Après une période de stagnation économique en 2023, la croissance néerlandaise a retrouvé de l’élan en 2024 grâce à l’amélioration de la confiance des consommateurs et à l’assouplissement des conditions financières induite par les baisses de taux de la BCE. Dans le même temps, le marché du travail néerlandais reste tendu, avec de nombreux emplois vacants. Cela devrait entraîner une hausse plus importante des salaires réels, et ainsi soutenir la consommation privée. Alors que les investissements des entreprises ont baissé depuis le début de 2023, ils devraient reprendre progressivement, compte tenu de la poursuite du desserrement monétaire attendu en Europe l’année prochaine. La croissance des investissements publics devrait également rester assez favorable, ce qui entraînera une détérioration du déficit public. Cette dernière n’est cependant pas préoccupante compte tenu de la situation confortable dans laquelle le pays se trouve par rapport à ses principaux voisins. Le principal risque baissier en 2025 est lié à l’impact d’une croissance mondiale plus faible en raison de la hausse des tarifs américains et de la faiblesse de la demande européenne.
La croissance devrait s'améliorer grâce au soutien de la consommation des ménages et des investissements
L'économie néerlandaise a été l'une des moins performantes en termes de croissance en 2023 et début 2024. Depuis, la situation s’est améliorée, et la croissance du PIB réel est devenue, à partir du deuxième trimestre, supérieure à la moyenne de la zone euro, malgré un certain essoufflement au troisième trimestre induit par la faiblesse persistante de l'investissement des entreprises et le ralentissement de la dépense publique.
La consommation privée, déjà assez forte en 2023, a continué de soutenir la croissance et devrait bénéficier des gains supplémentaires de salaires réels, induits par un marché du travail toujours tendu. Le taux de chômage reste très faible et de nombreux emplois sont toujours vacants. Les indicateurs de confiance des entreprises montrent un modeste redressement par rapport aux faibles niveaux atteints fin 2023, mais la production industrielle reste faible. Les dépenses d’investissement ont diminué durant trois trimestres consécutifs en 2023, la construction ayant été particulièrement affectée par le resserrement des conditions financières et les pénuries de main-d’œuvre. La croissance des investissements devrait rebondir légèrement en 2024 à la faveur de l’amélioration des conditions financières et portée par l’augmentation des investissements publics. Les secteurs de la technologie, des sciences de la vie, de l’énergie durable et de la logistique continuent de jouer un rôle majeur dans l’économie néerlandaise. Les Pays-Bas sont également un acteur clé du commerce international, les ports, comme celui de Rotterdam, restant des centres logistiques mondiaux. Les efforts de stimulation de l’innovation dans le secteur technologique et dans les investissements verts (énergies renouvelables, transition énergétique) devraient soutenir une part importante de la croissance à long terme. Sur l’ensemble de l’année, le PIB devrait croître de +0,8 % (prévisions d’automne de la Commission européenne).?
En 2025, la situation toujours tendue sur le marché du travail devrait permettre de nouvelles hausses de salaires, ce qui, dans un contexte de ralentissement de l’inflation, devrait pousser à la hausse la consommation privée. Les ménages néerlandais devraient également bénéficier de réductions d'impôts votées par le gouvernement.
Les salaires contractuels devraient augmenter de 6,4 % en 2024 et les négociations actuelles laissent entrevoir une croissance légèrement plus lente en 2025, estimée à 4,2 %. Avec l'augmentation des prestations sociales, le pouvoir d'achat devrait augmenter de 2,5 % en 2024 et de 0,7 % en 2025, selon les estimations du Bureau néerlandais d'analyse de la politique économique. Une réduction d’impôt pour les ménages à très faibles revenus a été incluse dans l’estimation.
La perte de pouvoir d’achat causée par le choc de l’inflation de 2022-2023 devrait être réparée en 2025. Cela explique pourquoi la confiance des consommateurs s’est bien tenue et continue de s’améliorer. Les prix de l’immobilier, qui avaient été durement touchés en 2023 lorsque les taux d’intérêt ont augmenté, se sont très rapidement redressés depuis en raison d’une pénurie massive de logements, en particulier dans les grandes villes. En septembre 2024, la hausse sur un an des prix de l’immobilier résidentiel a dépassé 11 %, ce qui a probablement renforcé la confiance des consommateurs.
La combinaison de tous ces facteurs devrait entraîner une croissance du PIB plus forte l’année prochaine.
Selon les dernières prévisions de la Commission européenne, elle serait proche de 1,6 %, soit le double de la croissance de 2024. Le principal risque baissier associé à ce scénario est lié à l’affaiblissement de la demande mondiale et de celle de l'UE qui résulterait de la potentielle hausse des droits de douane américains.
