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ActuEco - 22 avril 2025

22/04/2025
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MONDE / COMMERCE INTERNATIONAL

L’OMC baisse drastiquement ses prévisions du commerce mondial. Les échanges de biens sont attendus en baisse de 0,2% cette année, soit 2,9 points de pourcentage en dessous des estimations précédentes. Les exportations nord-américaines plongeraient de 12,6% en 2025 (-0,4% en 2026), tandis que les exportations asiatiques ralentiraient à 1,6 %, avant un rebond en 2026. Les révisions pour l’Europe sont moins marquées, à hauteur de -0,3 pp pour 2025 (+1,9% désormais) et +0,2 pp pour 2026 (+2,5%). Ces projections font l’hypothèse que les tarifs universels “réciproques” imposés par les États-Unis restent à 10%.

ÉCONOMIES AVANCÉES

États-Unis

Les attaques du Président Trump sur Jerome Powell s’intensifient. Jerome Powell, président de la Fed, a réaffirmé, dans un discours à l’Economic Club de Chicago le 16 avril, son message de « patience » en attendant « davantage de clarté», tout en indiquant que le choc tarifaire devrait accroître tant l’inflation que le chômage. J. Powell a également repoussé l’éventualité de baisses de taux face à la volatilité des marchés. Il a aussi rappelé l’importance de « maintenir les anticipations d’inflation de long terme bien ancrées ». Enfin, il a réaffirmé l’indépendance garantie par la loi de la Fed. Ces propos ont suscité de multiples interventions de la Maison Blanche signalant le souhait du Président de mettre fin au mandat de Powell.

Les données dures du mois de mars sont contrastées. Les ventes au détail ont augmenté de +1,4% m/m (+1,2pp) en mars, grâce au rebond massif des ventes automobiles (+5,3% m/m) et de la fréquentation des bars et restaurants (+1,8% m/m). Mais le groupe de contrôle (excluant notamment l’automobile) déçoit, en ralentissant à +0,4% m/m (contre +1,2% en février et +0,6% attendus). La production manufacturière a aussi progressé sur le mois (+0,3% m/m) grâce aux secteurs de l’automobile et de l’aéronautique, mais moins vigoureusement qu’en février (-0,7pp). Et la forte baisse des utilities (-5,8% m/m) entraîne dans son sillage la production industrielle (-0,3% m/m). Les mises en chantier continuent de faire le yo-yo et ont accusé un fort recul en mars (-11,4% m/m). Le risque de dégradation du contexte économique et d’augmentation des risques de crédit est perceptible dans les calculs de dotations aux provisions annoncés par les très grandes banques américaines lors de l’annonce de leurs résultats du premier trimestre 2025.

Zone euro

Baisse des taux de 25 pb face aux incertitudes « exceptionnelles ». Comme attendu, la BCE a baissé ses taux directeurs de 25 pb, portant le taux de dépôt à 2,25%. La décision s’est faite à l’unanimité et la notion de « restrictivité » de la politique monétaire a disparu du communiqué, la Présidente Lagarde jugeant inopérant l’écart par rapport au taux neutre dans le climat économique actuel, marqué par de multiples chocs. L’estimation finale de l’inflation confirme la baisse de 2,3% à 2,2% a/a en mars, entraînée principalement par le recul en Allemagne et en Espagne. La production industrielle a progressé de 1,1% m/m en février, après une hausse de 0,6% en janvier. Selon l’enquête de la BCE sur la distribution du crédit (BLS) au T1, les banques ont assoupli leurs critères d’octroi des prêts à l’habitat, pour lesquels elles ont constaté une hausse sensible de la demande. À l’inverse, elles ont légèrement resserré les critères d’octroi et les conditions appliquées aux prêts à la consommation et aux entreprises. Pour le T2 2025, les banques envisagent de répercuter la dégradation de la qualité des prêts sur les conditions de crédit aux entreprises et à la consommation, et prévoient un très léger resserrement des conditions des prêts à l’habitat. Au même horizon, elles anticipent une reprise timide de la demande de prêts de la part des entreprises et un renforcement de la demande de prêts à l’habitat. L’enquête de la BCE sur l’accès au crédit des entreprises (SAFE) constate en outre une baisse des taux des prêts bancaires.

Allemagne

Un accord de coalition a été officiellement trouvé. Après deux mois de négociations, le CDU/CSU et le SPD sont parvenus à un accord de coalition. Érigé sous la bannière « Responsabilité pour l’Allemagne », ce programme entérine la réforme du frein à l’endettement, prévoit des allégements fiscaux pour les ménages et les entreprises, une réduction des taxes sur l’électricité, ainsi que des subventions pour soutenir l’achat de voitures électriques et les investissements dans cette filière. L’indice ZEW du sentiment économique des investisseurs a enregistré en avril sa troisième plus forte baisse sur un mois depuis 1992.

France

Le premier comité d’alerte sur les finances publiques s’est tenu mardi 15 avril, il permet de lancer les discussions sur le budget 2026 et les suivants. Le détail des mesures de consolidation devrait être communiqué d’ici le 14 juillet. Les économies budgétaires nécessaires ont été chiffrées par Bercy à EUR 110 mds d’ici 2029 pour tenir l’objectif d’un déficit ramené à 3% du PIB à cette date. À suivre cette semaine : enquêtes de l’Insee sur la confiance des consommateurs (24/04) et climat des affaires (25/04).

Italie

S&P a relevé la note de l’Italie de BBB à BBB+ le 11 avril, les perspectives sont stables. Cette amélioration est justifiée par «l’amélioration des fondamentaux économiques, extérieurs et monétaires de l’Italie, dans un contexte de vents contraires mondiaux croissants, et les progrès qu’elle a réalisé dans la stabilisation de ses finances publiques depuis la pandémie».

