
À qui le tour ? Sitôt investi président des États-Unis et comme il l’avait promis, Donald J. Trump a dégainé l’arme des droits de douane, « le plus beau mot du dictionnaire » selon lui. Le Mexique, le Canada et la Chine ont subi les premières attaques, tandis que l’Union européenne (UE) était explicitement visée. Aux dernières nouvelles, une surtaxe de 25% sur les importations américaines d’aluminium et d’acier devrait bientôt s’appliquer, ce qui, outre les pays déjà mentionnés, pèserait sur l’Allemagne, le Brésil, la Corée du Sud, Taïwan ou encore l’Inde et le Japon[1].
Le sentiment que l’offensive tarifaire de la Maison Blanche n’épargnera personne se renforce à la lecture du graphique ci-dessus. Celui-ci propose une vision toute « trumpienne » des relations commerciales américaines, où le croisement des déficits (à gauche) avec les différents degrés de dépendance aux États-Unis (à droite) aboutit à identifier les pays les plus susceptibles d’être taxés.
La première constatation est que la liste est longue : aux États-Unis et en 2024, les trois-quarts des échanges bilatéraux de marchandises présentent un solde négatif. Autre observation notable : la Chine, bien que concentrant une part toujours importante des déficits américains, n’est pas l’économie d’Asie la plus directement exposée en cas de sanctions. En tête de liste de notre graphique (juste après le Mexique et le Canada) figurent la plupart des membres de l’ASEAN (Vietnam, Cambodge, Malaisie, Thaïlande) qui, en tant que « pays connecteurs » ont tiré parti des tensions sino-américaines et renforcé leurs liens avec les États-Unis (pour un tour d’horizon des sensibilités des économies émergentes à « Trump 2 », voir aussi notre dernier EcoPerspectives[2]).
À l’exception de l’Irlande (où le poids des échanges intra-groupe avec les États-Unis est significatif, notamment dans le secteur pharmaceutique) et, dans une moindre mesure, de l’Allemagne (connectée au marché nord-américain via sa filière automobile), les pays de l’UE apparaissent moins vulnérables que d’autres, car protégés par l’importance du commerce intra-communautaire (62% du total en 2024). Celui-ci s’était d’ailleurs renforcé lors de la dernière offensive tarifaire menée par l’administration « Trump 1 ». Sous « Trump 2 », il est probable que l’intégration du marché unique franchisse une nouvelle étape, par nécessité autant que par choix[3]. Dans l’affrontement commercial tous azimuts que promettent les États-Unis, l’UE n’est pas forcément celle qui a le plus à perdre.