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Malaisie : un nouveau premier ministre mais l’instabilité politique demeure

08/12/2022

Un nouveau premier ministre vient d’être nommé, mais la situation politique reste instable. Pour autant, depuis plus de trois ans, l’économie malaise reste solide et résiste bien aux chocs. La croissance est robuste. Les finances publiques bien que toujours plus fragiles qu’à la veille de l’épidémie de COVID-19 se sont consolidées.

Transcription

Le 24 novembre dernier, le roi de Malaisie a été contraint, une nouvelle fois, de choisir le nouveau premier ministre après des élections parlementaires qui n’ont permis à aucun parti d’avoir la majorité. Pour autant, la nomination d’Anwar Ibrahim pourrait ne pas apporter la stabilité politique nécessaire au pays pour engager des réformes d’envergure. Pour asseoir son autorité il a d’ores et déjà annoncé un vote de confiance au parlement le 19 décembre.

En dépit d’une forte instabilité politique depuis plus de trois ans, la situation économique du pays est restée relativement solide. L’économie de la Malaisie a bien résisté aux différents chocs successifs et les risques de refinancement de la dette restent contenus.

La croissance économique a atteint 9,4% sur les trois premiers trimestres de l’année en cours. Sur l’ensemble de l’année 2022, la banque centrale de Malaisie prévoit une croissance supérieure à 7%. Exportateur de matières premières, la Malaisie a profité de la hausse des prix des matières premières. Par ailleurs, la demande intérieure est restée solide. Le gouvernement a augmenté très fortement les subventions (+80% sur la première moitié de l’année 2022) pour contenir l’impact de la hausse des prix des matières premières sur les ménages. Le retour progressif des touristes a aussi permis de soutenir le secteur des services. Les perspectives de croissance pour 2023 sont moins favorables. Le durcissement monétaire et le ralentissement économique mondial vont peser sur la croissance malaise qui devrait s’établir entre 4 et 5% selon les dernières prévisions de la banque centrale.

Concernant les finances publiques, dopées par le net rebond de l’activité, elles se sont consolidées au cours de l’année 2022, même si elles restent plus fragiles qu’avant l’épidémie de COVID-19. La forte augmentation des dividendes issus des activités pétrolières a permis de compenser la hausse des subventions. Sur les neuf premiers mois de l’année, le déficit budgétaire a sensiblement diminué par rapport à l’année dernière mais il reste néanmoins à un niveau très supérieur à celui qui prévalait avant la crise (le déficit pourrait être proche de 4,5% du PIB en 2022 vs 3.3% du PIB en moyenne sur 2015-2019). En dépit d’une politique budgétaire expansionniste et de la dépréciation du ringgit qui a généré une revalorisation automatique de la dette libellée en devises, la dette du gouvernement devrait diminuer à 61.5% du PIB (vs 52.4% du PIB fin 2019), un niveau toujours inférieur au seuil de 65% du PIB.

Toute la question est de savoir quelle sera la stratégie budgétaire du nouveau gouvernement. Dans le budget 2023-2025 préparé par l’ancien gouvernement, le déficit devait être légèrement réduit en 2023 mais les dépenses aux ménages restaient encore fortes. L’essentiel de l’effort budgétaire était concentré à partir de 2024. Le nouveau premier ministre a annoncé qu’il escomptait poursuivre son soutien aux ménages mais plutôt que de subventionner l’ensemble de la population, il souhaite cibler les plus pauvres. Reste à savoir s’il choisira ou non de remettre en place la taxe sur les biens et services, supprimée en 2018 et qui pourrait permettre d’accroître les revenus et ainsi augmenter la marge de manœuvre du gouvernement en cas de nouveau choc. La réponse d’ici quelques semaines.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE