Essor des échanges commerciaux de l'ASEAN avec la Chine : des opportunités et des risques

25/07/2024

Le secteur exportateur chinois a bien résisté à la montée des tensions commerciales et des rivalités technologiques avec les États-Unis depuis 2018. L'industrie chinoise a montré une solide capacité d'adaptation en réponse à la montée des barrières douanières. Elle conserve sa place de leader dans le commerce mondial.

Transcription

Le secteur exportateur chinois a bien résisté à la montée des tensions commerciales et des rivalités technologiques avec les États-Unis depuis 2018. L'industrie chinoise a montré une solide capacité d'adaptation en réponse à la montée des barrières douanières. Elle conserve sa place de leader dans le commerce mondial.

Les derniers chiffres de commerce extérieur attestent de la solide performance des exportations au premier semestre 2024. Les exportations sont tirées notamment, mais pas seulement, par les exportations de biens de technologies de pointe et de technologies vertes. Les entreprises chinoises sont soutenues par la politique industrielle très ambitieuse des autorités. Elles ont gagné des parts de marché dans un grand nombre de secteurs grâce à la baisse de leurs prix de vente, et les volumes d'exportations de marchandises de la Chine ont atteint des niveaux records.

Depuis 2018, l'expansion du secteur exportateur s'est aussi appuyée sur la diversification des partenaires commerciaux de la Chine. La part des exportations chinoises à destination des États-Unis s'est réduite, mais la Chine exporte beaucoup plus vers les pays émergents.

Dans le même temps, la structure des flux commerciaux a évolué et tout ceci est en lien avec la réorganisation des chaînes de production mondiales.

Les entreprises chinoises et les multinationales présentes en Chine ont réorienté une partie de leurs flux d'exportation des États-Unis vers d'autres marchés et surtout, elles ont réorganisé leurs chaînes de production. Elles ont délocalisé une partie de leurs usines pour produire dans des pays aux coûts de production plus bas et pour contourner les droits de douane américains. Ce mouvement s'est intensifié depuis deux ans car les entreprises ont accéléré la mise en œuvre de leurs stratégies de de-risking pour sécuriser leurs approvisionnements et les chaînes de production.

Les pays de l'ASEAN, en Asie du Sud-Est, ont largement bénéficié de cette dynamique. D'abord, les flux d'IDE vers les pays de l'ASEAN ont augmenté plus rapidement au cours des dernières années que les flux d'IDE vers les autres pays émergents. Et en 2023, les flux d’IDE vers l'ASEAN ont continué d'augmenter alors que ces flux se sont réduits dans le reste du monde.

En conséquence, l'activité dans les économies de l'ASEAN a été stimulée par l'expansion des capacités de production industrielle et des bases d'exportations de biens manufacturés. Dans ce contexte, le Vietnam a été un des principaux bénéficiaires de toutes ces évolutions.

Avec la réorganisation des chaînes de production, l'intégration commerciale des pays de l'ASEAN avec la Chine s'est renforcée. Les pays de l'ASEAN exportent davantage vers la Chine et surtout, elles importent davantage de biens en provenance de Chine.

Les producteurs chinois ont accru leurs exportations de biens intermédiaires vers des pays tiers afin d'assembler et de finaliser les produits qui sont ensuite exportés vers les marchés occidentaux. Donc, la part du « processing trade » en Chine s'est réduite et dans le même temps, les économies de l'ASEAN ont renforcé leur rôle de plateforme de production et d'exportation tout en montant en gamme. Et de fait, les pays de l'ASEAN ont gagné une bonne partie des parts du marché nord-américain que la Chine a perdues depuis 2018.

La réorganisation des chaînes de production mondiales n'explique pas tout. La hausse des exportations chinoises vers le reste de l'Asie s'explique aussi par le fait que la Chine cherche de nouveaux débouchés pour sa production industrielle.

Dans ce contexte, la menace protectionniste augmente et se diffuse en Asie. D'abord, les pays de l'ASEAN pourraient être tentés de protéger leur industrie locale face au déferlement de produits chinois. Mais leurs leviers pour augmenter les droits de douane sont certainement limités par leur dépendance aux investissements chinois et l'intégration commerciale dans la région. Ensuite, les États-Unis pourraient commencer à étendre leurs droits de douane et à surtaxer des importations en provenance de pays tiers en Asie, dans lesquels la Chine finalise ses produits.

Merci de votre attention et rendez-vous à la rentrée pour un nouveau numéro d’EcoTV.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE