Eco Conjoncture

Des chaînes d’approvisionnement plus résilientes après la pandémie de Covid-19

20/12/2021
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La pandémie de Covid-19 a mis en évidence les faiblesses et les vulnérabilités des chaînes d’approvisionnement mondiales. Depuis, les appels en faveur de chaînes de valeur (CVM) plus robustes et plus résilientes, et d’une moindre dépendance à l’égard des pays asiatiques, se multiplient. Les entreprises travaillent ainsi à renforcer la résilience de leur approvisionnement à travers une meilleure transparence des chaînes de valeur, davantage de redondance au sein des réseaux de fournisseurs, de transport et de logistique. Au niveau macroéconomique, les États-Unis comme l’Union européenne revoient leur stratégie industrielle afin d’être plus autonomes dans certains secteurs clés. Cependant, les chaînes de valeur mondiales ne constituent pas un problème en soi. Au contraire, durant la crise du Covid-19, elles ont été une solution car elles ont permis d’amortir les chocs d’offre sur les produits de consommation mondiale.

La pandémie de Covid-19 a mis en évidence les faiblesses et les vulnérabilités des chaînes d’approvisionnement mondiales. Premièrement, au cours du « Grand confinement » de 2020, l’offre a pâti des limitations aux frontières et des autres mesures de restriction sanitaire qui ont entraîné la fermeture de nombreux sites de production. Les fabricants d’appareils respiratoires et d’équipements de protection individuelle, pour la plupart basés en Chine, n’ont pu faire face à la flambée de la demande mondiale pour ces produits. Les stocks stratégiques de masques se sont révélés insuffisants et, parfois même, périmés. Les fermetures de restaurants, hôtels et magasins ont conduit à un transfert de la demande, des services vers les biens, ce qui a créé des tensions sur l’offre de certains biens de consommation.

La deuxième étape, dans laquelle se trouve aujourd’hui l’économie mondiale, est la difficulté des chaînes de valeur mondiales (CVM) et de la logistique de transport à faire face à la forte reprise de la demande mondiale, en particulier de la part des pays développés. Certains secteurs industriels ont signalé de graves pénuries d’intrants, ce qui a un impact significatif sur leur production. Ainsi, l’activité dans l’industrie automobile a été perturbée par la pénurie de semi-conducteurs, entraînant la fermeture temporaire d’usines[1]. Le secteur du bâtiment a été confronté à une pénurie de bois, tandis que l’industrie alimentaire manque d’emballages.

Qu'est-ce que les chaînes de valeur mondiales ?

À ces problèmes se sont ajoutées des tensions sans précédent dans la logistique de transport. La réduction inédite des échanges commerciaux internationaux a perturbé le flux normal de conteneurs et entraîné la raréfaction de ces derniers. Les ports ont été submergés par l’arrivée des porte-conteneurs et les temps d’attente, liés à la manutention de ces derniers, ont atteint des niveaux sans précédent[2]. L’échouage de l’un des plus grands navires mondiaux dans le Canal de Suez, en mars 2021, et, plus récemment, les perturbations dans les ports chinois, dues à une résurgence des contaminations à la Covid-19, n’ont fait qu’aggraver la situation. De surcroît, un manque de chauffeurs de poids lourds retarde les livraisons en Europe et en Amérique du Nord.

Pour remédier à ces problèmes, l’OCDE engage vivement à concevoir des plans de relance économique dans l’optique de « reconstruire en mieux » (« build back better »). Les décideurs ne doivent pas se contenter de remettre rapidement les économies sur pied ; ils doivent aussi faire en sorte qu’elles résistent mieux aux chocs futurs. Le bien-être et l’inclusion doivent être au cœur de cette approche, tout comme la cohérence des décisions prises avec les objectifs de réduction des émissions de CO2 à long terme, la résilience aux impacts climatiques, le ralentissement de l’érosion de la biodiversité et l’augmentation de la circularité des chaînes d’approvisionnement.

Après avoir tiré les leçons de la crise financière mondiale de 2008, chaque pays et chaque zone économique a montré sa volonté de mener des politiques plus proactives pendant la pandémie. Aux États-Unis, l’administration Biden met l’accent sur la sécurité nationale, la sécurité économique et le leadership technologique[3]. Elle considère, en effet, que les États-Unis sont trop dépendants des fournisseurs étrangers dans de nombreux domaines - n particulier vis-à-vis de la Chine - à la suite d’une politique qui a privilégié l’efficacité économique et la baisse des coûts. Le gouvernement souhaiterait renforcer l’outil industriel, diversifier les sources d’approvisionnement internationales et accroître les investissements dans les infrastructures. Ces objectifs s’inscrivent dans le cadre du projet de loi sur les infrastructures de USD 1 000 mds, approuvé en novembre 2021. L’Union européenne, quant à elle, a revu sa stratégie industrielle pour renforcer l’autonomie de l’Europe dans des domaines stratégiques. Cela pourrait se traduire par une relocalisation d’activités essentielles, dont la production de semi-conducteurs et de produits pharmaceutiques.

La présente étude sera consacrée à l’état des CVM dans le secteur manufacturier, aux effets de la pandémie de Covid-19 sur ces chaînes de valeur, ainsi qu’à leurs évolutions futures. Les aspects environnementaux, quoiqu’importants, dépassent largement le cadre de cette étude.