L’inflation est en hausse mais devrait ralentir
L'inflation a augmenté presque chaque mois depuis début 2024, atteignant 3,3 % en glissement annuel en octobre. Cette remontée peut s'expliquer par la persistance de l’inflation dans les services et au niveau des produits alimentaires transformés, elle-même affectée par une augmentation des droits d'accise sur le tabac. Les loyers ont été ajustés à la hausse pour s’aligner sur l’inflation plus élevée et ont donc à leur tour contribué à la remontée de l’inflation un taux d’inflation plus élevé. L'inflation des services, qui s'avère plus persistante que prévu, devrait atteindre son plus haut niveau durant des trois derniers mois de 2024 avant de ralentir quelque peu par la suite. Selon la Commission européenne, l’inflation harmonisée devrait atteindre 2,4 % en 2025 et 1,9 % en 2026 en moyenne annuelle des chiffres nettement inférieurs à celui de 2024, qui devrait être proche de 3,2 %. ?
Un déficit budgétaire plus important mais toujours faible
En 2024, le déficit budgétaire devrait se situer à un niveau nettement inférieur à celui précédemment anticipé, essentiellement du fait que les recettes publiques (impôts sur le revenu et le patrimoine) ont été plus élevées que prévu au cours du premier semestre de l'année. La Commission européenne s’attend à ce que le déficit soit très faible, à -0,2 % du PIB d’ici fin 2024.
En 2025, les finances publiques néerlandaises devraient se détériorer quelque peu en raison de plusieurs facteurs, notamment l'augmentation des dépenses sociales et des investissements publics, ainsi que les conséquences d'un arrêt de la Cour qui exige que le gouvernement restitue aux contribuables les impôts indûment payés sur le rendement des actifs. Le gouvernement a également annoncé une baisse du taux de taxation sur les tranches de revenus inférieurs, ce qui implique que le déficit devrait s’élargir à 1,9 % d’ici fin 2025 et à 2,4 % d’ici fin 2026. Les décisions relatives à l’augmentation de la TVA sur certains produits et services (carburants, activités culturelles) devraient atténuer un peu la dégradation attendue du déficit budgétaire, mais ne suffiront pas à compenser l’augmentation des dépenses.
Lorsque l’on examine les finances publiques néerlandaises, il faut garder à l’esprit que le ratio de dette publique est beaucoup plus faible que dans n’importe quel autre pays européen. Celui-ci devrait certes augmenter légèrement en 2025 et 2026, mais il ne dépasserait pas 45 % du PIB, ce qui constitue bien entendu une grande différence par rapport aux autres pays de la zone euro où la situation détériorée des finances publiques est source d’inquiétude. Les Pays-Bas se trouvent dans une situation totalement différente.
Encadré : Impact des droits de douane américains sur l’économie néerlandaise
Seulement 5 % des exportations néerlandaises sont à destination des États-Unis, ce qui en fait le cinquième marché à l’exportation du pays. Le marché américain est donc moins important que ceux des quatre principaux partenaires commerciaux du pays, à savoir l'Allemagne, la Belgique, la France et le Royaume-Uni. Toutefois, les Pays-Bas étant le principal pôle commercial de toute l’Europe, les effets des droits de douane américains sur l’économie néerlandaise pourraient être sensiblement négatifs. Le résultat dépend également de l'élasticité-prix de la demande aux États-Unis et de la capacité de l'économie américaine à fabriquer des produits de substitution.
Les principaux produits exportés des Pays-Bas vers les États-Unis sont le matériel de bureau, les boissons, les produits chimiques et les matériaux de transport. Les Pays-Bas importent des États-Unis du pétrole brut et du gaz, ainsi que des instruments médicaux et des vaccins. Depuis le début de la guerre en Ukraine, les exportations américaines de pétrole et de gaz vers l’Europe ont augmenté, dont une grande partie passe par le port de Rotterdam. Ainsi, les exportations américaines vers les Pays-Bas ont fortement augmenté ces derniers temps.
Les Pays-Bas occupent un positionnement particulier pour l’économie américaine, car les États-Unis exportent beaucoup plus vers les Pays-Bas que ceux-ci n’importent des États-Unis. Ainsi, ils sont le partenaire commercial avec lequel les États-Unis ont le plus grand excédent commercial. En 2023, la balance commerciale bilatérale entre les États-Unis et les Pays-Bas a atteint un excédent de USD 44 milliards en faveur des États-Unis, tandis que les données similaires avec la France et l'Allemagne font état de déficits bilatéraux de, respectivement, USD 14 milliards et USD 83 milliards.
Achevé de rédiger le 9 décembre 2024