Sous l’effet de la politique tarifaire de l’administration Trump et de l’accélération du découplage sino-américain, la croissance économique mondiale devrait décélérer, le commerce international se reconfigurer et la réorganisation des chaines de valeur se poursuivre. Les effets de ces bouleversements sur les pays émergents seront multiples. Leurs exportations devraient ralentir et la concurrence des produits chinois s’accroître. Certains d’entre eux pourraient néanmoins saisir de nouvelles opportunités pour attirer des IDE et développer leur base de production manufacturière.
La très forte hausse des droits de douane appliqués par les États-Unis aux biens importés de Chine constitue un choc négatif important pour les exportations et la croissance chinoises. Cependant, Pékin s’y est préparé et l’impact du choc sera partiellement compensé par les effets de sa stratégie de réponse. À court terme, cette stratégie consiste à rediriger les exportations vers d’autres marchés, poursuivre l’assouplissement monétaire et budgétaire et renforcer la consommation privée. Le redéploiement des exportations a commencé mais pourrait rapidement se heurter à de nouvelles barrières protectionnistes. En interne, le défi sera de redonner confiance aux ménages alors que le marché de l’emploi souffrira du ralentissement du secteur manufacturier.
La croissance de l’Inde ralentit. La consommation des ménages est molle, pénalisée par une faible progression des salaires réels et une hausse de la charge de la dette, et les investissements privés sont faibles. Au vu de son faible degré d’ouverture, l’Inde sera peu affectée par la hausse des tarifs douaniers américains, mais ne devrait pas être épargnée. Ses marges pour négocier avec l’administration Trump sont limitées. Toutefois, son marché intérieur est vaste et permet une diversification de la production en Asie. Pour tirer profit de la guerre commerciale sino-américaine, l’Inde devra rapidement palier les contraintes structurelles qui pèsent sur le développement de son industrie
La croissance économique de la Thaïlande est restée solide au T1 2025 mais les risques baissiers sont élevés. La Thaïlande est l’un des pays d’Asie à avoir le plus bénéficié des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine mais les effets du nouveau durcissement de la politique commerciale américaine pourraient être plus douloureux. Ses produits pourraient être davantage taxés que ceux de ses concurrents sur le marché américain alors que l’afflux de biens chinois pourrait augmenter sensiblement. Toutefois, elle pourrait aussi bénéficier de nouveaux investissements d’entreprises étrangères souhaitant poursuivre la diversification de leurs chaînes de production. Elle présente de nombreux atouts par rapport à certains pays voisins.
Le durcissement tarifaire américain place le Brésil face à de nombreux défis : choc sur la croissance et les matières premières, défense de ses parts de marché à l’export et pression concurrentielle accrue dans certains secteurs. Mais cette nouvelle donne lui offre aussi des leviers de repositionnement lui permettant de tirer parti de la reconfiguration des flux commerciaux et des chaînes de valeurs mondiales. Cette nouvelle géographie pourrait aussi agir comme un catalyseur pour accélérer son intégration commerciale (Mercosur, UE, Canada, Mexique). À court terme, les défis les plus pressants seront toutefois domestiques. Malgré le maintien d’une politique monétaire très restrictive, les signes de modération de l’économie brésilienne tardent à venir
Les perspectives continuent de se dégrader au Mexique, un des pays les plus exposés à la politique économique américaine. L’économie mexicaine devrait se contracter dans les trimestres à venir, la faiblesse de la demande intérieure ne permettant pas de compenser le ralentissement marqué des exportations. Le ministre de l’Économie mexicain a entamé des discussions avec Washington en vue d’une renégociation plus rapide que prévu du traité de libre-échange USMCA. Elles doivent permettre de réduire l’incertitude à court terme concernant les relations bilatérales entre les deux pays.
La croissance du PIB résiste plutôt bien au Chili, portée par le secteur minier et une demande intérieure solide. Les perspectives sont relativement favorables : l’inflation est contenue, la consolidation budgétaire devrait se poursuivre et le risque politique, à l’approche de l’élection présidentielle en fin d’année, reste modéré. Enfin, en dehors des annonces concernant le secteur du cuivre, les conséquences directes sur l’économie chilienne de la hausse des tarifs douaniers imposés par l’administration Trump sont relativement faibles. Les effets indirects, la volatilité des prix des matières premières et les incertitudes sur le rythme des avancées de la transition bas-carbone mondiale représentent, en revanche, un risque très important pour l’économie chilienne.