L’âge d’or de la mondialisation

Les années 1990 ont marqué le début d’une phase d’expansion significative du commerce international et d’une interdépendance accrue des processus de production entre les pays. Au cours de cette décennie, les exportations mondiales en valeur ont quasiment doublé. À partir de l’année 2000, le rythme s’est encore accéléré jusqu’à la crise financière mondiale de 2008, qui a brusquement interrompu cette dynamique[4]. Les exportations mondiales, rapportées au PIB mondial, sont passées de 15 % à la fin des années 1980 à 25,5 % en 2008 (voir graphique 1). Trois facteurs déterminants expliquent ces évolutions. Le premier est la « désintégration » de la production (i.e. le fractionnement des processus de production) qui a permis aux entreprises de réaliser des économies substantielles en sélectionnant les fournisseurs les moins chers[5]. Cette tendance est allée de pair avec une croissance rapide des échanges de biens intermédiaires – à la fois pour les pays membres et non membres de l’OCDE – qui a largement dépassé celle du PIB mondial, en particulier, entre la fin des années 1990 et 2008 (voir graphique 2 et graphique 3).

Le deuxième déterminant est l’intégration croissante des marchés mondiaux. Dans nombre de régions, les barrières douanières ont été rabaissées voire supprimées (voir graphique 4). L’Union européenne a créé le marché unique en 1993. En Amérique du Nord, les États-Unis, le Canada et le Mexique ont signé l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), qui est entré en vigueur le 1er janvier 1994. En 2011, un groupe de pays de l’Est et du Sud-Est asiatiques et du Pacifique a signé un partenariat économique régional global (Regional Comprehensive Economic Partnership ou RCEP). Une autre étape décisive a été franchie avec l’intégration de la Chine (en 2001) et des anciens pays communistes d’Europe centrale et orientale dans le système commercial mondial.

Troisième déterminant, les coûts de transport n’ont cessé de baisser avec le temps, en partie en raison de la généralisation du transport conteneurisé.

Entre les années 1990 et la crise financière de 2008, les CVM – les participations en amont comme celles en aval – ont connu une expansion significative, qui a coïncidé avec une période de libéralisation rapide des échanges (voir l'encadré « La participation aux chaînes de valeurs mondiales »). De nouvelles puissances exportatrices sont apparues, tout d’abord la Chine, mais aussi des pays d’Asie du Sud-Est (Vietnam, Thaïlande, Malaisie), d’Europe centrale et orientale (Bulgarie, République tchèque, Hongrie, Pologne et Slovaquie), tandis que les hubs manufacturiers, comme la Corée du Sud et Taiwan, consolidaient leur position.

Part des exportations dans le PIB mondial

Ce processus s’est néanmoins grippé depuis la crise financière mondiale de 2008. Les exportations mondiales, rapportées au PIB mondial, ont atteint un point culminant à l’été 2008 et sont, depuis, sur une trajectoire baissière (voir graphique 1). D’autres indicateurs, tels que les exportations d’intrants intermédiaires, les flux d’investissements directs étrangers (IDE) et la participation aux CVM, évoluent également à la baisse depuis cette époque[6].

Exportations de biens intermédiaires et PIB mondial (1995=100)

L’expansion rapide du commerce international a radicalement modifié l’économie mondiale. Depuis que David Ricardo a développé la théorie de l’avantage comparatif au début du 19e siècle, les économistes s’accordent à penser que le commerce international peut constituer un avantage pour tous les pays. Ces derniers bénéficient ainsi de baisses de prix sur les produits importés, de retombées technologiques, d’économies d’échelle (pour les produits sur lesquels ils disposent d’un avantage comparatif) et de gains de productivité. De plus, grâce à la fragmentation des processus productifs, les pays en développement ont pu participer plus facilement aux processus de production mondiaux, en particulier en mettant à profit leurs avantages comparatifs sur les coûts dans les activités à forte intensité de main-d’œuvre. Cela a eu un impact positif sur la productivité et le revenu par habitant dans les pays en développement[7]. La distribution mondiale des revenus est redevenue unipolaire, comme c’était le cas jusqu’aux années 1950 (voir graphique 5). De plus, les inégalités de revenus entre pays ont été réduites ; le coefficient de Gini correspondant a diminué en 2000 pour la première fois depuis plusieurs décennies (voir graphique 6).

Importations des pays de l'OCDE

Dans les pays développés, les résultats sont mitigés. La désintégration du processus de production a encouragé la création d’emplois hautement qualifiés sur le marché intérieur ainsi qu’une baisse des prix pour les consommateurs. Elle a néanmoins aussi conduit à une plus grande délocalisation de l’activité, avec des conséquences défavorables sur l’emploi, en particulier pour les moins qualifiés[8]. Résultat, les inégalités au sein des pays se sont aggravées (voir graphique 5). La libéralisation des échanges n’est pas le seul facteur à l’origine de l’accroissement des inégalités dans le monde développé, mais elle y a contribué de manière importante. Sur le plan politique, elle a engendré une polarisation entre les partisans de la mondialisation et ceux qui craignent de payer le prix de la délocalisation, alimentant en partie la montée des populismes[9].

Tarifs douaniers moyens appliqués aux importations mondiales (%)

L’autre effet négatif de la mondialisation est l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. La baisse des coûts de transport a été un moteur de l’expansion du commerce mondial. Cependant, les systèmes et moyens de transport à énergie fossile ne tiennent pas compte du coût social du carbone (i.e. les dommages économiques, mesurés par la valeur en dollars du total des dommages provoqués par la libération dans l’atmosphère d’une tonne de dioxyde de carbone). De plus, les entreprises ont parfois déplacé leur production dans les pays émergents pour bénéficier de réglementations environnementales moins contraignantes.