Royaume-Uni

Face à la guerre commerciale, le gouvernement renforce ses mesures de soutien. La Chancelière Rachel Reeves a annoncé la suspension pendant 2 ans des droits de douane sur 89 produits de consommation courante. Une hausse de GBP 20 Mds des prêts garantis par l’État a également été annoncée pour soutenir les entreprises exportatrices. L’inflation est ressortie plus basse que prévu en mars, à 2,6% a/a. Un ralentissement dans les services (4,7% contre 5% a/a en février) et un recul plus marqué des prix de l’énergie (passant de -6,8% à -8,0% a/a) contribuent principalement à cette baisse. Le taux de chômage est resté stable à 4,4% en février (3m/3m), mais le nombre de postes vacants est au plus bas depuis le niveau pré-Covid. Le nombre de salariés enregistre en mars sa plus forte chute post-Covid (-78 000), selon l’estimation préliminaire de HMRC. La hausse des salaires (bonus inclus) reste soutenue à 5,6% a/a.

Japon

L’inflation remonte en mars, toutes mesures confondues : inflation totale (+0,3% m/m, +0,7pp), sous-jacente, i.e. hors nourriture transformée (+0,4% m/m, +0,5pp) et new-core, i.e. hors énergie et nourriture non-transformée (+0,4% m/m, +0,2pp). Les glissements annuels remontent à +3,2% (+0,2pp) pour l’inflation sous-jacente et à un plus haut depuis mars 2024 de +2,9% pour la new-core.

ÉCONOMIES ÉMERGENTES

Chine

Rebond de l’activité économique en mars. La croissance du PIB réel s’est établie à +1,2% en rythme trimestriel au T1 2025, en léger recul par rapport au T4 2024, mais elle est restée stable à +5,4% en glissement annuel. Cette performance est meilleure qu’attendu, et s’explique par le rebond de l’activité sur le dernier mois du trimestre. En mars, la croissance de l’activité dans les services a accéléré à +6,3% en g.a. (contre +5,6% sur les deux premiers mois de 2025). Les ventes au détail ont affiché leur plus forte progression depuis fin 2023 (+5,9% en g.a. en valeur), les ménages ayant continué de bénéficier des programmes de subventions publiques à l’achat de biens de consommation. La croissance de la production industrielle a atteint +7,7% en g.a. en mars (contre +5,9% en janvier-février), tirée par le renforcement des ventes au détail et le regain de dynamisme des exportations avant le choc tarifaire américain. Ce choc va provoquer un fort ralentissement de l’activité du secteur manufacturier dès le mois d’avril, et inciter les autorités à introduire de nouvelles mesures de relance monétaire et budgétaire dans les prochaines semaines.

Pas de sortie de crise pour le secteur immobilier. Les transactions immobilières ont continué de chuter en mars (-2% en g.a.), de même que l’activité des chantiers. La baisse des prix des logements s’est poursuivie, à un rythme toutefois moins soutenu (-7,3% en g.a. en mars, contre -8,1% en décembre 2024). L’investissement immobilier a continué de se contracter fortement (-10% en g.a. en valeur). Les mesures de soutien au secteur immobilier mises en œuvre par les autorités n’ont pour le moment pas obtenu les résultats escomptés. L’assouplissement budgétaire a, en revanche, conduit au renforcement de l’investissement dans les infrastructures publiques (+5,8% en g.a. en valeur au T1 2025 contre +4,4% en 2024).

Égypte

Début d’assouplissement monétaire. La Banque Centrale d’Égypte a amorcé le desserrement de ses conditions monétaires en réduisant ses principaux taux d’intérêt de 225 pb, établissant le taux prêteur à 26%. La trajectoire baissière de l’inflation (+13,6% en g.a. en mars dernier contre +33,4% un an plus tôt), notamment dans ses composantes les plus volatiles, ainsi qu’une reprise équilibrée de la croissance économique, ont permis le déclenchement de ce cycle de baisse des taux après une hausse cumulée de 1900 pb depuis mars 2022. L’assouplissement monétaire devrait se poursuivre, mais sur un rythme prudent, en raison de possibles pressions inflationnistes liées à la réduction des subventions à l’énergie, de l’incertitude pesant sur le commerce mondial, et de la vulnérabilité du pays (en réduction mais persistante) aux flux de capitaux volatiles.

Türkiye

Remontée surprise des taux d’intérêt. La Banque centrale a relevé son taux directeur de 350 pb à 46%, après l’avoir abaissé de 750 pb entre décembre 2024 et mars 2025 suite à une réduction de l’inflation (de 75,5% a/a en mai 2024 à 38,1% a/a en février 2025). Toutefois, la pression baissière sur la livre turque (-4% contre l’USD depuis la mi-mars) et la nette baisse des réserves de change (de 97 mds USD mi-mars à 68 mds USD le 11 avril) ont engendré ce revirement.

MATIÈRES PREMIÈRES

Révision en baisse des prévisions de croissance de la demande de pétrole. L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) revoit significativement ses prévisions de croissance de la demande de pétrole pour 2025 à 730 kb/j (-300 kb/j), et établit celles de 2026 à 690 kb/j. En 2024, la demande mondiale s’était établie à 102,9 mb/j, en hausse de 830 kb/j par rapport à 2023. De son côté, l’OPEP ne révise que marginalement ses projections de croissance de la demande pour 2025 à 1300 kb/j (-100 kb/j) et pour 2026 à 1300 kb/j (-100 kb/j).

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

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