Le climat des affaires allemand est tiré vers le bas par la récession prolongée de l’industrie. La production industrielle au sens large (construction incluse) s’est contractée sur 10 des 12 derniers trimestres (en anticipant un nouveau trimestre négatif au T4 2024). La baisse cumulée atteint 8,4% (-14,7% vs. le pic de fin 2017, cf. graphique). Cette dynamique explique le faible niveau de l’IFO en décembre et janvier (à son plus bas, hors Covid-19, depuis la crise de 2008).
L’industrie et la construction (le tiers du PIB allemand) ont donc pesé sur la croissance du PIB. Ils expliquent que cette dernière bascule de nouveau en territoire négatif au T4 et sur l’ensemble de l’année 2024 (-0,2% à chaque fois), prolongeant une quasi-stagnation qui dure depuis 3 ans. Un début de rebond semble se manifester, avec des nouvelles commandes à l’industrie (en moyenne mobile sur 6 mois) en hausse de 4% entre août et décembre 2024. L’atonie devrait toutefois se prolonger au T1 2025 (prévision à +0,1% t/t), notamment sous le poids de deux incertitudes.
La première tient aux élections législatives qui seront organisées le 23 février prochain, à la nature de la coalition qui en sortira (la CDU/CSU domine les sondages mais une coalition à trois partis, avec le SPD et les Verts, pourrait s’avérer nécessaire), et donc à la rapidité avec laquelle le prochain gouvernement pourra agir.
Les deux dynamiques défavorables qui affectent la confiance des ménages (-22,4 en février selon l’indice GFK) devront notamment être inversées : 1/ La remontée du chômage, pour le moment modérée (à 3,4% en déc. 2024 contre un plus bas de 2,9% mi-2023), qui devrait se poursuivre ; 2/ un surcroît d’inflation au regard du reste de la zone euro (2,8% a/a en janvier en Allemagne contre seulement 1,8% en France et 1,7% en Italie selon l’indice harmonisé), notamment lié à une hausse plus prononcée des prix de l’énergie (vs. 2021) et des salaires.
La deuxième incertitude tient au commerce extérieur. Ce dernier ne soutient plus la croissance allemande depuis près de 5 ans. Les exportations de biens et services, voisines au T3 2024 de leur niveau de 5 ans auparavant, seraient descendues en deçà au T4 selon les premiers commentaires de Destatis (contre des exportations plus élevées de 5,5% en France sur la même période). De plus, si le président Trump annonçait le 18 février prochain des tarifs douaniers à l’encontre de l’Europe, cela pourrait aggraver ces problématiques. Or, l’Allemagne représente près de la moitié de l’excédent européen vis-à-vis des États-Unis, notamment dans des secteurs qui pourraient être ciblés (i.e. l’automobile).
Stéphane Colliac (achevé de rédiger le 5 février 2025)