Eco Perspectives

Reprise timide et scénario en demi-teinte

09/07/2019

Au premier trimestre (T1) de 2019, l’économie italienne s’est partiellement redressée, après la légère récession du second semestre 2018. Même si le PIB réel a augmenté de 0,1 % en glissement trimestriel (t/t), le taux de croissance annuel est ressorti négatif (-0,1 %), pour la première fois depuis 2013. La contribution de 0,5 % des exportations nettes est principalement due à la contraction des importations (-1,5 %). Les ventes italiennes à l’international ont progressé de 0,2 % (t/t). Au T1, la contribution de la demande intérieure à la croissance totale s’est élevée à 0,2 % tandis que celle des stocks a été négative de 0,6 %. La valeur ajoutée du secteur de la construction a augmenté de 2,4 % (t/t), en dépit d’une activité toujours déprimée, comme le montre l’évolution des nouveaux permis de construire. La valeur ajoutée du secteur des services a baissé de 0,2 % (t/t), avec une contraction significative dans le secteur financier et celui des professions libérales, tandis que l’industrie manufacturière a enregistré une légère progression.

Une conjoncture difficile…

Croissance et inflation

Malgré une reprise modeste au T1, les anticipations relatives à l’économie italienne demeurent incertaines. La confiance des chefs d’entreprise s’est détériorée, oscillant autour du niveau le plus bas de ces quatre dernières années. La propension à investir reste faible. Au T1 2019, la hausse de 0,6 % de l’investissement était due à l’augmentation des dépenses dans le secteur du bâtiment, tandis que le secteur des machines-outils et des équipements et celui des moyens de transport s’inscrivaient en retrait, respectivement, de 2,2 % et 5 % (t/t). La production industrielle s’est repliée en mars comme en avril avec un recul plus marqué dans le secteur des machines-outils et des équipements, dans celui des produits métalliques et celui des moyens de transport.

La confiance des ménages italiens est également en berne, ce qui pénalise les dépenses privées malgré des signes d’amélioration sur le marché du travail, le taux de chômage s’étant replié à 9,9 % en mai. Au T1, malgré une progression de 0,9 % du pouvoir d’achat, la consommation n’a augmenté que de 0,1 % (t/t), la propension à épargner des ménages italiens ayant progressé à 8,4 %.

La conjoncture reste donc difficile, ce qui complique la réalisation des objectifs budgétaires. En juin, la Commission européenne a déclaré que l’Italie était exposée à des déséquilibres macroéconomiques excessifs. Le gouvernement italien, qui a approuvé un correctif du budget 2019, est parvenu à un accord avec la Commission et a évité ainsi une procédure disciplinaire.
En 2019, le déficit public devrait se situer autour de 2 % du PIB, soit environ EUR 7 mds de moins que dans les estimations précédentes, à la faveur d’une hausse des recettes et d’une baisse des dépenses.

…mais une situation financière des entreprises qui s’améliore sur le fond

Si elles témoignent aujourd’hui d’une conjoncture difficile, les entreprises italiennes ont globalement renforcé leur situation depuis quelques années. En 2018, le ratio d’endettement était d’environ 40 %, en repli de près de neuf points de pourcentage par rapport à 2011. Encouragées par des incitations fiscales, les entreprises ont procédé à de nouvelles et importantes augmentations du capital, tout en réduisant la dette. L’amélioration de la structure financière s’explique également par la sélection sévère opérée pendant la crise, avec la fermeture des entreprises les moins robustes. En 2018, la valeur ajoutée des entreprises a atteint un sommet inédit depuis vingt ans.

Les entreprises ont, par ailleurs, bénéficié d’une baisse des charges d’intérêt, la remontée des rendements des emprunts d’État ne s’étant pas encore répercutée sur le coût du crédit. En 2018, le coût moyen de la dette financière s’établissait à 1 %, contre plus de 6 % en 2008. Les sociétés non financières italiennes ont également bénéficié d’une baisse de la fiscalité, économisant ainsi plus de EUR 20 mds par rapport à 2007. Malgré ces améliorations, le redressement de la rentabilité reste décevant, les coûts de main-d’œuvre ayant davantage augmenté que la valeur ajoutée. Au T1 2019, l’excédent brut d’exploitation rapporté à la valeur ajoutée a reculé à 40,7 %.

Le tourisme, moteur de l’économie

En 2018, le chiffre d’affaires du tourisme international s’est inscrit à EUR 1 226 mds, en hausse de 2,9 % par rapport à 2017. La part de marché de l’Italie a légèrement progressé, pour atteindre 3,4 %, se classant à la sixième place mondiale, derrière les États-Unis, l’Espagne, la France, la Thaïlande et le Royaume-Uni.

