Le bras de fer entre les États-Unis et l’Union européenne est lancé. L’administration Trump a relevé, le 12 mars dernier, de 25 % les droits de douane sur les importations américaines d’aluminium et d’acier. En réaction, l’UE a annoncé qu’elle rétablira, mi-avril, les droits de douane introduits lors du premier mandat de Donald Trump, suspendus depuis 2020. Des mesures de rétorsion plus sévères seront imposées à cette même date. Nul doute qu’elles seront adaptées aux tarifs réciproques que souhaitent imposer les États-Unis à leurs partenaires commerciaux, et dont les contours sont censés être dévoilés le 2 avril. Des sanctions ciblées, industrie par industrie ou même produit par produit, ne sont pas à exclure.
Le graphique présenté ici permet de voir quelles industries en Europe semblent les plus exposées. La part du déficit commercial bilatéral des États-Unis avec l’UE attribuable à chaque produit y est représentée sous forme de bâtonnets verts. Les marqueurs orange représentent les écarts de tarifs douaniers imposés par les deux partenaires commerciaux l’un envers l’autre, un chiffre positif indiquant un niveau supérieur en Europe. Ces droits de douane sont pondérés, c’est-à-dire qu’ils tiennent compte de la structure des échanges entre les deux blocs.
Les secteurs ciblés par l’administration américaine semblent tout trouvés sur ce graphique : l’automobile et l’industrie pharmaceutique, qui représentent à elles seules un peu moins de la moitié du déficit bilatéral américain en 2024. Pour ce second secteur, les États-Unis constituent le débouché d’exportation le plus important, avec près de 17 % des exportations allant outre-Atlantique en 2024. La dépendance au marché américain rend ce secteur particulièrement vulnérable aux décisions de Washington.
Pourtant, ce secteur n’impose pas de droits de douane plus élevés que son partenaire américain ; le différentiel est même légèrement négatif. Certains secteurs européens, comme l’automobile, les spiritueux et la chimie imposent des tarifs douaniers plus élevés que leurs concurrents américains, mais globalement, l’écart tarifaire entre les deux partenaires est minime. De plus, la TVA européenne, considérée comme une mesure non tarifaire par l’administration Trump, s’applique uniformément à tous les partenaires commerciaux de l’UE et aux entreprises basées en Europe. Par conséquent, l’argument selon lequel le déficit commercial américain vis-à-vis de l’UE résulterait de politiques commerciales déloyales ne tient pas.
Par ailleurs, taxer plus fortement les importations européennes aurait des répercussions directes pour les entreprises américaines, notamment parce que les multinationales américaines sont très présentes sur le sol européen – c’est le cas, par exemple, des entreprises du secteur pharmaceutique, très implantées en Irlande.
Ces deux économies sont profondément imbriquées, et ce bras de fer commercial risque de coûter cher aux deux parties, même si l’UE semble avoir les moyens d’amortir le choc, notamment grâce à la taille et aux marges d’approfondissement de son marché intérieur.