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Le pouvoir d’achat des ménages a-t-il retrouvé son niveau d’avant la poussée d’inflation ?

08/01/2025
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Alors que dans la plupart des principales économies avancées la progression en glissement annuel des salaires nominaux est repassée, depuis quelques mois maintenant, au-dessus de l’inflation, nous pouvons nous demander où se situe le pouvoir d’achat des ménages par rapport à son niveau pré-crise inflationniste. Ce pouvoir d’achat peut être appréhendé de deux manières : au sens large et de manière plus exacte, lorsqu’il est calculé à partir du revenu disponible brut (RDB) réel des ménages ; et dans un sens plus étroit, mais de manière peut-être plus parlante pour les ménages, lorsqu’il est évalué à partir des salaires réels[1].

Le pouvoir d’achat des ménages a-t ’il retrouvé
son niveau d’avant la poussée d’inflation ?

Depuis le T4 2020 (date de référence retenue car marquant le creux de l’inflation avant les premiers signes de son envolée début 2021), des gains de pouvoir d’achat du RDB, d’amplitude variable, ont été enregistrés dans tous les pays analysés, à l’exception du Japon. En revanche, la hausse cumulée des salaires nominaux demeure inférieure à celle de l’indice des prix à la consommation (IPC) dans tous les pays. À noter que la différence d’évolution cumulée entre le déflateur de la consommation et l’IPC n’est, en fait, pas très importante, et est toujours de même signe (sauf au Japon).

La différence d’évolution cumulée entre le RDB nominal et les salaires nominaux est instructive : malgré les gains non négligeables de pouvoir d’achat du RDB qui en découlent, les pertes en termes de salaires réels retiennent plus l’attention et participent probablement du ressenti négatif des ménages, européens en tout cas. Elles contribuent également à l’atonie de leur consommation, et donc, à leur taux d’épargne anormalement élevé en comparaison à 2019, à l’inverse de la situation américaine. Beaucoup dépend aussi des composantes du RDB qui ont soutenu sa progression. En France par exemple, en 2023 et 2024, elle a notamment été alimentée par les revenus financiers, qui sont épargnés plutôt que consommés. Elle a aussi été nourrie par la dynamique des prestations sociales qui ont été revalorisées en fonction de l’inflation, mais cette hausse n’a pas été consommée comme nous aurions pu nous y attendre. Aux États-Unis, c’est la nature plus directe des mesures d’urgence de soutien au revenu pendant la crise Covid qui a pu jouer plus favorablement.

Qu’est ce que cela augure pour la consommation ?

La poursuite du ralentissement de l’inflation attendue en zone euro tout au long de l’année 2025, combinée à une évolution toujours relativement dynamique des salaires nominaux (bien que moindre qu’en 2024), devrait permettre à l’évolution cumulée des salaires réels d’être moins négative, voire de basculer en territoire positif. Toutefois, les effets positifs de ces gains de pouvoir d’achat sur la consommation des ménages ne sont pas certains dans tous les pays, dans la mesure où la hausse probable des taux de chômage et les futures évolutions budgétaires pourraient agir comme des contre-poids, notamment en France. La situation s’annonce différente au Japon et aux États-Unis, où l’heure est à l’anticipation d’une hausse progressive de l’inflation au cours de 2025. Cette dernière viendrait comprimer les gains de salaires nominaux, probablement plus nettement outre-Atlantique, où leur dynamique est plus à la modération qu’au Japon, où ils sont plutôt encore en voie d’accélération.


[1] Les indicateurs de salaires réels retenus pour chaque pays sont les suivants : France (indice mensuel de salaires et traitements, Ministère du travail), Allemagne (indice mensuel de taux de rémunération du secteur de la production, Bundesbank), Espagne (accords mensuels de conventions collectives salaires et traitements, Ministère du travail), Italie (indice mensuel de salaires et traitements horaires, Istat), zone euro (Indicateur mensuel des salaires négociés, Eurostat), Royaume-Uni (Salaire de base hebdomadaire, ONS) États-Unis (gains horaires moyens mensuels, BLS), Japon (indice mensuel des salaires, e-Stat).

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE