L’impasse politique
Nouvel échec collectif de la politique espagnole : bien qu’arrivé en tête des élections législatives anticipées du 28 avril, Pedro Sànchez n’est pas parvenu à former un gouvernement susceptible d’être investi par le Congrès des députés. Le leader socialiste a cherché à former un gouvernement minoritaire en s’appuyant sur son seul parti, mais son projet s’est heurté à la volonté de Podémos d’intégrer le gouvernement au sein d’une véritable coalition. Il a finalement renoncé fin septembre à rechercher une nouvelle investiture, et laissé le Roi convoquer de nouvelles élections. Les citoyens seront donc de retour aux urnes le 10 novembre prochain pour la quatrième fois en quatre ans, afin d’élire leurs députés. Même s’ils peuvent, bien sûr, évoluer dans les prochaines semaines, les premiers sondages laissent toutefois penser que les électeurs n’ont pas l’intention de modifier profondément les choix exprimés il y a moins de six mois. Si ces tendances se confirment, le scrutin laisserait presque inchangés les rapports de force au sein de l’hémicycle par rapport à la situation actuelle[1]. Cela imposerait alors aux états-majors des partis politiques de se résoudre à ajuster leurs positions pour sortir de l’impasse actuelle.
Le ralentissement se précise
L’image de l’économie espagnole dans le panorama européen n’a pas changé : comparée aux autres grandes économies de la zone, l’Espagne se porte plutôt bien. Elle bénéficie d’une croissance plus dynamique, assise sur des bases relativement larges et solides. Résiliente jusqu’ici, l’activité a toutefois donné ces dernières semaines des signes clairs que le ralentissement économique, déjà très perceptible au niveau européen depuis plusieurs trimestres, prend forme et s’amplifie également dans la péninsule. Dans le secteur manufacturier en particulier, l’indice PMI des directeurs d’achats s’est ainsi clairement installé dans la zone de contraction cet été. En outre, les statistiques pour la croissance de 2018 et début 2019 ont été assez nettement révisées. Elles font désormais état d’une croissance moins vive même si elle est plus équilibrée, avec une consommation privée bien moins robuste qu’initialement annoncé et un ralentissement du commerce extérieur moins marqué. Au final, la croissance du PIB pour 2018 est revue à la baisse à 2,4% (-0,2 pp). Surtout, elle s’établit mi-2019 à peine au-dessus de 2% (2,1% g.a.) ; la croissance de la consommation des ménages n’atteignant quant à elle plus que 0,8% g.a. Dans ce contexte, nous avons revu notre prévision pour 2020 autour de 1,5%. L’effet sur le marché du travail de ce ralentissement commence à se faire sentir, avec une hausse de l’emploi de seulement 0,3% t/t au T2, au plus bas depuis 2014. Le taux de chômage, qui vient de s’afficher en deçà des 14% pour la première fois depuis dix ans (13,9% au mois de juillet), reste à ce stade orienté à la baisse, mais de façon moins marquée.
Les finances publiques en pilote automatique
Dans ce contexte, la conduite des finances publiques reste sur pilote automatique. Pas plus que pour 2019, la situation politique ne devrait rendre possibles la préparation et l’adoption d’un projet de budget pour 2020, du moins d’ici la fin de l’année. Restent, dès lors, deux grands facteurs susceptibles de peser sur l’évolution du solde budgétaire : le ralentissement économique un peu plus marqué que prévu, qui pèse en particulier sur les recettes fiscales, et la chute des taux d’intérêt souverains dans la zone euro, qui amène régulièrement les États à revoir à la baisse le coût moyen de la dette à l’émission (0,37% en Espagne pour la dette émise au premier semestre 2019) et la charge annuelle de la dette pour les finances publiques (2,4 points de PIB attendus en avril dernier). Qu’il atteigne ou pas la cible d’un déficit de 2% du PIB en 2019, le futur gouvernement aura besoin de soutien parlementaire s’il conserve l’ambition d’équilibrer les finances publiques à l’horizon 2022.