Après avoir réaccéléré à l’automne 2024 et l’hiver 2025, l’économie turque devrait plier. En cause : des tensions financières depuis la mi-mars, l’impact de la hausse des droits de douane étatsuniens sur les exportations et une politique budgétaire plus restrictive. Mais elle ne va pas rompre. Notre scénario reste celui d’une poursuite de la désinflation à petits pas qui autoriserait la reprise du cycle d’assouplissement monétaire. La solvabilité de l’État devrait continuer de se renforcer mais la vulnérabilité extérieure, due à la volatilité des investissements de portefeuille, augmenterait. Pour autant, avec des déficits jumeaux modérés, une dette publique historiquement basse et un secteur bancaire solide, la stabilité financière n’est pas en jeu.
Le recul inattendu du PIB hongrois au T1 2025 sera probablement suivi d’une croissance modeste au cours des prochains trimestres, avec la consommation comme principal pilier. Toutefois, la Hongrie n’échappera pas aux répercussions du choc tarifaire américain car il s’agit d’une économie très ouverte. Une concurrence plus intense en provenance de Chine, notamment sur des produits de milieu et haut de gamme, est attendue. La Chine n’en demeure pas moins un investisseur important pour le pays, notamment dans le secteur automobile.
Nos perspectives de croissance ont été revues à la baisse en raison du choc tarifaire initié par les États-Unis, et de la spécialisation industrielle du pays. La Slovaquie est le pays d’Europe centrale le plus exposé aux mesures douanières de l’administration Trump. En effet, le poids économique du commerce extérieur et du secteur automobile y est important. L’économie slovaque devrait éviter la récession grâce à l’investissement public et à la consommation. La remontée de l’inflation en début d’année, consécutive à la hausse du taux de TVA, est temporaire et limitée et ne devrait pas peser lourdement sur la consommation. À moyen terme, le plan de relance allemand et les flux d’IDE seront des facteurs de soutien pour l’économie.
L’économie slovène est très ouverte, ce qui la rend très sensible à la conjoncture de ses principaux partenaires et à l’évolution du commerce mondial. Le trou d’air enregistré en ce début d’année découle des perturbations du commerce mondial. La consommation des ménages et l’investissement public devraient continuer de soutenir l’activité. L’inflation repart légèrement à la hausse sur fond de pressions salariales et d’une possible hausse des prix de l’énergie. La reprise des dépenses du gouvernement devrait entraîner une hausse du déficit budgétaire, mais sans provoquer de dérapage et en gardant sous contrôle l’évolution de la dette. Les effets de la politique commerciale étatsunienne devraient rester modérés
En Afrique du Sud, le gouvernement de coalition, formé en juin 2024, résiste bon gré mal gré aux fortes divisions internes. Après trois mois de négociations houleuses, la version finale du budget 2025/2026, présentée au Parlement fin mai, vient d’être approuvée par tous les partis de la coalition. C’est une condition nécessaire pour regagner la confiance des investisseurs mais elle n’est pas suffisante. Le gouvernement devra également apaiser les tensions diplomatiques avec les États-Unis. Sans rebond significatif de l’investissement, la croissance économique devrait rester faible sur les trois prochaines années, ce qui alimentera la fragilité des finances publiques.
Les perspectives restent bien orientées malgré les turbulences internationales. Peu touchés directement par le durcissement de la politique douanière américaine, les Émirats arabes unis (EAU) bénéficient de marges de manœuvre pour faire face à la chute des cours du pétrole et au ralentissement du commerce mondial. Leur économie est plus diversifiée que celle des autres pays du Golfe. Elle est aussi portée par sa forte attractivité pour les investissements étrangers et le soutien de la puissance publique. À plus long terme, les EAU pourraient également tirer profit d’une potentielle reconfiguration des flux commerciaux et activer ses leviers pour maintenir sa relation stratégique avec les États-Unis.
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