Commerce International
« Liberation Day » approche. Sans attendre le 2 avril, date de l’annonce des « tarifs réciproques », que Donald Trump qualifie de « Liberation Day », le président américain a fait part, le 26 mars, de l’instauration de droits de douane de 25% sur les automobiles fabriquées en dehors des États-Unis à partir du 3 avril. Il a également déclaré que des tarifs sur les importations de produits pharmaceutiques, de cuivre et de bois suivraient. S’agissant des tarifs réciproques, Donald Trump a indiqué que les droits de douane ne s’appliqueraient pas à tous les pays et que les taux pourraient être inférieurs à ce que la simple réciprocité exigerait. L’Union européenne dévoilera le 3 avril des premières mesures de rétorsion.
Économies avancées
États-Unis
Les craintes des ménages se renforcent. La confiance des consommateurs, mesurée par le Conference Board, se détériore en mars pour le quatrième mois consécutif. L’indice total s’élève à 92,9 (-7,2 points), un plus bas depuis janvier 2021. Le signal récessif (résultat inférieur à 80) de la composante « Anticipations » se renforce (indice à 65,2 ;-9,6 pts), un plus bas depuis 2013. Les anticipations d’inflation à 1 an remontent de 0,4pp (à +6,2%). En février, l’inflation sous-jacente PCE, mesure favorite de la Fed, accélère légèrement à +2,8% a/a, alors que le Consensus la voyait stable à +2,7%. Les dépenses (nominales) de consommation (+0,4% m/m) se redressent après leur contraction du mois précédent (-0,3%), mais moins qu’anticipé (+0,5%). Les commandes de biens durables surprennent les attentes en ne ralentissant qu’à +0,9% m/m (EST : -1,1%, janvier : +3,3. Enfin, les profits des entreprises repartent à la hausse au T4 2024 (+5,7% t/t après impôts). Principaux chiffres de la semaine à venir : l’ISM manufacturing (1er avril) et non-manufacturing (3 avril), et surtout l’Employment situation (4 avril). .
Union européenne
La Commission européenne a dévoilé une liste de 47 projets destinés à renforcer l’indépendance stratégique de l’UE sur les matières premières stratégiques. Plus de la moitié des projets (22) seront centrés sur le lithium, mais le nickel, le cobalt, le manganèse et le graphite sont également concernés. L’indice du sentiment économique recule en mars (-1,1 point à 95,2), pénalisé par une baisse de la confiance des ménages et de l’indice dans les services. L'encours des crédits (corrigés des titrisations et autres ajustements) au secteur privé de la zone euro a augmenté, en glissement annuel (g.a.), de 2,5% en février 2025 (contre +0,7% en février 2024). Les crédits aux sociétés non financières (SNF) ont crû un peu plus fortement que ceux aux ménages, de respectivement +2,2% et +1,5% en g.a. Les données préliminaires d’inflation ainsi que les PMI finaux, pour le mois de mars, seront publiées le 3 avril.
- Allemagne
Légère embellie dans les enquêtes de conjoncture. L’indice du climat des affaires IFO atteint en mars son plus haut niveau depuis juillet dernier (+1,4 à 86,7 points). La situation actuelle (85,7 points contre 85 en février) et les attentes (87,7 points contre 85,6 en février) s’améliorent, avec une embellie dans l’industrie (-16,6) et les services (-1,1), tandis que le BTP demeure pénalisé (-24,6) par le manque de commandes. La confiance des consommateurs reste stable en avril (-24,5 points contre -24,6 points en mars 2025 selon l’indice GfK).
- France
L’embellie se fait attendre. La confiance des ménages a diminué de 93 (février) à 92 (mars) en raison d’une détérioration des perspectives d’évolution du niveau de vie, et malgré des anticipations de prix relativement stables et une légère décrue des craintes sur le chômage (+46 en mars contre +54 en février, +33 en moyenne historique). La consommation des ménages de biens a de nouveau reculé en février (-0,1% m/m après -0,6% en janvier), tirée vers le bas par les dépenses alimentaires. Contrairement à la production industrielle, en recul en janvier (-0,6% m/m, cinquième mois consécutif de baisse), la production dans les services progresse (+0,3% m/m). L’inflation harmonisée est restée stable en mars selon l’estimation flash, à 0,9% a/a. Le déficit public a augmenté à 5,8% en 2024 selon la première estimation de l’Insee (contre 5,4% en 2023). Ce solde est inférieur aux attentes (6% du PIB), en raison d’une augmentation des dépenses des collectivités locales plus faible qu’attendu (+4,5% au lieu de +5,7%). La dette publique atteint 113% du PIB en 2024 (contre 109,8% en 2023) et retrouve son niveau de 2021 (le gain lié à l’épisode inflationniste est effacé).
