourrait également souhaiter ne pas accentuer Bien que les niveaux d’activité se soient normalisés dans la majorité
l’appréciation du yuan, qui a gagné 7% contre le dollar depuis six mois. des secteurs, de nombreuses entreprises et ménages restent fragilisés
D’autre part, tout en encourageant un assainissement des pratiques par les pertes financières du début d’année. Le poids du service de
de crédit, les autorités devraient continuer de soutenir les entreprises la dette devrait donc s’alourdir considérablement dans les prochains
saines qui rencontrent des difficultés financières, et agir pour limiter les mois lorsque les mesures de soutien post-Covid (lignes de crédits,
risques d’instabilité et les épisodes de stress dans le secteur financier. refinancements, rééchelonnements des remboursements) prendront
fin. Dans le secteur bancaire, le ratio officiel de créances douteuses
était de 1,96% au T3 2020, un niveau faible mais néanmoins en légère
hausse. Les récents défauts d’entreprises sur les marchés obligataires
locaux annoncent également les tendances à venir. Leur nombre devrait
rapidement dépasser les niveaux de 2018-2019. Surtout, la proportion
d’entreprises publiques en défaut pourrait augmenter, preuve d’une
lente baisse du soutien implicite de l’État.
Depuis avril, la banque centrale a maintenu son taux directeur
inchangé (à 2,95%, après une baisse de 30 pb en début d’année) mais
progressivement resserré les taux monétaires (le taux repo à sept
jours a augmenté de 1,5% en moyenne en avril à 2,3% en novembre).
Toutefois, à court terme, il est probable qu’elle s’assure de maintenir
des niveaux de liquidité confortables dans le secteur financier. En
revanche, les autorités devraient durcir lentement les conditions
de crédit en agissant principalement sur le cadre prudentiel et en
imposant plus de discipline aux acteurs financiers. Elles ont déjà
introduit le mois dernier des règles visant à contenir l’endettement
des promoteurs immobiliers, et ont clairement signifié leur volonté
d’encadrer davantage les activités de financement sur internet.
Début décembre, elles ont annoncé un renforcement des normes
prudentielles applicables aux banques considérées comme « too big to
fail » – dont la liste devrait être allongée afin, notamment, d’accroître
la surveillance des banques régionales.
Achevé de rédiger le 14 décembre 2020
La banque
d’un monde
qui change