Comme partout, le Japon enregistrera une récession historique en 2020. Le chemin vers un rattrapage complet de l’activité perdue pourrait être plus long qu’ailleurs et la croissance devrait rester très modérée. Selon nos projections, le PIB nippon retrouverait son niveau d’avant-crise seulement à la fin de l’année 2022. La demande interne est amoindrie par la faiblesse de l’investissement des entreprises tandis que les consommateurs semblent de retour. Les exportations japonaises bénéficient pour l’heure du solide rebond économique chinois. La politique budgétaire sera toujours en première ligne en 2021 et continuerait de bénéficier du soutien essentiel de la politique monétaire menée par la Banque du Japon. Une nouvelle enveloppe budgétaire est, à ce titre, en discussion.
Un début de retour à la normale
Face à la 1ère vague de la pandémie, l’état d’urgence avait été décrété au Japon entre début avril et fin mai 2020, sans toutefois qu’un confinement soit légalement imposé. L’activité avait malgré tout sensiblement chuté, le PIB réel ayant enregistré une baisse historique de -8,2% au T2 2020 (en variations trimestrielles, non annualisé). Au T3, le rebond du PIB (+5,0%, v.t.) a été plus fort qu’attendu. La consommation a retrouvé de la vigueur, en lien avec le retour de la confiance des consommateurs, tandis que les exportations ont bénéficié d’un retour de la croissance chez les principaux partenaires commerciaux (Chine en tête).
En revanche, l’investissement des entreprises apparaît toujours fragilisé et devrait rester déprimé compte tenu de la faible utilisation des capacités de production et d’un niveau d’incertitudes encore élevé. Les derniers indicateurs conjoncturels envoient des signaux mitigés. L’indice Tankan de la Banque du Japon (BoJ) s’améliore très légèrement au T3 2020 mais reste à un niveau faible, tandis que l’indice des directeurs d’achats (PMI) composite stagne en novembre, à un niveau inférieur à 50 (seuil qui sépare les phases d’expansion de celles de contraction).
Après le fort rebond du T3, la croissance économique japonaise au 4e trimestre devrait sensiblement baisser. Le PIB progresserait de seulement +0,6% (v.t.) au dernier trimestre de l’année. La hausse des contaminations, observée à la fois au Japon et chez ses partenaires, pèserait sur la demande intérieure, en particulier la consommation des ménages, comme externe. L’activité demeurerait peu dynamique au 1er semestre 2021, dans un contexte incertain sur le plan sanitaire et sur le marché du travail.
À l’horizon du 2nd semestre 2021, l’espoir de la distribution d’un vaccin devrait soutenir la demande globale et réduire les incertitudes. L’appréciation attendue du yen au cours de l’année 2021 (l’USDJPY serait de 98 au T4 2021 contre 101 au T1 2021) serait limitée et n’affecterait pas de manière sensible les exportateurs japonais. Au total, dans notre scénario, le PIB japonais ne retrouverait pas son niveau du T4 2019 à l’horizon de prévision, soit fin 2022. Dans ce contexte, l’inflation restera faible, voire négative, et le soutien budgétaire persistera.
La politique budgétaire en première ligne
Dans ce contexte de reprise lente et encore incomplète, les pressions désinflationnistes devraient persister. L’inflation totale japonaise est entrée en territoire négatif en octobre 2020 (-0,4%, en g.a. après 0% en septembre) et devrait y rester tout au long de l’année 2021. Les salaires resteraient peu allants l’an prochain, les entreprises cherchant dans un premier temps à restaurer leurs marges. La politique budgétaire sera toujours le principal vecteur de soutien public en 2021. La nouvelle hausse de l’enveloppe budgétaire, actuellement en discussion, intègrera des subventions destinées aux acteurs du secteur des services, qui souffrent des restrictions sanitaires, ainsi que des financements dédiés à la transformation digitale.
Dans ce contexte, la Banque du Japon aura pour principal objectif de maintenir des taux d’intérêt à 10 ans autour de 0%. Une extension de son programme de soutien au financement des entreprises pourrait également émerger, mais nous n’anticipons pas de changement majeur de politique monétaire en 2021 malgré la faiblesse de l’inflation.