Le pilotage fin des banques centrales

26/09/2024

En septembre, la Réserve Fédérale américaine a enfin emboîté le pas à la BCE et la Banque d'Angleterre et baissé ses taux directeurs pour la première fois depuis mars 2020. Mais elle a marqué sa différence en optant pour une baisse significative de 50 points de base au lieu de seulement 25. Sur ce point-là, au moins, le suspense est levé.

Transcription

En septembre, la Réserve Fédérale américaine a enfin emboîté le pas à la BCE et la Banque d'Angleterre et baissé ses taux directeurs pour la première fois depuis mars 2020. Mais elle a marqué sa différence en optant pour une baisse significative de 50 points de base au lieu de seulement 25. Sur ce point-là, au moins, le suspense est levé. Mais la suite de l'histoire reste à écrire. On en connaît globalement les grandes lignes (les taux d'intérêt devraient continuer de baisser) mais on ne connaît pas tous les détails avec certitude et en particulier le nombre total, la date et l'ampleur des prochaines baisses de taux.

Comme l'explique Jerome Powell pour la Fed, mais en fait cela vaut aussi pour la BCE et la BoE, ces détails dépendront des données disponibles, de l'évolution des perspectives et de la balance des risques. D'après ce que dit Jerome Powell, on a l'impression que ces trois déterminants des décisions de politique monétaire sont mis sur le même niveau. Mais en pratique, les priorités peuvent être différentes. En effet, la Fed et la BCE ont beaucoup communiqué récemment sur le fait qu'elles étaient « data-dependent », peut-être trop, la question se pose, tandis que la BoE semble se baser plus sur ses prévisions et peut-être pas assez sur les données existantes.

Pourtant, les longs délais de transmission de la politique monétaire justifient que les banques centrales soient « forward-looking » et donc qu'elles s'appuient sur leurs prévisions, qu'elles soient proactives, dans la prévention plutôt que dans la réaction aux données qui, elles, sont plutôt « backward-looking ». Dans le jargon des observateurs, les banques centrales devraient être « ahead of the curve » plutôt que « behind the curve ». Et évidemment, il va sans dire que c'est plus facile à dire qu'à faire.

Aussi, lorsque les banques centrales se disent « data-dependent », elles ne le sont pas d'une seule donnée à un moment donné, alors que c'est vrai que les marchés financiers tentent à réagir ainsi et à se focaliser sur un seul chiffre. Les banques centrales regardent bien un ensemble de données et le tableau global que ces données dessinent de la situation actuelle, des perspectives économiques et de la balance des risques associés.

Aujourd'hui, ce tableau global décrit une situation vraiment moins préoccupante du côté de l'inflation aux États-Unis et en Europe. Du côté de la croissance, les signaux sont plus mitigés. En effet, la croissance de la zone euro manque toujours d'élan. Et le marché du travail américain montre des signes francs de refroidissement. Ce à quoi la banque centrale américaine s'est clairement montrée sensible, en optant pour une baisse significative de ses taux d'intérêt en septembre à caractère préventif et avec pour objectif de ne pas être « behind the curve ». Mais en même temps, comme la partie contre l'inflation n'est pas non plus encore totalement gagnée, et que la situation et les perspectives économiques restent, pour l'heure, globalement positives, tout cela nécessite de notre point de vue un pilotage, un réglage très fin de la politique monétaire et plaide pour des baisses de taux plutôt graduelles.

Merci de votre attention et à très bientôt pour un nouveau numéro d'EcoTV.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE