Cette fois-ci, il ne s’agit plus d’estimations issues de modèles, mais de données réelles, fournies par les douanes. Disponibles partiellement jusqu’au deuxième trimestre de 2025 en Chine comme en Allemagne, elles indiquent une chute spectaculaire des exportations vers les États-Unis dans le sillage des droits de douane imposés par l’Administration Trump, ainsi qu’une capacité étonnante du commerce international à se redéployer dès lors qu’il se trouve entravé quelque part.
HAUSSE DES TARIFS AMÉRICAINS : PREMIERS CONTRECOUPS Réorientation express du commerce chinois Regardons d’abord la Chine, premier pays visé par l’offensive tarifaire américaine. Dès le mois de février, une surtaxe de 10% lui est appliquée par la Maison Blanche, qui entraîne une chute immédiate de ses ventes aux États-Unis ; le mois de mars a beau s’inscrire en rebond (par anticipation du « Liberation Day » et d’une facture encore plus lourde), le premier trimestre (T1) porte déjà les traces du conflit commercial opposant Pékin à Washington.
La suite est pire. Au deuxième trimestre (T2), les exportations chinoises à destination des États-Unis s’effondrent littéralement, avec une chute de l’ordre de -28% trimestre sur trimestre (t/t) selon nos calculs (cf. partie droite du graphique ainsi que notre Eco-perspectives du mois de juin) [1] . La Chine parvient toutefois à se redéployer pratiquement en temps réel sur la plupart de ses autres grands marchés : au T2 2025, ses ventes à l’Union européenne (UE) ainsi qu’à l’ASEAN[2] rebondissent fortement. Au total, alors qu’elle subit l’un des pires chocs tarifaires de son histoire, Pékin réussit l’exploit d’augmenter légèrement le volume de ses exportations au deuxième trimestre[3] .
L’Allemagne retourne aux sources L’Allemagne, à l’instar de tous les pays de l’UE, a été taxée plus tardivement et moins fortement que la Chine. Elle a donc eu l’opportunité de livrer les États-Unis par anticipation (hausse des exportations au T1) avant de subir à son tour les effets de la politique américaine (rechute des exportations au T2). À la fin du printemps, les ventes de l’Allemagne aux États-Unis seraient près de 10% inférieures à leur niveau de fin 2024 ; elles se sont néanmoins redéployées, largement au bénéfice de l’UE (cf. partie gauche du graphique).
La sensibilité des flux commerciaux aux chocs de prix induits par la politique américaine apparaît finalement forte, proche de l’unité concernant la Chine : la surtaxe effective (tenant compte des exemptions) de près de 25% qui lui est appliquée entraîne de facto une baisse du même ordre de ses ventes aux États-Unis. Avec moins de volumes échangés et toujours de possibles pénuries d’offre sur son marché domestique, Washington aura bien du mal à réaliser ses objectifs en matière de recettes douanières ; le risque inflationniste, s’il ne s’est pas encore matérialisé, reste quant à lui bien présent.