Dépenses des touristes étrangers

En 2018, les dépenses totales des touristes étrangers en Italie s’élevaient à environ EUR 41,7 mds (+6,5 %, en léger repli après +7,7 % en 2017) tandis que le nombre de touristes a augmenté de 3,7 %. En Italie, la part des recettes du tourisme international dans le PIB est inférieure à la moyenne de l’Union européenne comme de la zone euro. Elles concentrent en effet 2,4 % du PIB italien contre 8 % en Grèce et au Portugal, 5 % en Slovénie et en Espagne. Selon les données de la balance des paiements, les recettes du tourisme international en Italie atteignent environ 40 % des exportations totales de services et 7 % des exportations totales de biens et de services. La balance des voyages, qui est structurellement positive, est ressortie à EUR 16,2 mds. L’excédent de la balance du tourisme en pourcentage du PIB est supérieur à la moyenne européenne et, parmi les principaux pays de la zone euro, il occupe la deuxième place derrière celui de l’Espagne.

Le secteur du tourisme italien croît depuis la fin de la crise financière internationale. Evaluées aux prix courants, les recettes du tourisme international en 2018 ont augmenté d’environ 50 % par rapport à 2009, tandis que les dépenses touristiques des ressortissants nationaux à l’étranger étaient en hausse de 25 % par rapport à 2009. En 2015 (dernière année pour laquelle ces données sont disponibles), les industries liées au tourisme en Italie ont représenté, dans l’ensemble, 5,9 % de la valeur ajoutée totale du pays.

Les touristes en provenance de la zone euro ont le plus largement contribué à la croissance en 2018, par leur nombre comme par les recettes engendrées. Les dépenses des touristes allemands en Italie ont grimpé de 8,2 % en glissement annuel (g.a.) et celles des touristes français et britanniques, de 9 % et de 17,2 %, respectivement. Ces trois pays ont généré plus d’un tiers des recettes touristiques totales de l’Italie. Hors Union européenne, les États-Unis sont le principal importateur de services touristiques italiens.

Les régions du centre de l’Italie, à plus forte vocation touristique en raison de la présence d’un grand nombre de villes d’art, restent les destinations favorites des touristes étrangers, avec près de 30 % des arrivées totales en 2018. Les régions méridionales et les îles ont attiré 15 % des arrivées totales de touristes étrangers. Malgré les progrès accomplis ces dernières années, il existe toujours, dans ces régions, un écart entre les recettes du tourisme international et le « potentiel touristique » qu’elles représentent. Près des trois quarts du littoral italien et des parcs naturels nationaux sont, en effet, situés dans le sud de l’Italie et dans les îles ; ces régions abritent également un grand nombre de musées et de sites archéologiques.
En 2018, le nombre de voyages d’Italiens à l’étranger s’est élevé à 65,7 millions, soit une dépense de EUR 25,5 mds (+1,8 % et +3,8 %, respectivement, par rapport à 2017). L’augmentation des dépenses des touristes italiens dans les autres pays de la zone euro a été supérieure à la moyenne dans ces trois pays : Grèce, Espagne et Allemagne. Parmi les destinations hors de l’Union européenne, la tendance des dépenses a été particulièrement dynamique en Amérique du Nord et, en particulier, aux États-Unis.

Le secteur italien du tourisme se caractérise par l’existence de petites et micro-entreprises. Selon l’Istat, environ 97 % des entreprises de ce secteur employaient moins de dix personnes en 2016 (contre 95 % pour l’ensemble de l’industrie et des services). Les entreprises de vingt salariés ou plus ne représentent que 0,9 % du total (contre 1,8 % dans l’industrie et les services). Cependant, les chaînes hôtelières multinationales et les autres services touristiques, dont les services de transport, fournis par des sociétés étrangères opérant en Italie, occupent une place importante. Les entreprises étrangères emploient 6,1 % de l’ensemble du personnel du secteur touristique italien et leur part est d’environ 14 % en termes de valeur ajoutée comme de chiffre d’affaires. Sur la période 2012-2016, les entreprises du secteur du tourisme ont enregistré une performance positive : leur valeur ajoutée a augmenté de 12,5 % en termes nominaux contre une variation, pour le secteur des services en général, de +11,2 % et de 8,8 % pour l’industrie et les services dans leur ensemble. L’augmentation de la valeur ajoutée dans le secteur du tourisme s’explique davantage par une baisse notable des coûts que par une augmentation du chiffre d’affaires des entreprises.

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