La remontée des taux d’intérêt observée dans les économies avancées depuis la sortie du Covid se poursuit en ordre dispersé. Les taux longs sont généralement orientés à la hausse, mais avec des divergences notables. La situation générale d’incertitude et les trajectoires indiscutablement haussières des dettes publiques dans les pays avancés ont des répercussions négatives sur les marchés obligataires, susceptibles d’impacter de la même manière le financement de l’économie.
ÉVOLUTION DES TAUX À 2 ANS, 10 ANS, 30 ANS (%) Les taux à 2 ans sont de bons indicateurs de la politique monétaire actuelle et future. Ils ont nettement reflué en zone euro, où la désinflation est la plus avancée. Les mouvements plus erratiques aux États-Unis soulignent les conséquences des incertitudes sur l’ outlook macroéconomique et donc sur la trajectoire de taux de la Fed .
En termes de taux longs, la zone euro s’en sort mieux que les États-Unis et le Royaume-Uni. Le taux à 10 ans est important car c’est le taux de référence, et car il est souvent proche de la maturité moyenne de la dette publique. En revanche, le taux à 30 ans reflète les anticipations des investisseurs quant à la soutenabilité de la dette. Le taux à 10 ans est globalement stable depuis un an en zone euro, tandis que celui à 30 ans remonte modérément (le spread entre les deux revient à son niveau pré-Covid). A contrario , les deux remontent aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les U.S. Treasuries souffrent des inquiétudes quant à la trajectoire budgétaire des États-Unis, ce qu’illustrent certaines adjudications ratées. Le mouvement est encore plus marqué au Royaume-Uni, dans le contexte d’une consolidation budgétaire difficile . En revanche, l’appartenance à la zone euro semble protéger d’une remontée plus franche des taux longs les pays membres dont la dette augmente, tels que la France. Ceci témoigne d’une confiance sauvegardée des marchés dans la zone euro et donc d’un bénéfice à en faire partie.
Le Japon se distingue négativement. Les taux remontent sur toutes les maturités, d’autant plus que la maturité s’allonge. La politique monétaire joue un rôle sur toutes les parties de la courbe, avec le resserrement graduel de la politique monétaire, tandis que la BoJ réduit progressivement son rythme d’achats de titres, projetant une division par 2 entre les T1 2024 et 2027 (à JPY 2.1 trn par mois). En parallèle, la situation économique de type stagflationniste et l’absence de perspective de consolidation budgétaire n’aident pas. En conséquence, l’écart entre le 10 ans et le 30 ans atteint un plus haut historique, signe d’une inquiétude bien ancrée vis-à-vis de la dette japonaise .
La Chine offre une perspective totalement différente, malgré un niveau de dette élevé (proche de 90% du PIB) et qui continue de croître. Les dynamiques qui sous-tendent son marché obligataire (moindre présence des non-résidents en particulier) et son environnement économique sont très spécifiques : la Chine se distingue par une inflation très basse et un biais en direction de l’assouplissement monétaire, deux phénomènes appelés à durer à un horizon court-moyen terme, d’où une diminution observée sur l’ensemble des maturités et un écart modéré entre taux courts et longs.
Avec la participation de Leslie Huynh, stagiaire