Après huit ans de gouvernement socialiste, la coalition de centre droit Alliance démocratique a remporté les élections législatives anticipées du 10 mars dernier. Ce revirement politique, dans un contexte d’absence de majorité absolue au Parlement, pourrait être source d’instabilité dans le pays. Néanmoins, l’assainissement profond des finances publiques réalisé durant le mandat d’António Costa, ainsi que la solidité des fondamentaux macroéconomiques, permettent au futur gouvernement de disposer d’une importante marge de manœuvre économique et budgétaire. La croissance portugaise devrait rester largement supérieure à celle de la zone euro en 2024 (1,2% selon la Commission européenne, contre 0,7% pour la zone euro).
La Grèce, le Portugal et, dans une moindre mesure, l’Espagne, ont affiché une baisse notable de leurs déficits publics en 2022. Selon les résultats préliminaires d’Eurostat publiés le 21 avril, le déficit primaire s’est, en effet, réduit de près de moitié en Espagne (-2,4% du PIB), il a été résorbé en Grèce, tandis que le Portugal affiche à nouveau un excédent (1,6% du PIB). En Grèce et au Portugal, le déficit public est repassé sous la limite des 3% de PIB fixée par le pacte de croissance et de stabilité, sur laquelle ils s’étaient déjà réalignés entre 2016 et 2019. Bien qu’en nette baisse, le déficit en Espagne reste conséquent, à 4,8% du PIB
Avec un risque de pénuries énergétiques relativement contenu, le Portugal enregistrerait cette année une croissance économique parmi les plus importantes de la zone euro. Plusieurs facteurs favorables sont à l’œuvre. L’acquis de croissance par rapport à 2021 est important, et le PIB réel a connu une forte hausse au T1 (+2,4% t/t) avant de se stabiliser au T2. Le rebond du tourisme a, par ailleurs, soutenu l’activité cet été. Malgré les mesures d’aides aux ménages et aux entreprises, estimées par le gouvernement à EUR 4 mds jusqu’ici en 2022, le solde budgétaire primaire devrait enregistrer un léger excédent cette année
La large victoire du parti socialiste d’Antonio Costa aux élections législatives de février permet une stabilité politique bienvenue dans le contexte économique actuel. Si le Portugal ne subit pas un choc inflationniste aussi important que la plupart des autres pays européens, et alors que l’État a introduit des mesures de soutien, les enquêtes d’opinion ont toutefois décroché en mars. Il reste à voir jusqu’où cette détérioration altèrera la dynamique des embauches qui reste, pour l’heure, bien orientée. Le taux de chômage, au cours de l’hiver, était proche des niveaux enregistrés au début des années 2000.
Les moratoires, légaux et contractuels, accordés depuis le début de la pandémie de Covid-19 au secteur privé non financier[1] portugais sont arrivés, dans une très large mesure, à expiration. L’encours des prêts soumis à des moratoires s’établissait à EUR 3,1 mds en octobre 2021 contre EUR 3,6 mds en mars 2020, et EUR 46,3 mds à leur pic en septembre 2020. Les moratoires ne concernent désormais plus que 1,5% de l’encours des prêts aux ménages et aux sociétés non financières contre 1,9% en mars 2020 et 23,5% en septembre 2020. L’arrivée à échéance des moratoires depuis le mois de septembre 2021 ne s’est pas, pour l’heure, traduite par une augmentation significative des prêts non performants[2]
La campagne de vaccination semble porter ses fruits : le Portugal est le pays d’Europe où l’on vaccine le plus – et l’un des plus avancés au monde – avec près de 85% de la population ayant, fin septembre, reçu un schéma vaccinal complet. Le nombre de contaminations à la Covid-19 s’est très sensiblement réduit, après une remontée des cas en juin-juillet due à la propagation du variant Delta. Bien que la reprise d’activité ait été, jusqu’au T2 2021, plus lente que dans la plupart des autres pays européens – en partie dû à une vague épidémique hivernale plus sévère – l’emploi mais également l’activité immobilière sont solidement repartis. Comme dans plusieurs pays en Europe, le recul de l’épidémie laisse place à de nouveaux risques
Le Portugal a été l’un des pays européens les plus durement touchés par la troisième vague de Covid-19 survenue cet hiver. Le gouvernement a réinstauré un confinement « dur », ce qui a permis de réduire drastiquement la propagation du virus. Un plan progressif de déconfinement a débuté le 15 mars et s’achevera le 3 mai prochain. L’espoir d’une reprise économique solide repose sur la campagne de vaccination qui se déroule pour l’heure, et comme partout dans l’Union européenne, à un rythme peu soutenu. Le succès de la vaccination en Grande-Bretagne offre néanmoins des perspectives de reprise intéressantes pour le secteur touristique portugais, très dépendant des visiteurs d’outre-Manche. Le PIB en volume pourrait rebondir à hauteur de 5,0%-5,5% en 2021, après une contraction de 7,6% en 2020
La bonne gestion de l’épidémie n’a pas permis au Portugal d’éviter un choc économique sévère. Le PIB réel a chuté de 13,9% au T2, principalement sous l’effet d’un plongeon des exportations de biens et services (-36,1% t/t) et de la consommation privée (-14,0% t/t). Le Portugal a pâti de la chute du tourisme et de l’arrêt de l’activité à l’étranger, en particulier en Espagne. Cela pourrait également freiner la reprise, étant donné la recrudescence des contaminations de l’autre côté de la frontière. Cependant, et grâce à des efforts budgétaires consentis ces dernières années, le déficit public pour 2020 devrait être inférieur à celui de ses voisins européens (environ 7,0% du PIB selon les estimations gouvernementales), ce qui offre quelques marges de manœuvre à l’exécutif.
