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Eco Emerging // 1 trimestre 2021
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La demande des ménages va continuer de se redresser, mais devrait
rester en sous-régime encore quelque temps étant donné la hausse du
nombre d’emplois précaires qui a accompagné la reprise du marché du
travail, la progression limitée des revenus disponibles en 2020 (+2,1%
en moyenne en termes réels, contre 5,8% en 2019) et les incertitudes
persistantes quant à l’évolution de l’épidémie. En même temps, de
nouvelles mesures visant à soutenir la consommation privée sont
probables dès 2021, puisque son expansion reste un objectif prioritaire
de la stratégie économique chinoise. Le Plan quinquennal pour 2021-
NOUVELLE HAUSSE DES NIVEAUX D’ENDETTEMENT
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Dette interne du secteur non financier, % du PIB (é.g.)
Crédits totaux, g.a., % (é.d.)
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025, dévoilé à l’automne, définit en effet le marché intérieur comme
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un des piliers de la croissance. Les détails du Plan seront précisés en
mars.
L’investissement s’est renforcé progressivement depuis le T2 2020,
affichant une croissance de +2,9% sur l’ensemble de l’année. Il est resté
principalement tiré par les projets d’infrastructures et immobiliers,
bien que la croissance de ceux-ci ait commencé à fléchir légèrement.
L’investissement manufacturier montre des signes de reprise,
encouragé par la solide performance des exportations. Le rebond
des ventes de marchandises depuis juin s’est en effet rapidement
consolidé, atteignant une moyenne de +10% en g.a. en dollars courants
sur la période juillet-octobre puis de +20% sur les deux derniers mois
de l’année. La Chine a été en mesure de répondre à la forte hausse
de la demande d’équipements et matériels médicaux, de biens
technologiques et, plus récemment, d’autres biens de consommation
courante tels que les jouets. Les perspectives d’exportation restent
néanmoins incertaines, puisque dépendantes à la fois de la poursuite
du redressement de la demande mondiale et donc de l’évolution de la
pandémie, et des négociations commerciales à venir entre Washington
et Pékin.
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2017
2018
2019
2020
SOURCES : PBOC, BNP PARIBAS
GRAPHIQUE 2
règles visant à contenir l’endettement des promoteurs immobiliers,
ainsi que signifié leur volonté d’encadrer davantage les activités de
financement sur internet. Début décembre, elles ont annoncé un ren-
forcement des normes prudentielles applicables aux banques consi-
dérées comme « too big to fail » – dont la liste devrait être allongée
afin, notamment, d’accroître la surveillance des banques régionales. La
croissance du crédit domestique, qui avait accéléré de 10,7% en g.a. fin
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019 à 13,7% en octobre, a fléchi sur les deux derniers mois de 2020.
MULTIPLICATION DES DÉFAUTS
AJUSTEMENT PRUDENT DE LA POLITIQUE DE CRÉDIT
Une multiplication des défauts des entreprises est attendue en 2021, à
la fois conséquence de la crise de la Covid-19 et corollaire des efforts
d’assainissement du secteur financier. La Chine est entrée dans la
crise de la Covid-19 avec une dette excessivement élevée, estimée à
Alors que la politique budgétaire et l’investissement public devraient
continuer de soutenir l’activité, les autorités ont entamé un durcisse-
ment sélectif de la politique de crédit. Étant donné le solide rebond
de l’activité, les autorités monétaires peuvent en effet se permettre
de réajuster leurs objectifs et de redonner la priorité à la maîtrise des
risques financiers.
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58% du PIB (dette interne du secteur non-financier à fin 2019). Des
efforts de réduction des risques financiers ont été mis en œuvre en
017-2019 (durcissement réglementaire, recul des activités du shadow
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Le resserrement des conditions de crédit sera toutefois une opération banking, début de désendettement du secteur des entreprises), mais
délicate. D’une part, il ne devra pas entraver le redressement de la crise du T1 2020 et l’assouplissement monétaire et réglementaire
l’économie ni aggraver les pressions déflationnistes. Pékin pourrait qui l’a suivie ont interrompu cette dynamique. L’excès de dette s’est
également souhaiter ne pas accentuer l’appréciation du yuan, qui aggravé : le ratio de dette sur PIB a augmenté d’environ 25 points de
a gagné 9% contre le dollar depuis fin mai. D’autre part, tout en pourcentage en 2020 – après une hausse de 10 points sur les trois
encourageant un assainissement des pratiques de crédit, les autorités années précédentes (graphique 2).
devraient continuer de soutenir les entreprises saines qui rencontrent
des difficultés financières, et agir pour limiter les risques d’instabilité
et les épisodes de stress dans le secteur financier.
Bien que les niveaux d’activité se soient normalisés dans la majorité
des secteurs, nombre d’entreprises et de ménages restent fragilisés
par les pertes financières du début d’année. Les conditions de crédit
L’action de la banque centrale (PBOC) sur les taux d’intérêt devrait commencent à être resserrées et le poids du service de la dette devrait
par conséquent rester prudente. Ainsi, depuis avril, PBOC a maintenu s’alourdir considérablement dans les prochains mois lorsque les me-
son taux directeur inchangé (à 2,95%, après une baisse de 30 points sures d’aide post-Covid (lignes de crédits, refinancements, rééchelon-
de base en début d’année). Elle a laissé les taux monétaires remonter nements des remboursements) prendront fin. Dans le secteur bancaire,
progressivement jusqu’en novembre (le taux repo à sept jours est passé le ratio officiel de créances douteuses était de 1,96% au T3 2020, un ni-
de 1,5% en moyenne en avril à 2,3% en novembre), mais a inversé la veau faible mais néanmoins en légère hausse. Les récents défauts d’en-
tendance depuis décembre (le taux repo à sept jours s’est établi à 1,9% treprises sur les marchés obligataires locaux annoncent également les
sur la première quinzaine de janvier). À très court terme, il est probable tendances à venir. Leur nombre devrait rapidement s’accroître. Surtout,
que PBOC s’assure d’apaiser les tensions sur les marchés monétaire et la proportion d’entreprises publiques en défaut commence à augmen-
obligataire et de maintenir des niveaux de liquidité confortables dans ter, preuve d’une lente baisse du soutien implicite de l’État.
le secteur financier.
Achevé de rédiger le 18 janvier 2021
En revanche, les autorités devraient durcir lentement les conditions de
crédit en agissant sur le cadre prudentiel et en imposant plus de dis-
cipline aux acteurs financiers. Elles ont déjà récemment introduit des
Christine PELTIER
christine.peltier@bnpparibas.com
La banque
d’un monde
qui change