Outre le fait qu’elles aient pu manquer, les ressources bancaires n’ont pas été allouées efficacement. Une étude de la Banque d’Italie (Schivardi et al., 2017)[9] indique que, en réaction au durcissement des normes prudentielles qui s’est opéré après 2008, les établissements insuffisamment capitalisés (pour l’essentiel, les banques régionales) ont prolongé leurs prêts aux entreprises dites « zombies »[10], ceci de manière à éviter la matérialisation des défauts. Cette mauvaise allocation des ressources s’est faite au détriment des sociétés plus rentables, ce qui a pu constituer un facteur de fragilité.
Le travail, richesse rare, mal valorisée
L’évolution du facteur travail en Italie est elle aussi en cause dans la dégradation de la croissance potentielle, et ce malgré les réformes des années 1990 et 2010 (dont le Jobs Act)[11].
La croissance annuelle moyenne du nombre d’heures travaillées, encore positive dans les années 2000 (+0,3%), est tombée à zéro, sa contribution à la croissance potentielle devenant même négative à partir de 2014 (graphique 3). Les réformes ont permis un enrichissement de la croissance en emplois, mais ont cependant laissé de côté les politiques de formation. A 22%, la part des 25-34 ans ayant un diplôme universitaire est inférieure de 7 points à la moyenne de l’UE. Par ailleurs, l’Italie se classe mal en termes de formation professionnelle ou d’évaluation des compétences des adultes (OCDE, 2019[12]).
La proportion de chômeurs de longue durée reste élevée et stable, à 60% du total en 2018, tout comme le chômage structurel. A 10,2% de la population active en 2019 (chiffre de la Commission européenne), celui-ci est l’un des plus élevés de l’OCDE. Surtout, il ne baisse pas alors que quelques progrès ont pu être récemment obtenus sur ce terrain en Espagne, au Portugal ou en France.
Enfin, la population vieillit (près d’un Italien sur quatre atteint ou dépasse 65 ans, ce qui fait de l’Italie le 2e pays le plus vieux au monde après le Japon) et celle en âge de travailler décroît. Par ailleurs, et bien qu’en hausse, le taux d’activité des Italiens reste, à 67%, l’un des plus faibles de la zone euro (il atteint par exemple 81% en Allemagne)[13]. Record dans l’UE, 29% des jeunes Italiens (20-34 ans) ne sont ni employés, ni en formation ou en études (NEET, Eurostat) contre 17% en moyenne dans l’UE[14]. De plus, ils sont 50 000 a quitter le pays chaque année.
L’output gap déjà refermé ?
L’affaiblissement du potentiel pourrait aboutir au fait que, bien qu’inscrite dans une reprise tardive et modeste, l’économie italienne bute d’ores et déjà sur des contraintes de capacités. C’est, semble-t-il, l’analyse faite par la Commission européenne, qui indique que l’output gap (l’écart du PIB à son potentiel) s’est refermé en 2018 (graphique 5).