En 2019, après un ralentissement somme toute limité, la croissance du PIB portugais s’était finalement établie dans la fourchette haute des attentes, à 2,2%. L’épidémie de coronavirus va faire disparaître ces performances enviables, mettre toute une partie de l’économie à l’arrêt et plonger le pays dans une récession majeure au cours des prochaines semaines. Dans la ligne de ses homologues européens, le gouvernement Costa met progressivement en place une série de mesures qui visent à préserver le tissu économique le temps du choc et préserver les capacités de reprise.
En période de baisse des taux, la marge d’intérêt sur les opérations avec la clientèle s’élargit car le rendement des actifs bancaires présente une plus grande inertie à la baisse que le coût des ressources. Les banques portugaises détiennent toutefois une forte proportion de prêts à taux variable qui tend à accélérer l’ajustement à la baisse du rendement du portefeuille de prêts. Dans un contexte de taux durablement bas et de coût des ressources clientèle désormais proche de zéro, la pérennité de la marge d’intérêt dépendra essentiellement de la capacité des banques portugaises à maintenir les taux pratiqués actuellement sur les nouveaux prêts [1]
Pour la première fois depuis 2010, les cinq plus grandes banques portugaises ont renoué avec les bénéfices en 2018. Une baisse des charges d’intérêts plus rapide que celle des produits d’intérêts, ainsi qu’une stricte maîtrise des frais généraux et du coût du risque sont les principaux facteurs à l’origine de ce retour à la rentabilité. L’élargissement de la marge nette d’intérêt a compensé la baisse de l’encours des prêts bancaires, augmentant les revenus nets d’intérêts. Toutes choses égales par ailleurs, la baisse des taux a aussi contribué à la réduction du coût du risque et à l’assainissement des bilans bancaires. L’encours et le ratio des prêts non performants des grandes banques portugaises ont ainsi été réduits de moitié mais demeurent à des niveaux élevés
Le Portugal est une petite économie de la zone euro tributaire de ses exportations. Les échanges commerciaux avec les autres pays de la zone euro sont ruciaux pour sonéconomie : ils concentrent plus de 70% des exportations du pays (en particulier l’Espagne, la France et l’Allemagne). Malgré une bonne gestion de l’épidémie au plan national, l’économie portugaise a été lourdement frappée par la crise Covid-19, en raison de l’effondrement du tourisme et de l’activité économique de ses partenaires commerciaux, en particulier l’Espagne.
Auparavant, lors de la crise de la dette de la zone euro, l’économie portugaise avait fait l’objet d’un plan européen de financement et d’ajustement. Les réformes douloureuses engagées, ajoutées à l’assainissement budgétaire, ont porté leurs fruits puisque le Portugal est sorti de la procédure de déficit excessif à l’été 2017. Cependant, les faiblesses structurelles et les problèmes hérités de la crise financière n’ont pas disparu (faible croissance potentielle, niveau élevé de la dette publique et des entreprises et un stock d’actifs non performants, toujours important, quoiqu’en baisse). Le désendettement public et privé doit être poursuivi. La faiblesse de la croissance potentielle, principalement due à celle de la productivité, reste un obstacle majeur. Face à ces problèmes, le défi majeur du pays dans les prochaines années consistera à accroître les investissements en capital physique et humain.