- Espagne
L’inflation harmonisée baisse plus qu’attendu en mars (+2,2% a/a contre +2,9% en février) en raison de la modération des prix de l’électricité. En revanche, l’indice des prix à la production accélère encore (+6,6% a/a en février contre +2,6% en janvier). L’indice comme le glissement annuel retrouvent leur plus haut niveau depuis 2023. L’indice du sentiment économique (ESI) s’améliore en mars (103,4 ; +1,1 point) grâce à une moindre détérioration de la confiance dans l’industrie (-5.6 ; +0,7 point). Le déficit public s’est réduit nettement à 2,8% du PIB en 2024 (après -3,5% en 2023). Les recettes fiscales ont atteint un nouveau record historique, portées par l’augmentation des bénéfices des sociétés, la vigueur du marché du travail, la hausse de la consommation des ménages et celle des prix.
- Italie
L’indice du sentiment économique (ESI) chute en mars (97,6 ; -2 points) et retrouve son plus bas niveau depuis seize mois du fait d’une forte dégradation de la confiance dans le secteur des services (-2,6 points sur un mois, plus bas niveau depuis octobre 2022). La confiance des consommateurs se dégrade fortement (-2,9 points), principalement en raison de la détérioration des anticipations économiques pour 2025 (-6,7 points).
Japon
Contraction de l’activité en mars. L’enquête Jibun Bank PMI de mars place les deux indices en zone de contraction. Le PMI manufacturier perd 0,7pp à 48,3, l’amélioration de l’emploi ne compensant pas la détérioration de la production et des nouvelles commandes. L’activité dans les services chute de 53,7 à 49,5. Le PMI composite interrompt ainsi quatre mois de progression et affiche un résultat inférieur à 50 (48,5 – plus bas depuis 2022) pour la première fois depuis octobre 2024. Enfin, le Summary of Opinions de la dernière réunion de politique monétaire fait état de craintes sur l’activité domestique liées aux mesures douanières américaines.
Royaume-Uni
Données en demi-teinte en toile de fond à la Déclaration de printemps de la chancelière de l’Échiquier, Rachel Reeves: GBP 14 mds d’économies seront réalisées pour équilibrer les dépenses publiques courantes d’ici 2030. Néanmoins, GBP 2,2 mds supplémentaires seront alloués à la défense. L’Office for Budget Responsability (OBR), un organe public indépendant, a divisé par deux sa prévision de croissance pour 2025 (1,0% désormais) mais réhaussé celle pour 2027-2029. Les ventes au détail progressent de 0,9% m/m en février et atteignent un plus haut depuis janvier 2022. La morosité du commerce de détail persiste néanmoins : les soldes d’opinion sur les ventes et commandes se sont détériorés à nouveau en mars, selon l’enquête du CBI. L’indice PMI flash manufacturier atteint en mars son plus bas niveau en 18 mois, à 44,6, en raison du plongeon des nouvelles commandes à l’exportation (39,1). L’indice dans les services s’améliore en revanche, à 53,2, tirant le composite vers le haut à 52 (50,5 en février). La seconde estimation du PIB pour le T4 2024 confirme la légère progression de 0,1% t/t. La moyenne annuelle pour 2024 a néanmoins été relevée à 1,1% (0,9% auparavant) en raison de révision à la hausse pour le T4 2023-T2 2024. L’inflation a légèrement diminué en février, passant de 3% à 2,8% a/a, grâce à un ralentissement des prix de l’énergie et des biens industriels. L’inflation dans les services reste stable et élevée à 5,0%. Le déficit du compte courant s’est réduit à 2,7% du PIB en 2024 contre 3,5% en 2023.
Économies émergentes
Chine
Pékin a poursuivi son opération séduction auprès des investisseurs privés lors du Forum pour le développement de la Chine à Pékin et du Forum de Boao pour l’Asie. Les chiffres de la balance des paiements pour 2024 confirment la nécessité d’attirer de nouveaux investissements étrangers : les entrées d’investissements directs étrangers chutent fortement depuis deux ans, pour atteindre USD 19 mds en 2024 (contre USD 242 mds par an en moyenne en 2018-2022). De plus, les sorties nettes totales de capitaux se sont établies à USD 486 mds, son niveau le plus élevé de ces huit dernières années. Ces sorties nettes sont supérieures à l’excèdent de la balance courante (USD 424 mds en 2024, soit 2,3% du PIB).
Les indices PMI publiés par le NBS se sont légèrement améliorés en mars. Les indices du secteur manufacturier, des services et de la construction ont augmenté légèrement (respectivement de 50,2 à 50,5, de 50,4 à 50,8 et de 52,7 à 53,4). Cette amélioration surprend étant donné les fortes incertitudes qui pèsent sur les perspectives d’exportation (la sous-composante « nouvelles commandes à l’exportation » est en hausse mais reste inférieure à 50). Elle est notamment tirée par le renforcement des « nouvelles commandes totales » et des perspectives d’activité dans la construction.