Distribution des revenus mondiaux (US dollars en PPA de 1990)
Indice de Gini
La participation aux chaînes de valeurs mondiales

Ralentissement de la mondialisation et concentration régionale

Depuis la crise financière mondiale de 2008, l’intégration économique a marqué le pas. Les échanges mondiaux en pourcentage du PIB ont diminué (voir graphique 1). L’observateur de tendance néerlandais, Adjiedj Bakas, a baptisé ce phénomène de « slowbalisation » (ou mondialisation lente)[10]. Qu’est-ce qui explique ce ralentissement ? En principe, une mondialisation lente après une période de croissance extraordinaire des échanges internationaux n’a rien d’exceptionnel. Elle est l’expression du « principe de Stein », selon lequel ce qui ne peut durer indéfiniment s’arrête[11].

Dans le cas présent, la stagnation du commerce international peut être imputée à divers facteurs :

  • Un repli de l’activité manufacturière comparativement aux services. À mesure du développement économique et de l’augmentation des revenus, la demande pour les biens a tendance à reculer au profit de celle pour les services. Ces derniers sont, par nature, moins facilement externalisés que les biens. D’où la tendance progressivement moins dynamique du commerce de marchandises.
  • Les coûts de transport plafonnent, après une baisse significative en partie due à un plus large recours aux conteneurs.
  • Les coûts de main-d’œuvre deviennent un facteur moins important car les processus de fabrication sont de plus en plus automatisés. Les entreprises ont davantage recours à une main-d’œuvre qualifiée qu’à des salariés faiblement rémunérés.
  • Des filières d’approvisionnement plus courtes peuvent permettre aux entreprises de s’adapter rapidement aux préférences des consommateurs, ce qui leur confère un avantage concurrentiel.
  • La montée des tensions commerciales et l’augmentation des droits de douane, ainsi que des politiques commerciales tournées vers le marché intérieur, freinent les échanges.
  • Les catastrophes passées et les perturbations des chaînes d’approvisionnement qu’elles ont provoquées conduisent souvent à une réévaluation de ces chaînes. En particulier, depuis le séisme de Tohoku au Japon en 2011, les entreprises accordent plus d’importance à l’amélioration de la résilience des CVM (voir section intitulée « Construire des chaînes d’approvisionnement plus résilientes »).
La régionalisation des échanges

Selon Kilic et Marin (2020)[12], l’ère de l’hyper-mondialisation a pris fin après la crise financière mondiale de 2008-2009. Les auteurs montrent, en effet, que la part des intrants importés des pays en développement, rapportée aux intrants totaux des pays développés, s’est stabilisée depuis 2011.

Le processus de mondialisation n’en est pas moins complexe et il doit être analysé dans sa globalité. Malgré le ralentissement apparent du commerce mondial, Baldwin et Freeman (2020b) montrent que l’exposition totale des pays entre eux (c’est-à-dire leur exposition directe et indirecte) continue d’augmenter dans bien des cas. La banque de données OCDE-OMC TiVA montre que pour l'UE15, la part de la valeur ajoutée étrangère dans la demande finale totale a continué d'augmenter, passant de 15 % en 1995 à près de 30 % en 2018. En particulier, la contribution de l'Asie de l'Est et du Sud-Est a atteint 11,3 % en 2018, soit une hausse de près 4 points en une décennie. De plus, les importations en provenance des économies européennes en transition (UE13) ont rapidement augmenté. Depuis leur adhésion à l'UE, leur contribution à la valeur ajoutée de l’UE15 est passée d'environ 2 % en 2004 à 4,6% en 2018.

On observe également une plus grande concentration régionale des échanges. Sur le tableau 1, nous avons cartographié l’interconnexion des secteurs manufacturiers entre grands pays et zones géographiques, sur la base des contributions à la valeur ajoutée en 1998, 2008 et 2018[13]. Les chiffres correspondent à la part des pays (en colonne) dans le contenu en valeur ajoutée de la demande finale des autres pays (ligne). Par exemple, en 2018, le secteur manufacturier allemand utilisait 54,3 % d’intrants de production locale, tandis qu’il dépendait de la Chine pour 6,1 % de ses intrants directs et indirects.

Le tableau montre clairement la position dominante de l’Asie dans l’industrie manufacturière. La Chine, le Japon et la Corée du Sud contribuent tous de manière significative à la production manufacturière du reste du monde. En particulier, les intrants en provenance de Chine ont sensiblement augmenté entre 2008 et 2018. En 2018, la Chine contribuait pour plus de 5 % à la production manufacturière de chaque grand pays. Elle a également réduit sa dépendance à l’égard des autres pays pour les intrants. C’est ce qui explique la diminution de la part des importations d’intrants dans les pays non-membres de l’OCDE (voir ci-dessous).

Aperçu sectoriel sur les chaînes de valeur mondiales

Quoi qu’il en soit, le système des chaînes d’approvisionnement mondiales reste plus concentré au niveau régional qu’au niveau mondial. On distingue, à cet égard, trois blocs régionaux : l’Asie, l’Amérique du Nord et l’Europe. Les intrants importés par les pays situés dans chacun de ces blocs proviennent essentiellement de pays du même bloc.

