Le scénario et les prévisions économiques de la Recherche économique
Le message délivré par Pékin début mars lors du rassemblement annuel de l’Assemblée nationale populaire est clair : quelles que soient les difficultés liées aux rivalités commerciales et technologiques avec les États-Unis, l’économie chinoise devra atteindre une croissance proche de 5% en 2025. La cible est inchangée depuis 2023, et semble particulièrement ambitieuse cette année. En effet, la demande extérieure, moteur de la croissance chinoise en 2024, devrait s’affaiblir considérablement sous l’effet de la montée des mesures protectionnistes à l’encontre de la Chine. Les autorités comptent sur la demande intérieure pour prendre le relais, mais celle-ci se heurte à des freins encore puissants
Les dernières actualités économiques.
Marchés obligataires, indices des actions, et taux de change des matières premières.
Sans surprise, le FOMC a maintenu la cible de taux des Fed Funds à 4,25% - 4,5% lors de la réunion des 18 et 19 mars. Jerome Powell et le Comité commencent à intégrer les risques baissiers sur l’activité et haussiers pour l’inflation. À court terme, la stabilité des dot plots, la relativisation des risques de long terme liés aux tarifs douaniers et le maintien du message de patience visent, en creux, à offrir des gages de stabilité au milieu du tumulte actuel. Selon notre scénario, le FOMC réduirait le taux directeur assez fortement en 2026.
Nos nowcasts pour le T1 2025 témoignent d’une croissance du PIB modérée en zone euro (+0,2% t/t) et en France (+0,1% t/t). Le GDPNow de la Fed d’Atlanta souligne, quant à lui, le risque d’un décrochage marqué de la croissance américaine au T1. En ce qui concerne les autres pays étudiés, l’Espagne devrait continuer de faire la course en tête, la croissance devrait rebondir en Italie et au Royaume-Uni et progresser modérément au Japon. En Allemagne, la croissance resterait faible, les risques haussiers liés à l’entrée en fonction du prochain gouvernement concernant davantage le T2. Les risques sont, au contraire, baissiers en Chine.
Le taux de chômage s’est maintenu à 6,2% en janvier, un plus bas historique. Les baisses sont observées surtout dans l’Europe du Sud et en Irlande, tandis que le taux de chômage est relativement stable en France et en Allemagne. Les salaires négociés ont progressé (+4,1% a/a au T4 2024) mais moins qu’au T3 (5,4% a/a) ; cela dépasse nettement l’inflation.
L’indice IFO du climat des affaires est resté stable en février par rapport à janvier, à 85,2, et demeure proche du plus bas enregistré en novembre 2024 (84,7). C’est l’industrie qui pèse le plus dans cette situation. La production industrielle, qui inclut la construction, s’est de nouveau contractée, de 0,7% (t/t) au T4 (6e baisse en 7 trimestres). Les chiffres de janvier font toutefois état d’un léger rebond (+0,6% en glissement mensuel sur la moyenne mobile 3 mois).
La confiance des ménages a rebondi, passant de 89 en décembre à 93 en février (95 en septembre, 100 en moyenne de long terme). Le solde d’opinion sur l’évolution passée des prix (à -5 en février) atteint son plus bas niveau depuis juillet 2021. En revanche, le solde d’opinion sur la crainte du chômage augmente encore en février (+55, contre +29 en septembre) et alimente l’opportunité d’épargner.
Les intentions d’effectuer des achats importants au cours de l’année à venir sont à leur plus haut depuis juillet 2021. Ainsi, la consommation privée devrait soutenir davantage la croissance italienne. En effet, pour le moment, les données dures déçoivent : les nouvelles immatriculations de véhicules ralentissent (-3,3% 3m/3m en février), tout comme les volumes des ventes au détail (-0,4% 3m/3m en janvier).
Le PMI composite (55,1 en février contre 54 en janvier) est soutenu par la composante « services » (PMI à 56,2 ; +1,3 point). Néanmoins, l’activité industrielle se détériore fortement : la production industrielle baisse de 1% a/a en janvier (-22,8% a/a sur les véhicules) et le PMI manufacturier passe sous les 50 pour la première fois depuis plus d’un an en février (49,7 ; -1,3 point).
