Graphiques de la semaine

Fin de l’USAID et guerre commerciale : un double choc pour les pays en développement

07/05/2025
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Depuis janvier 2025, les États-Unis annoncent des revirements majeurs dans leur politique étrangère et commerciale. Pour les pays en développement qui dépendent de l’aide internationale, l’interruption de l’USAID[1] et la hausse des tarifs douaniers sur les importations états-uniennes constituent un double choc qui fragilise durablement leurs perspectives économiques.

PAYS EN DÉVELOPPEMENT : EXPORTATIONS VERS LES ÉTATS-UNIS
ET FLUX REÇUS DE L’AGENCE USAID

Les pays en développement d’Amérique centrale sont particulièrement vulnérables, davantage que la moyenne des pays d’Amérique Latine[2]

En effet, leurs exportations vers les États-Unis pèsent lourd dans leur PIB (cf. graphique), notamment pour l’acier, l’aluminium et les pièces automobiles (droits de douane de 25%). Ces pays pourraient toutefois proposer de durcir leurs politiques migratoires et de mieux lutter contre le narcotrafic afin d’obtenir des tarifs douaniers plus avantageux.

L’Afrique subsaharienne est doublement exposée

La région est le premier récipiendaire des flux d’USAID, en dollars courants et en proportion au PIB : en 2024, ils s’élevaient à 0,7% du PIB en moyenne. L’interruption de l’USAID détériore considérablement les perspectives sanitaires, sécuritaires et économiques de la région.

L’Afrique subsaharienne est également vulnérable au ralentissement du commerce mondial

À première vue, l’impact direct d’un tarif douanier états-unien uniforme de 10% peut sembler limité. Seuls 5% des exportations de la région sont à destination des États-Unis, et il s’agit en grande partie de matières premières exemptées de droits de douane. Cependant, la fin de la loi AGOA[3] fait perdre à 32 pays africains un accès préférentiel au marché états-unien pour de nombreux biens. Parmi ces pays, le Lesotho est, de loin, le plus vulnérable compte tenu du poids élevé des exportations, notamment de produits textiles, vers les États-Unis. Dans une moindre mesure, le Kenya et Madagascar se trouvent dans une situation similaire. Par ailleurs, les pays exportateurs de matières premières (excepté l’or) devraient faire face au ralentissement de la demande mondiale et à la baisse des cours. À ce titre, l’Angola, le Nigéria et la zone CEMAC sont particulièrement vulnérables.

Les marges de manœuvre de l’Afrique subsaharienne sont fortement limitées

La région n’a pas la capacité d’accroître ses importations depuis les États-Unis dans l’optique de réduire un excédent commercial de toute façon très maigre (USD 11,3 mds en 2024, soit 0,04% du PIB états-unien). Les marges de manœuvre budgétaires pour accroître les dépenses, en vue de se substituer à l’USAID, sont faibles voire inexistantes. Enfin, la capacité des banques centrales à assouplir leur politique monétaire est également limitée : les pressions inflationnistes restent importantes (l’inflation régionale a accéléré à 18,3% en 2024) et les dettes publiques sont exposées au risque de change.

[1] Agence états-unienne pour le développement international.

[2] Voir le Graphique de la semaine : Amérique latine : quelle vulnérabilité au-delà des droits de douane ?

[3] Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE
Equipe : Économies Émergentes