De plus, les échanges sont progressivement en train de changer de nature, les services occupant désormais une place grandissante par rapport aux biens « physiques ». Avant la pandémie de Covid-19, les exportations de services représentaient 25 % des exportations mondiales, contre 20 % avant la crise financière de 2008 (données de l’OMC). Le commerce international connaît aujourd’hui un redressement plus lent dans le secteur des services que dans celui des biens. En cause : les restrictions aux frontières liées à la pandémie de Covid-19, qui ont un impact significatif sur le tourisme et les voyages d’affaires, ainsi que sur les services dans le secteur du bâtiment[14]. Cependant, les services « high-tech » ont été beaucoup moins impactés par la pandémie. C’est le cas des télécommunications et des technologies de l’information et des communications (TIC), des services financiers ou des revenus de la propriété intellectuelle. En particulier, les services liés aux TIC ont plus que doublé au cours de la décennie écoulée. En 2019, ils représentaient plus de 10 % des exportations totales de services. C’est en partie le résultat de l’accélération de quelques tendances structurelles comme la digitalisation, l’automatisation ou la « servicification » des processus de production (i.e. une utilisation plus large des services aux côtés des produits traditionnels).

Rupture des chaînes d’approvisionnement pendant la crise du Covid-19

Fin décembre 2019, la Commission municipale de santé de Wuhan signalait un cluster de cas de pneumonie à Wuhan, dans la province de Hubei. Il s’agissait en réalité d’un nouveau coronavirus, dont la maladie qu’elle provoque fut ultérieurement baptisé « Covid-19 ». Un mois plus tard, le 23 janvier 2020, les autorités chinoises ont ordonné un confinement à Wuhan et dans d’autres villes du Hubei, qui a ensuite été renforcé et étendu[15]. Le confinement extrêmement sévère, adopté en Chine, a semble-t-il bien fonctionné, les contaminations ayant presque entièrement cessé, selon les chiffres officiels. Toutefois, ces mesures ont été trop tardives. Le virus avait déjà gagné de nombreuses régions du globe. Plusieurs pays européens ont ordonné un confinement en mars 2020 pour essayer de faire baisser le taux d’infection, et certains États des États-Unis ne devaient pas tarder à leur emboîter le pas. Malgré les efforts déployés pour limiter les contaminations et une campagne de vaccination extensive, la pandémie n’a pas été définitivement enrayée. Au moment où nous publions (décembre 2021), l’Europe est confrontée à une nouvelle vague d’infections et d’hospitalisations. D’après les estimations officielles, la pandémie a fait plus de cinq millions de victimes dans le monde.

La pandémie de Covid-19 relève typiquement des événements à faible probabilité, mais à fort impact. Nassim Taleb a donné à ce type d’événement le nom de « cygne noir »[16]. Il est vrai qu’une pandémie mondiale n’est pas un événement nouveau ou même improbable en soi. Le film Contagion, sorti en 2011, dépeint précisément ce type de pandémie. Cependant, on a considéré que ce genre d’histoires était le propre des thrillers ou des films d’horreur. En général, les opérateurs du marché s’attendent à ce que les autorités prennent suffisamment de précautions pour empêcher ces événements à faible probabilité de se produire, comme pour l’épidémie de SRAS (2002-2004). De plus, beaucoup d’entreprises participant aux CVM ignorent peut-être, ou sous-estiment, l’impact de ces événements sur leur réseau de fournisseurs.

L’impact de la pandémie est très important en raison de sa nature mondiale, de sa durée et des perturbations qu’elle a provoquées dans presque tous les secteurs industriels. Avant la pandémie, le Fonds monétaire international estimait que la croissance du PIB mondial, en parité de pouvoir d’achat, serait de 2,3 % en 2020 (prévisions d’octobre 2019). D’après ses dernières projections (octobre 2021), le PIB s’est finalement contracté de 2,2 % en 2020. Autrement dit, la pandémie a entraîné une perte d’environ USD 6 000 mds dans le monde en 2020, que le fort rebond enregistré en 2021 a permis de rattraper en partie.

La pandémie de Covid-19 a affecté l’économie à travers plusieurs canaux. Tout d’abord, par le biais des mesures de confinement : les restrictions des voyages et les fermetures administratives d’entreprises ont réduit l’activité, en particulier, dans le secteur des services (magasins non alimentaires, théâtres, cafés et restaurants, etc.). L’industrie manufacturière a été moins touchée même si, dans certains domaines, les autorités ont ordonné la fermeture temporaire d’usines dans le cadre d’un confinement général[17]. Le deuxième canal est celui du choc de la demande : la consommation a été sérieusement freinée en raison du confinement et des pertes de revenus que celui-ci a pu engendrer. Ainsi, les ventes d’automobiles se sont effondrées à la suite de l’introduction des restrictions sur les déplacements.

Le troisième canal est lié à l’impact des ruptures d’approvisionnement sur les CVM. La pandémie ayant d’abord frappé la Chine, son secteur manufacturier a été le premier à connaître des fermetures d’usines et des restrictions des approvisionnements. Compte tenu du rôle central de ce pays dans l’industrie manufacturière mondiale, ce choc s’est rapidement transmis aux usines manufacturières des autres pays, même ceux qui étaient moins affectés par la pandémie. Ces usines avaient en effet du mal à se procurer les intrants industriels importés dont elles avaient besoin. De plus, le commerce international a pâti des restrictions sur les voyages. Le choc d’offre initial s’est ainsi propagé au reste du monde. La gestion des stocks en flux tendus a aggravé les problèmes dans de nombreux secteurs.

