La croissance française a beaucoup perdu en vigueur entre 2017 et 2018, la question étant de savoir si elle a d’ores et déjà dépassé son potentiel.
D’un côté, l’inflation sous-jacente n’a que peu augmenté, suggérant un écart de production toujours négatif.
Mais de l’autre, les enquêtes font toujours état de tensions importantes sur les capacités et les facteurs de production, suggérant à l’inverse une position assez avancée dans le cycle.
Si la question de la fin du cycle n’est pas tranchée, le constat que l’environnement mondial se dégrade et qu’il pèse sur l’activité est largement partagé.
La crainte est que le ralentissement actuel dégénère en récession en 2019 mais cela ne nous semble pas être le scénario le plus probable.
La croissance française devrait renouer en 2019 avec deux caractéristiques qui lui sont souvent associées : peu dynamique mais résistante à la faveur notamment des mesures de soutien au pouvoir d’achat des ménages.
Il y a un an environ, la forte hausse des tensions dans l’économie française, dont témoignaient le net dépassement de sa moyenne de long terme du taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie, l’importance des contraintes d’offre et des difficultés de recrutement (que ce soit dans l’industrie, les services ou la construction), soulevait la question de la position de l’économie dans son cycle[1]. La question était, plus exactement, de savoir à quel point l’écart de production était refermé (et le cycle avancé, et donc proche de la fin) et, en corollaire, à quel point la croissance pouvait s’en trouver freinée. La difficulté de l’exercice était accrue par la discordance des signaux alors disponibles : écart de production déjà positif en 2017, et assez nettement, d’après les indicateurs de tensions susmentionnés ; encore négatif, mais plus très loin d’être refermé, d’après l’estimation traditionnelle par fonction de production de la Commission européenne ; encore assez nettement négatif d’après la faiblesse de l’inflation sous-jacente.
Notre diagnostic, à l’époque, était que l’économie française avait quitté la phase de reprise pour entrer dans celle d’expansion, caractérisée par une croissance moins forte mais toujours supérieure à son rythme potentiel. Le pic de croissance était probablement dépassé mais le pic du cycle ne semblait pas encore atteint et la fin du cycle semblait, a fortiori, plus lointaine encore.
Quelle est la situation aujourd’hui ? Elle n’a pas gagné en clarté (les différents indicateurs continuant d’envoyer des signaux disparates) tandis que le diagnostic est désormais moins positif.
En résumé, la croissance française a beaucoup perdu en vigueur mais elle est restée « sous tension ». Elle ne montre toujours pas de signes évidents de blocage, typiques d’une fin de cycle, mais celle-ci n’en semble pas moins s’être rapprochée. Le curseur de l’inflation n’a, quant à lui, que peu bougé et pointe toujours vers une absence de tensions.