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Conjoncture // Février 2020
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Décomposition de la croissance et du PIB potentiel
période 2005-2016. Les secteurs du commerce et de la construction ont
également contribué positivement à la croissance de la TFP. Dans le
même temps, la dynamique de la productivité a été négative dans le
secteur minier et les services d’ « utilité publique » (utilities). Par ailleurs,
les entreprises à capitaux étrangers et/ou exportatrices ont été plus
performantes que les entreprises publiques et privées domestiques,
avec des niveaux et des gains de productivité nettement supérieurs.
Enfin, les entreprises de grande taille apparaissent plus productives
mais moins dynamiques, à l’origine d’un resserrement de l’écart de
productivité en fonction de la taille de l’entreprise sur la période étudiée.
%
Productivité globale des facteurs (TFP)
Croissance du PIB
Capital
Travail
5
4
3
2
1
0
1
0
.1
0
.1
.4
0.2
2.2
1
0.5
1.8
0.6
2
.5
.4
1.5
2.0
1.4
3
.9
1.4
2.4
2.5
1.8
1
1.5
0.5
Le découpage en quatre sous-périodes permet de nuancer et de
préciser l’analyse de la décomposition de la croissance polonaise au
gré du cycle économique :
0.2
.0
0
-0.3
-
-
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6-02 03-08 09-13 14-18 96-18 19-25 (L) 19-25(M) 19-25(H)
Dans la phase initiale de transition (1996-2002), l’accumulation de
capital a été fondamentale, contribuant à hauteur de 95% à la
croissance du PIB polonais de 4,1% en moyenne, malgré un bas de
cycle économique mondial en 2001-2002.
Graphique 12
Source : AMECO, Banque mondiale,BNP Paribas
Pour reprendre la terminologie de Paul Krugman, la « transpiration »
pour la croissance, au travers de l’accumulation des facteurs de
production, s’est opérée quasi-exclusivement par le capital physique. À
côté de l’investissement privé domestique et étranger, l’investissement
public a bénéficié des co-financements européens, notamment dans le
cadre de projets d’infrastructures, la Pologne étant le premier
récipiendaire de fonds structurels européens. Dans le même temps,
Entre 2003 et 2008, période de forte croissance de l’économie mondiale
er
et d’intégration formelle de la Pologne au sein de l’UE (1 mai 2004), la
croissance économique polonaise a culminé à 4,8% par an.
L’accumulation de capital est restée dynamique, bien qu’en
ralentissement par rapport à la période précédente. Mais c’est surtout
l’accélération de la TFP qui est à souligner, qui contribue pour moitié à
la croissance économique.
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l’« inspiration », reflet du progrès technique , a aussi contribué de façon
substantielle à la croissance, soutenue notamment par l’amélioration du
cadre institutionnel, de l’environnement des affaires et du capital
humain.
Sur la période 2009-2013, marquée par la crise financière internationale
et la crise de la zone euro, la croissance polonaise a sensiblement
ralenti (2,8% par an), pour une large part en raison de la faiblesse de la
croissance de la TFP. Selon le FMI, le ralentissement de la TFP
reflèterait un essoufflement du progrès technique qui aurait débuté un
peu avant la crise financière internationale, dans un contexte de
diminution des effets des réformes structurelles antérieures, de
ralentissement de l’innovation à la « frontière technologique », voire de
vieillissement de la population.
Parallèlement, les contraintes démographiques ont limité
l’accroissement de la population active et de l’emploi : baisse du taux
de fertilité (1,4 enfant par femme en 2018 contre 2 en 1990), solde
migratoire structurellement négatif et solde naturel (naissances moins
décès) négatif depuis 2013, vieillissement de la population (17% de
plus de 65 ans en 2018 contre 9% en 1990) et un taux d’activité
inférieur à la moyenne européenne (70% contre 74% pour l’UE en 2018
selon Eurostat), notamment chez les femmes.
Enfin, de 2014 à 2018 la Pologne a enregistré une croissance du PIB
conforme à sa moyenne de long terme (4%) puis supérieure en 2017-
À défaut d’une augmentation significative de la quantité de travail, la
qualité de l’emploi a progressé à travers l’amélioration du niveau
d’éducation et la montée en compétences de la force de travail, en lien
avec la sophistication de la production et des exportations polonaises.
La part de la population active (15-64 ans) diplômée de l’enseignement
supérieur est ainsi passée de 10% en 1997 à 27% en 2018 (données
Eurostat), se rapprochant de la moyenne de l’UE (29%).
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018 (5%). Le ralentissement de l’accumulation du capital, dont la
contribution à la croissance a graduellement baissé de 3,9 points par an
en 1996-2002 à 1,4 point en 2014-2018, a été compensé par une
nouvelle accélération de la TFP. Sur cette dernière période, les gains
d’efficience ont ainsi retrouvé leur niveau de contribution à la croissance
de la période pré-crise, estimé à 2,5 points par an.
Selon le FMI (Selected Issues, février 2019), une analyse de la TFP
effectuée avec des données d’entreprises indique que le secteur
manufacturier a largement contribué à l'augmentation de la TFP sur la
Au-delà du retournement conjoncturel mondial, certains facteurs
structurels pèsent sur le potentiel de croissance économique à moyen
et long terme de la Pologne. Autour d’un scénario central établissant la
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croissance potentielle à 2,9% à l’horizon 2025, nous estimons une
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Les termes «inspiration» et «transpiration», associés à la croissance économique
au travers de gains d’efficacité et l’accumulation des facteurs de production,
remontent à un article de Paul Krugman paru dans le magazine Foreign Affairs en
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1994, faisant référence au «miracle asiatique». Selon lui, il n’y avait pas eu de
Nos scénarios sont basés sur différentes hypothèses relatives à l’effort
miracle en Asie de l’Est, la croissance rapide n’ayant été que le résultat
d’investissements massifs et d’une forte augmentation de l’emploi, plutôt que de
gains de productivité, c’est-à-dire la « transpiration » plutôt que l’ « inspiration ».
d’investissement entre 2019 et 2025. Le taux de croissance annuel moyen des
investissements dans les scénarios central, haut et bas est respectivement égal
à 4,6%, 5,1% et 4,1%.