Malgré une diminution de l’intensité de la pandémie et la levée graduelle des mesures de confinement, les perturbations n’ont pas disparu du jour au lendemain. Malgré la réouverture progressive de ses usines, la Chine n’a pu reprendre pleinement ses exportations. Ces dernières ont été entravées car le flux normal des conteneurs a été perturbé par la réduction sans précédent des échanges commerciaux mondiaux. Les compagnies de fret maritime n’ont pas pu trouver des conteneurs en nombre suffisant pour assurer le transport international de la production, ce qui a fait grimper les coûts du transport maritime. De plus, de nombreux ports n’étaient pas en mesure d’assurer une manutention rapide des porte-conteneurs entrants, dont le nombre avait brutalement augmenté. Certains d’entre eux ont également été perturbés par les fermetures liées à la Covid-19. L’échouage de l’immense porte-conteneurs Ever Given dans le Canal de Suez, qui a paralysé l’une des voies de navigation les plus fréquentées au monde pendant près d’une semaine, n’a fait qu’aggraver la situation. Ces problèmes de transport devraient durer encore pendant une bonne partie de 2022[18].

Le secteur industriel n’a pas pu faire face à la rapidité et à l’ampleur du rebond de l’activité. Comme elle s’attendait à une déprime prolongée des ventes, l’industrie automobile a annulé des commandes de semi-conducteurs. En réponse, l’industrie des semi-conducteurs a réorienté une part plus importante de sa production vers le secteur des biens de consommation, le confinement ayant stimulé, par exemple, la demande de consoles de jeux, d’ordinateurs portables et de télévisions. Lorsque l’activité dans l’industrie automobile s’est normalisée, l’industrie des semi-conducteurs n’a pas été en mesure d’accroître la production suffisamment rapidement pour satisfaire la demande dans ce secteur. Les analystes s’attendent à ce que les problèmes perdurent dans le secteur automobile jusqu’à la fin de 2022, voire en 2023 pour les plus pessimistes.

Construire des chaînes d’approvisionnement plus résilientes

La perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales pendant la crise Covid-19 a relancé le débat sur les faiblesses structurelles de ces chaînes de production et, en particulier, sur la question de savoir si les gains d’efficacité dus aux CVM compensent les risques associés à la transmission des chocs. McKinsey Global Institute (MKGI) a consacré une analyse à l’exposition du secteur manufacturier aux perturbations des chaînes d’approvisionnement causées par des catastrophes naturelles, des crises financières, des incertitudes géopolitiques et des cyberattaques[19]. La conclusion est la suivante : les entreprises peuvent s’attendre à perdre plus de 40 % des bénéfices d’un exercice, en moyenne, sur une décennie. Dans certaines industries, un seul événement grave qui perturberait la production pendant 100 jours pourrait effacer près d’une année de bénéfices.

La gestion des stocks en flux tendus a permis aux entreprises d’améliorer leur rentabilité en réduisant leurs stocks de matières premières et de produits semi-manufacturés. Cependant, ce mode de gestion a également aggravé la vulnérabilité de leurs chaînes d’approvisionnement. Bien avant la pandémie de Covid-19, les entreprises ont pris conscience de ces risques et investi des montants substantiels dans la prévention de ces perturbations ou l’atténuation de leur impact.

Le séisme de Tohoku, puis les graves inondations survenues en Thaïlande en 2011 ont servi d’éléments déclencheurs. Après le tremblement de terre, de nombreuses usines japonaises situées hors de la zone concernée ont dû fermer en raison du manque d’intrants[20]. Les entreprises ont revu, en conséquence, leurs plans de reprise d’activité. Dans un premier temps, elles ont créé une base de données complète recensant la totalité de leurs chaînes d’approvisionnement. Il a fallu une semaine à Toyota pour dresser une liste de 500 pièces provenant de 200 sites, qu’il serait difficile de sécuriser et de ramener au niveau de production normal[21]. L’industrie automobile japonaise a été particulièrement touchée par la destruction d’une ligne de production de Renesas, un fabricant de semi-conducteurs.[22]

Apprendre de la Covid-19

La crise de la Covid-19 a été très différente des précédentes crises en raison de son échelle mondiale et du fait qu’il ne s’agissait pas seulement d’un problème d’approvisionnement. En réalité, la plupart des perturbations des chaînes d’approvisionnement ont été provoquées par un bond de la demande, plutôt que par la destruction de lignes de production. Par exemple, la pénurie d’équipements de protection individuelle et d’appareils respiratoires, dans les premiers temps de la crise, s’explique par une envolée de la demande. Les CVM ont alors joué un rôle important en réduisant les pénuries de masques, car la Chine a été en mesure d’augmenter sa production. De même, la pénurie de semi-conducteurs est causée par un excès de demande et par une réorientation difficile de la capacité de production, liés à la rapidité de la reprise économique. Les goulets d’étranglement dans les infrastructures portuaires concernent principalement la partie domestique de la chaîne de valeur et il est probable qu’ils ne soient que temporaires.

