La dynamique de l’économie chinoise reste caractérisée par des divergences sectorielles et par la morosité de la demande intérieure privée. Comme l’illustre notre graphique ci-dessous, l’activité dans le secteur manufacturier a gagné en vigueur sur la période février-avril 2024 par rapport aux trois mois précédents, alors que l’activité dans le secteur des services ne s’est pas renforcée.
La production industrielle a augmenté de +6,7% en glissement annuel (g.a.) en avril 2024 et de +6,3% en g.a. sur les quatre premiers mois de l’année. Ce taux de croissance est proche des taux enregistrés pendant les années pré-Covid. L’activité industrielle est notamment tirée par la production de biens destinés à l’exportation dans les secteurs high-tech et de technologie verte ; la production de puces électroniques a par exemple bondi de +37% en g.a. en janvier-avril et celle de véhicules électriques de +32%. Les volumes d’exportations de marchandises ont atteint des niveaux records, et les entreprises chinoises ont gagné des parts de marché grâce à la baisse de leurs prix de vente. En conséquence, les exportations mesurées en dollars courants ont enregistré une hausse très modeste sur les quatre premiers mois de 2024 (+2% en g.a.).
D’un côté, la politique industrielle mise en œuvre par Pékin porte ses fruits. De l’autre, les mesures visant à stimuler la demande des ménages et à relancer le marché immobilier ont eu peu d’effets jusqu’à présent. La croissance dans les services a ralenti à +3,5% en g.a. en avril 2024 et s’est établie à +5% en g.a. sur les quatre premiers mois de l’année. Ce rythme est inférieur aux taux de croissance du secteur des services dans les années d’avant-Covid (+7,7% en moyenne en 2016-2019).
Les principaux freins à la croissance de l’activité tertiaire et de la demande intérieure perdurent : profonde crise du secteur immobilier, incertitudes réglementaires, manque de confiance des consommateurs et des investisseurs privés. La croissance des ventes au détail s’est affaiblie en avril, à seulement +2,3% en g.a. en valeur contre +4,7% au T1 2024 (avec toutefois des effets de base encore défavorables), alors que l’inflation des prix à la consommation a légèrement accéléré (de 0% en g.a. au T1 2024 à +0,3% en avril). L’indice de confiance des consommateurs publié par le Bureau des Statistiques chinois n’est remonté que très lentement depuis l’abandon de la politique zéro-Covid, et reste bien en-dessous de ses niveaux d’avant-Covid. En outre, la composante « emploi » de cet indice de confiance est encore plus déprimée, ce qui est révélateur des principaux sujets d’inquiétude des ménages (que sont les conditions sur le marché du travail ainsi que l’immobilier). Le taux de chômage a atteint 5% en avril (contre 5,1% fin 2023), mais les embauches restent en réalité peu dynamiques.
L’activité dans le secteur immobilier a continué de se contracter fortement depuis le début de l’année et les prix des logements ont poursuivi leur baisse (-6,8% en g.a. en avril en moyenne dans les 70 principales villes du pays). Alors que les conditions d’achats de logements et d’accès au crédit ont été largement assouplies depuis l’an dernier, l’encours de prêts hypothécaires a continué de se réduire (-1,8% en g.a. au T4 2023 et -2% au T1 2024). En conséquence, les autorités viennent d’annoncer un nouveau train de mesures pour soutenir le secteur immobilier. Elles prévoient un nouvel assouplissement des conditions de prêts au logement (avec une baisse de l’apport personnel minimum et des mesures visant à réduire les taux d’intérêt). Surtout, un programme d’achat de logements invendus par les collectivités locales doit être lancé. Ce programme pourrait permettre d’augmenter les stocks de logements sociaux, de réduire les stocks d’invendus et de soulager les promoteurs immobiliers, s’il s’avère suffisamment ambitieux et suffisamment financé.