La confiance des ménages se détériore en février selon le Conference Board (98,3, -7,0 points) et plus encore en mars selon l’Université du Michigan (57,9, -6,8 points) en raison de la dégradation des anticipations (voir graphique). Selon l’enquête de l’Université du Michigan, le bond des anticipations d’inflation à 1 an (+4,9%, +0,6pp) s’accompagne d’un record sur 32 ans des anticipations à 5 ans (+3,9%, +0,4pp).
L’indice GfK progresse en février (+2 points à -22) sans toutefois effacer la chute de janvier. Le solde d’opinion sur les perspectives financières à un an repasse dans le positif. Les ventes au détail rebondissent de 1,6% m/m en janvier après quatre mois de baisse. Une embellie confirmée par l’enquête BRC/KPMG qui indique une hausse de 2,2% a/a en février des ventes au détail (lissée sur trois mois).
Les ménages japonais sont inquiets des effets de l’inflation. La confiance des ménages recule pour un troisième mois consécutif en février et atteint 35,0 (-1,4 pt en 3 mois), un plus bas depuis mars 2023. Les ménages sont inquiets des conséquences de l’inflation sur leur niveau de vie, ce qui restreint les intentions d’achats de biens durables.
Les PMI manufacturiers sont remontés en février, pour retrouver leur niveau moyen du T4 2024 (50,2 pour l’indice NBS et 50,8 pour l’indice Caixin). Dans les services, les PMI demeurent inférieurs à leur niveau du T4, mais supérieurs au seuil d’expansion (50 pour l’indice NBS et 51,4 pour l’indice Caixin). Les dernières données d’activité confirment cette évolution conjoncturelle rassurante, mais plutôt terne : la croissance de la production industrielle a marqué le pas après l’accélération de décembre, mais se maintient à presque 6% en g.a. Le ralentissement de l’activité dans les services a été plus marqué (+5,6% en g.a. en janvier-février, contre +6,3% au T4).
On dit que le consensus de Davos a toujours tort, mais il faut généralement plus de deux mois pour le vérifier. Pas cette année.
Les rendements des obligations d’État des économies avancées sont fortement corrélés, bien plus qu’avec la croissance du PIB réel. Les gouvernements doivent avoir conscience qu’un manque de discipline budgétaire peut engendrer des externalités négatives, en augmentant les rendements obligataires à l’étranger. Compte tenu des besoins de financement énormes dans les secteur public et le secteur privé, chaque émetteur de dette devrait envisager la possibilité d’être confronté à des taux d’intérêt plus élevés et devrait soumettre son bilan à des tests de résilience.
Nous sommes à près d’une semaine d’un vote qui pourrait changer la face de l’Allemagne. Le 18 mars, le Bundestag décidera de l’adoption de deux projets structurants portant sur la défense et les infrastructures. Un plan budgétaire massif qui pourrait dépasser les EUR 1 000 Mds sur les 10 prochaines années et relancer la croissance allemande, aux abonnés absents depuis près de 3 ans.
L’inflation n’est plus le problème économique n°1 qu’elle a été, au cours de ces trois dernières années, mais elle demeure un enjeu majeur. Alors qu’elle n’est pas encore arrivée à sa cible, que les dernières poches se réduisent lentement, de nouvelles pressions haussières s’annoncent. Elles demeurent légères à ce stade mais elles sont bien réelles et de nouveaux risques inflationnistes, liés au contexte économico-géopolitique actuel, prennent forme. La tâche de la Réserve fédérale se complique face au risque de stagflation de l’économie américaine, et celle de la BCE devient un peu plus délicate du fait d’un rééquilibrage entre risques baissiers et haussiers sur la croissance dans la zone euro.
Les deux derniers chocs subis par les pays émergents – durcissement de la politique monétaire américaine en 2022-2023 et élection de Donald Trump fin 2024 – n’ont pas affecté leurs conditions de financement. Toutefois, les facteurs de soutien se sont fragilisés depuis le deuxième semestre 2024. Les conditions de financement pourraient se durcir dans les mois à venir, en raison notamment de la montée du risque géopolitique. Pour autant, l’impact négatif sur les économies émergentes doit être relativisé compte tenu de la faible transmission des deux chocs externes récents aux taux d’intérêt