La pandémie de Covid-19 a une fois de plus fait ressortir le rôle central de la Chine ainsi que celui des pays de l’Est et du Sud-Est asiatiques en matière de CVM. Cette concentration n’est pas uniquement due au fait que les entreprises ont privilégié les pays à bas salaires. La réalisation d’économies d’échelle constitue un facteur majeur de réduction des coûts de production. Cependant, la concentration de fournisseurs ou d’acheteurs peut renforcer les probabilités de perturbation et amplifier la propagation des chocs. En cas de rupture d’approvisionnement, les entreprises qui dépendent de ces fournisseurs ne disposent guère de marge de manœuvre pour en changer rapidement. Du côté de la demande, la dépendance à l’égard de clients trop peu nombreux est aussi une source de fragilité.

L’étude MKGI examine en détail la perspective d’un rééquilibrage des chaînes de valeur de plusieurs industries. Elle souligne en particulier qu’en raison de l’interconnexion des chaînes de valeur, l’intérêt économique d’un déplacement géographique à grande échelle des sites de production est limité. Il est difficile de relocaliser les chaînes de valeur à forte intensité de capital ou de connaissances compte tenu des sommes colossales qui y ont été investies et/ou des écosystèmes qui se sont développés autour d’elles. En revanche, les chaînes de valeur à forte intensité de main-d’œuvre sont comparativement plus « faciles » à déplacer. Ces évolutions divergentes entre les chaînes de valeur à forte densité de capital et de main-d’œuvre avaient déjà été observées avant l’apparition de la pandémie. Entre 2015 et 2018, la production dans les secteurs à coefficient élevé de capital, comme les semi-conducteurs et les communications mobiles, s’est de plus en plus concentrée dans quelques pays asiatiques. Dans l’habillement, en revanche, la part des trois premiers pays exportateurs dans les échanges a diminué.

Selon l’étude MKGI, 93 % des responsables de chaînes d’approvisionnement mondiales envisagent d’améliorer la résilience de ces dernières en mettant en place des stratégies similaires à celles des entreprises japonaises après le séisme de Tohoku. Premièrement, les entreprises améliorent la transparence des chaînes de valeur. Deuxièmement, elles doivent disposer de davantage de solutions de repli au sein de leurs réseaux de fournisseurs. Si l’un d’entre eux fait défaut, elles peuvent ainsi s’adresser à un autre. Le recours à une multiplicité de fournisseurs peut être plus coûteux pour les entreprises, mais cela peut aussi leur faire faire des économies en cas de graves perturbations ou de catastrophe. Autre possibilité : le renforcement des chaînes de transport et de logistique par plus de redondance. Troisièmement, elles peuvent améliorer la résilience des chaînes d’approvisionnement en réduisant leur gamme et en concevant des produits avec des composants communs. Quatrièmement, elles doivent accroître leurs investissements dans la cybersécurité.

Quelques implications macroéconomiques

Quelles mesures peuvent être adoptées au niveau macroéconomique pour améliorer la résilience des chaînes d’approvisionnement mondiales ? Des responsables politiques ont, en particulier, parfois prétendu que la relocalisation et la localisation des CVM permettraient de renforcer la sécurité des chaînes d’approvisionnement. Selon leur raisonnement, la fabrication au niveau local assurerait une meilleure garantie d’approvisionnement et, en cas d’augmentation de la demande mondiale, la puissance publique pourrait imposer des restrictions sur les exportations pour assurer l’approvisionnement du marché national.

Arriola et al. (2020) [23] ont réalisé une analyse coûts-bénéfices de la relocalisation des chaînes de valeur. Pour ce faire, ils ont utilisé une simulation de modèles économiques et deux types d’organisations économiques des chaînes de valeur : « interconnectées » et « localisées ». Il en ressort que les CVM améliorent la prospérité économique et la stabilité macroéconomique (l’étude n’intègre cependant pas les coûts environnementaux). Un pays dont la chaîne de valeur est de type « localisé » (c’est-à-dire moins interconnecté par le biais des CVM) affiche des niveaux d’activité économique nettement inférieurs et des revenus plus faibles. Autrement dit, dans la situation actuelle, une plus grande « localisation » des chaînes de valeur aurait entraîné une amputation plus importante du PIB[24]. Les coûts de la localisation seraient particulièrement élevés pour les pays qui se situent actuellement plus en aval dans les CVM. Plus un pays dépend des intrants étrangers pour sa production, plus la contraction de son PIB est forte.

L’étude précise que les pays les plus exposés aux chocs d’offre sont ceux dont le contenu en valeur ajoutée étrangère des exportations est relativement élevé (participation en amont des CVM), ce qui est davantage le cas des petits pays. Ces économies ont également tendance à être plus exposées aux chocs de demande dans la mesure où elles dépendent fortement des exportations (liens en aval des CVM). Par exemple, les entreprises manufacturières d’Europe centrale et orientale, qui fournissent des intrants à l’industrie automobile européenne, exportent entre 60 % et 80 % du montant total de la valeur ajoutée produite localement.

De plus, les chercheurs de l’OCDE relèvent que, dans la plupart des cas, les chaînes d’approvisionnement localisées sont plus – et non moins – vulnérables aux chocs. Les marchés nationaux doivent en effet assumer l’essentiel des pressions à l’adaptation. Ainsi, les échanges commerciaux contribuent à lisser les chocs d’offre sur les produits de consommation mondiale. Certains pays participant en aval aux CVM pourraient tirer un léger avantage d’un régime « localisé » en termes de stabilité, mais à un coût d’efficience élevé. Même si l’intérêt économique lié à la localisation des chaînes d’approvisionnement est limité, des facteurs non économiques, comme la sécurité, l’autosuffisance et les considérations environnementales peuvent aussi justifier un raccourcissement des chaînes de valeur.

