Le gouvernement allemand a présenté son projet de budget pour l’année 2025 qui devrait être adopté en septembre. Il s’agit d’un budget de rupture marqué par un retour affirmé à l’investissement public et par un soutien à l’investissement des entreprises, au prix d’une hausse significative de l’endettement. Ce budget constitue l’un des piliers de la nouvelle politique allemande, dont les retombées sur la croissance devraient être rapidement positives.
Le gouvernement allemand a présenté son budget pour 2025 Le gouvernement allemand a présenté mardi 24 juin les grandes lignes de son budget pour 2025 ainsi que ses projections jusqu’en 2029. Un projet de loi, visant à mettre en œuvre les autorisations d’emprunt du fonds spécial de EUR 500 mds consacré aux infrastructures et à la transition bas carbone, était également à l’ordre du jour.
Le texte a été transmis au Parlement pour examen et amendements éventuels d’ici la pause estivale, et avant le vote prévu en septembre. L’adoption du budget ne devrait pas rencontrer d’obstacles majeurs. En effet, le vote ne nécessite que la majorité simple, or la CDU/CSU et son partenaire de coalition, le SPD, constituent une majorité.
Le gouvernement entend moderniser le pays et retrouver une croissance potentielle d’au moins 1% le plus rapidement possible. Pour y parvenir, il mise sur des investissements publics ciblés dans des secteurs stratégiques, des réformes structurelles et des incitations fiscales destinées à stimuler l’investissement privé (cf. le projet de loi Investitionssofortprogramm, dont l'adoption est prévue pour le 11 juillet prochain ).
Allemagne : évolution des finances publiques
Le projet de budget 2025 structure la stratégie d’investissement public et organise une montée en puissance de ces dépenses :
- À partir de 2025, l’Allemagne prévoit ainsi d’investir environ EUR 120 mds par an dans les infrastructures publiques (2,7% du PIB 2024 de référence). Les financements cibleront en priorité les transports (notamment le rail) et le logement, mais aussi le numérique, l’éducation et la transition énergétique.
- Une hausse progressive des dépenses de défense est prévue jusqu’à 3,5% du PIB en 2029 (en moyenne EUR 160 mds par an) ; la montée en charge sera rapide (2,4% du PIB en 2025, 3% en 2027).
- Cette augmentation sans précédent de l’investissement public sera rendue possible grâce aux fonds spéciaux dédiés, mais aussi à l’obligation d’allouer au moins 10% du budget de base à des dépenses d’investissement. À titre de comparaison, ces dernières ne représentaient, en moyenne sur la période 2000-2020, que 2,7% des dépenses publiques fédérales totales.
Des retombées économiques sont attendues rapidement Cette stratégie d’investissements massifs et rapides devrait avoir des retombées rapides sur l’économie. L’augmentation des dépenses publiques soutiendra mécaniquement la croissance. Elle pourrait aussi avoir un effet d’entraînement sur l’ensemble de l’économie, d’autant que, d’après la littérature économique, le multiplicateur budgétaire est généralement plus élevé pour les dépenses d’investissement que pour les dépenses de consommation. Le multiplicateur est aussi plus important lorsque les capacités de production sont sous-utilisées, ce qui est le cas de l’Allemagne. Cet effet d’entraînement serait facilité par le mécanisme de suramortissement prévu dans le projet de loi Investitionssofortprogramm qui permet aux entreprises de déduire de leurs impôts 30% du montant de leurs investissements en équipements réalisés jusqu’en 2027. Nous estimons à +0,4 point de pourcentage l’apport à la croissance allemande en 2025 (dont 0,3 point d’effet direct sur l’investissement et la consommation publique, et 0,1 point d’effet induit) et à + 0,7 point en 2026 (0,5 point d’effet direct et 0,2 point d’effet induit)[1] .
Ce budget de rupture s’accompagne d’une hausse importante de l’endettement, et met ainsi fin à l’orthodoxie budgétaire du pays , du moins pour un temps. Sur la période 2025-2029, l’endettement additionnel atteindrait près de EUR 850 mds[2] , et le déficit annuel moyen s’élèverait à 3,5 %. Le ratio dette publique sur PIB augmenterait de + 8,6 pb à l’horizon 2030 par rapport à 2024, à 71 % selon nos calculs. Cette trajectoire repose néanmoins sur des hypothèses ambitieuses en matière de croissance (croissance nominale moyenne de + 3,3 % par an entre 2025 et 2030), mais reste exposée à des aléas : l’évolution des conditions de marché et la mise en œuvre effective des mesures de consolidation budgétaire, notamment. Aussi, nous anticipons une hausse du taux à 10 ans : il atteindrait 2,9% en fin d’année (soit environ + 50 pb en un an) et 3,3% fin 2026. À ce niveau de taux, une stabilisation de la dette allemande demanderait de ramener le déficit public à - 0,1 % sur le restant de l’horizon[3] .
Achevé de rédiger le 26 juin 2025