Israël
Budget 2025 approuvé. Il prévoit une hausse des dépenses de plus de 15% et un déficit budgétaire de 4,9% du PIB. Le non-respect de l’échéance du 31 mars aurait impliqué la dissolution du Parlement et de nouvelles élections.
Mexique
Baisse du taux directeur, récession en vue. Comme attendu, la Banque centrale mexicaine a abaissé son principal taux directeur de 50 pb à 9% le 27 mars dernier. Il s’agit de la deuxième baisse consécutive et le communiqué laisse entendre que d’autres baisses sont envisagées dans les prochains mois. La Banque centrale souhaite accompagner le processus désinflationniste (l'inflation a atteint 3,8% en g.a. en février, contre un pic à 5,6% en juillet). La décision s'inscrit dans un contexte de fort ralentissement de l'activité. La croissance a été nulle au T4 et aurait été négative sans la bonne performance des exportations, due à une anticipation des tarifs douaniers promis par l'administration américaine. Les perspectives sont dégradées : la détérioration du climat des affaires et des perspectives d'investissement, observée depuis 2018, s'accélère au rythme des aléas politiques auxquels est confronté le pays. La consommation des ménages donne des signes de faiblesse (baisse de la confiance, ralentissement du crédit et de la croissance de l'emploi formel). Quelle que soit l'issue des négociations avec le gouvernement américain, l’économie mexicaine ralentira franchement au cours des prochains trimestres.
Turquie
La livre turque et les rendements obligataires se sont stabilisés ce week-end avec i/ les mesures prises par la Banque centrale (relèvement de son taux prêteur et restrictions temporaires des volumes de financements offerts) et ii/ les déclarations rassurantes du ministre des Finances et du gouverneur de la Banque centrale. Cependant, les rendements obligataires et les spreads CDS restent respectivement 540 et 60 points de base au-dessus de leur niveau d’avant l’arrestation d’Ekrem Imamoglu, leader du principal parti d’opposition.
Afrique centrale
Détente monétaire. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a procédé à une première baisse des taux directeurs après deux ans de statu quo monétaire. Le taux d’intérêt des appels d’offre (TIAO) a été réduit de 5% à 4,5% et le taux de facilité de prêt marginal a été baissé de 6,75% à 6%. La BEAC prévoit que l’inflation dans la zone CEMAC (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, RCA, Tchad) devrait retomber sous la cible des 3% en 2025. La croissance économique régionale devrait accélérer légèrement pour atteindre 2,9%, contre 2,6% en 2024, portée par le dynamisme du secteur non pétrolier.
Sénégal
Pas de sauvetage financier du FMI dans l’immédiat. La mission du FMI, qui s’est conclue cette semaine, a confirmé les résultats de l’audit des finances publiques sénégalaises par la Cour des comptes. Celui-ci fait état d’une « dette cachée » et révèle que, sur la période 2019-2023, les déficits budgétaires ont atteint 11,1% du PIB en moyenne, contre 5,5% selon les chiffres de l’administration précédente. La dette publique a été revue à la hausse de 25 pp pour atteindre 100% du PIB fin 2023. La visite du FMI n’a pas abouti à un nouveau programme de financement, pour l’heure. L’organisation internationale attend plus de mesures concrètes pour assainir les finances publiques. Or, dans le projet de loi de finances 2025, le gouvernement sénégalais comptait sur des décaissements du FMI à hauteur de USD 488 mn pour l’année en cours pour couvrir ses besoins de financement extérieur.
Matières premières
Une semaine avant la hausse de la production décidée par les membres de l’OPEP+, de nouvelles sanctions américaines et la baisse des stocks américains soutiennent les prix du pétrole. Les États-Unis vont appliquer des sanctions « secondaires » à l’encontre des pays importateurs de pétrole en provenance du Venezuela. Ils se verront imposer des droits de douane supplémentaires de 25% sur toutes les exportations à destination des États-Unis ; la Chine est le premier importateur de pétrole vénézuélien. Par ailleurs, les stocks commerciaux de pétrole étatsuniens (hors réserves stratégiques) ont baissé plus fortement qu’anticipé en raison du dynamisme de la demande intérieure.
Le prix de la tonne de cuivre est en léger repli à New York (COMEX), après avoir atteint un plus haut depuis neuf mois (+27% depuis le début de l’année). La possible accélération du calendrier d’application de nouveaux droits de douane sur les importations de cuivre par les États-Unis a précipité les achats américains. Ce mouvement a provoqué un écart de plus de 10% entre les cotations de Londres (LME) et du COMEX.