Les économies développées sont de plus en plus dépendantes des connaissances techniques de l’Est et du Sud-Est asiatiques. Cette dépendance pourrait poser problème, surtout si l’expertise technique est développée dans des pays concurrents. La pénurie de semi-conducteurs, secteur dominé par Taiwan et la Corée du Sud, a clairement démontré la vulnérabilité des pays occidentaux dans ce domaine. Face à cette situation, les États-Unis et l’Union européenne ont annoncé leur intention de se doter de leurs propres installations de production. Le sénat américain a récemment approuvé la Loi sur l’innovation et la concurrence, qui prévoit une enveloppe de USD 52 mds pour la fabrication nationale de semi-conducteurs. En Europe, Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, a annoncé la création d’un fonds de EUR 42 mds pour encourager le développement de semi-conducteurs. Pour autant, ces initiatives ne permettront pas de remédier aux pénuries sur le court terme.

La production est moins concentrée dans le secteur pharmaceutique depuis une vingtaine d’années. Elle le reste néanmoins beaucoup pour certains produits spécifiques, en particulier, en Asie. L’European Fine Chemical Group (EFCG), organisation représentant les producteurs de principes actifs pharmaceutiques ou API (Active Principle Ingredient), a déclaré à la Commission européenne que plus de 80 % des principes actifs nécessaires à la fabrication de médicaments en Europe proviennent de Chine et d’Inde. Ce déplacement vers ces deux pays a permis d’abaisser les coûts des systèmes de santé des pays développés, mais en même temps, il a accru leur vulnérabilité en termes d’approvisionnement en médicaments essentiels. L’année dernière, la Commission européenne a lancé un plan sur cinq ans visant à garantir les approvisionnements de médicaments et à réduire la dépendance de l’Europe à l’égard des importations d’API en provenance de pays tiers pour la production d’antibiotiques, de médicaments anticancéreux et de génériques. L’administration Biden a également annoncé des initiatives pour réduire la dépendance du système de santé américain à l’égard de la Chine, visant notamment à accroître la transparence des chaînes d’approvisionnement, et à rapatrier une partie de la production sur le sol national.

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Dans l’ensemble, les CVM présentent des avantages considérables pour l’économie mondiale, mais aussi des inconvénients comme l’accroissement des inégalités de revenus au sein des pays et les dommages environnementaux. De plus, il peut y avoir dans certains cas – et la situation actuelle en est une illustration frappante – une rupture des CVM, avec des effets préjudiciables pour l’économie mondiale.

De fait, en raison de sa durée et de son échelle mondiale, la pandémie de Covid-19 a engendré les plus graves perturbations de la chaîne d’approvisionnement de l’histoire récente. Les appels en faveur de CVM plus robustes et plus résilientes se multiplient. Les mesures dans ce sens vont certainement entraîner de profonds changements du système commercial international, même si l’ampleur de ces transformations reste très incertaine.

Premièrement, les entreprises vont redoubler d’efforts pour rendre leurs chaînes d’approvisionnement plus sûres en améliorant l’information, non seulement sur les fournisseurs de premier rang, mais aussi sur ceux des niveaux inférieurs, de manière à identifier les goulets d’étranglement à tous les stades de la production. Elles vont, par ailleurs, revoir leurs plans de reprise d’activité et créer des redondances au sein des chaînes d’approvisionnement pour disposer de réserves de capacité. Ces changements ont un coût, que l’on peut considérer comme celui d’une assurance contre les perturbations des chaînes d’approvisionnement.

Deuxièmement, la pandémie de Covid-19 a, une fois de plus, mis en évidence que, dans certains secteurs clés comme les équipements informatiques, les semi-conducteurs et les produits pharmaceutiques, l’économie mondiale est devenue très dépendante de l’Est et du Sud-Est asiatiques. Dans ces régions, des clusters industriels ont été créés pour exploiter des économies d’échelle. Cependant, dans le cadre de cette recherche de sites industriels appropriés, les entreprises n’ont pas accordé une attention suffisante à la sécurité de la chaîne d’approvisionnement et à d’autres sujets de préoccupation comme les aspects environnementaux et géostratégiques. Cela s’est traduit par une fragilisation des chaînes d’approvisionnement, du fait de l’absence de fournisseurs de substitution en dehors de ces clusters. De plus, ces derniers sont souvent situés dans des pays aux règles environnementales moins strictes.

En Europe comme en Amérique du Nord, les gouvernements ont annoncé des initiatives visant à relocaliser des industries stratégiques. Ce sera un processus lent, très coûteux et aux résultats incertains. Certaines chaînes d’approvisionnement, en particulier, celles à forte densité de capital, seront difficiles à déplacer en raison de leur imbrication et des énormes investissements que cela représente. Toutefois, ces politiques sont nécessaires pour réduire la dépendance des pays de l’Ouest dans certains secteurs clés.

Dans les années à venir, les CVM pourraient également évoluer en réponse au durcissement des normes environnementales pour limiter les émissions de CO2. Un tel durcissement incitera à raccourcir les chaînes d’approvisionnement. De même, l’introduction du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), proposé par l’UE, dissuadera les industries de déplacer leur production dans des régions aux normes environnementales moins rigoureuses.

Quoi qu’il en soit, nous ne devons pas oublier que les CVM ne sont pas un problème en soi. Au contraire, pendant la crise Covid-19, les CVM ont aussi prouvé qu’elles constituaient une solution. Ainsi, les échanges commerciaux contribuent à lisser les chocs d’offre des produits de consommation mondiale. Les CVM ont également montré qu’elles contribuaient, dans l’ensemble, à améliorer la prospérité économique des pays développés comme des pays en développement, à condition que leur évolution s’accompagne d’une législation et de mesures d’incitation appropriées.

[1] Voir, par exemple, Chip shortage drags on as plant closures hit carmakers, Financial Times, 14 septembre 2021.

[2] Voir, par exemple, Covid casts light on port infrastructure crisis, Financial Times, 11 août 2021.

[3] Building Resilient Supply Chains, Revitalizing American Manufacturing, and Fostering Broad-Based Growth, Communiqué de la Maison Blanche, juin 2021.

[4] Les exportations mondiales ont grimpé de 92 % entre 1990 et 2000, puis de 150 % entre 2000 et 2008 (source : Direction des statistiques commerciales du FMI).https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/europe-fit-digital-age/european-industrial-strategy_en

[5] C’est ce que Richard Baldwin nomme la « deuxième dissociation ». La première a eu lieu autour de la période 1850-1914 puis au tournant des années 1960. Il s’agit de la séparation spatiale entre le lieu de production et le lieu de consommation. Celle-ci a été rendue possible par la réduction des coûts de transport. La deuxième dissociation, également due à la baisse des coûts de transport et à l’amélioration de la communication, est celle de la séparation spatiale des différentes phases de la production. Voir R. Baldwin (2012), Global supply chains: why they emerged, why they matter, and where they are going, documents de travail du CEPR.

[6] Voir, par exemple, Mondialisation has faltered, The Economist, 24 janvier 2019. Voir également Sustaining Global Value Chains, Asian Infrastructure Investment Bank, 2021

[7] Voir Ignatenko, Raei and Mircheva (2019), “Global Value Chains: What are the Benefits and Why Do Countries Participate?”, document de travail du FMI.

[8] Pour les États-Unis, voir, par exemple, D. Autor et al. (2013), The China Syndrome: Local Labor Market Effects of Import Competition in the United States, American Economic Review. Pour l’Europe, voir L. Calmfors et al. (2008), The effect of mondialisation on Western European jobs: curse or blessing?, CESifo.

[9] Voir Goodhart, D. (2017). The road to somewhere: The populist revolt and the future of politics. Oxford University Press.

[10] Voir par exemple Mondialisation has faltered, The Economist, 24 janvier 2019.

[11] Ce principe a été énoncé par Herbert Stein, président du Council of Economic Advisers (de janvier 1972 à août 1974) sous les mandats de Richard Nixon et de Gerald Ford.

[12] Kemal Kilic et Dalia Marin, How COVID-19 is transforming the world economy, CEPR, mai 2020.

[13] Le tableau s’inspire des travaux de Richard Baldwin et Rebecca Freeman, 2020. Supply chain contagion waves: Thinking ahead on manufacturing ‘contagion and reinfection” from the COVID concussion. Voxeu

[14] En raison des difficultés à faire revenir sur site les travailleurs locaux ou étrangers

[15] Huang, Y., Lin, C., Wang, P., & Xu, Z. (2020). Saving China From the Coronavirus and Economic Meltdown: Experiences and Lessons. In Baldwin, R., & di Mauro, B. W. (2020). Mitigating the COVID Crises: Act Fast and Do Whatever It Takes. VoxEU.org, 18 mars.

[16] Taleb, N. N. (2007). The black swan: The impact of the highly improbable. Random House.

[17] Dans les filières dans lesquelles les usines sont restées ouvertes, l’activité a également été affectée en raison de l’introduction de mesures de sécurité pour réduire le risque d’infections, de restrictions sur les voyages ou du manque de personnel pour congé de maladie et/ou pour garde d’enfants.

[18] Voir par exemple “Governments need to fix supply chain crisis, top shipping boss warns”, Financial Times, 25 octobre 2021.

[19] McKinsey Global Institute, Risk, resilience, and rebalancing in global value chains, août 2020.

[20] Pour une étude de l’impact économique du séisme de Tohoku, voir Carvalho et al. (2016), Supply Chain Disruptions: Evidence from the Great East Japan Earthquake, Cambridge Working paper.

[21] Matsuo, H. (2015). Implications of the Tohoku earthquake for Toyota? s coordination mechanism: Supply chain disruption of automotive semiconductors. International Journal of Production Economics, 161, 217-227.

[22] Après ces événements, l’entreprise a revu ses plans de reprise d’activité. Elle vise à présent à ramener les perturbations de la production de trois mois à un mois, en cas de séisme de même magnitude. Premièrement, la résistance antisismique des bâtiments et sites de production sera renforcée. Deuxièmement, elle mettra en place une production en seconde source, en interne ou en externe. Troisièmement, pour faciliter l’approvisionnement en seconde source, elle réduira le nombre de ses références produits SKU (unité de gestion de stock) qui est à présent de 100 000, ce qui est relativement élevé. Les constructeurs intégrés non japonais ont environ 40 000 SKU. Ces mesures permettraient à ses clients de réduire leur stock de semi-conducteurs.

[23] C. Arriola et al. (2020), Efficiency and risks in global value chains in the context of Covid-19, OECD Working Paper.

[24] Plus précisément, les auteurs estiment que le passage des CVM à un système localisé conduit à un repli du PIB réel mondial de « plus de 5 % » par rapport à un système interconnecté.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE