Basée à Paris, la Direction des Études Économiques de BNP Paribas est composée d’économistes et de statisticiens :
Les Études économiques ont pour mission de répondre aux besoins des clients, des lignes de métiers et des fonctions de BNP Paribas en matière de recherche économique. Notre équipe d’économistes et de statisticiens couvre un nombre important de pays avancés, en développement et émergents, l’économie réelle, les marchés financiers et l’économie bancaire. Ce site, qui présente nos analyses, nos vidéos et nos podcasts, permet de partager le résultat de nos recherches avec tous ceux qui souhaitent mieux comprendre le contexte économique ou qui s’intéressent à des problématiques spécifiques.
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L’inflation devrait avoir diminué en février, notamment en France, en raison du net repli du tarif réglementé de l’électricité. Ce mouvement masque toutefois des évolutions divergentes. Si la désinflation se diffuse (les deux tiers des composantes de l’indice Insee témoignaient d’une inflation inférieure à 2% a/a en janvier en France), la hausse des prix reste soutenue dans les services, en France comme dans la zone euro. À court terme, un regain d’inflation énergétique est possible dans la zone, mais il devrait être de courte durée. La BCE devrait poursuivre ses baisses de taux à l’issue de sa réunion du 6 mars, mais la persistance de l’inflation sous-jacente (en deçà mais proche des 3% a/a) pourrait en modifier le rythme par la suite.
Le résultat des élections allemandes révèle un vainqueur clair : la CDU/CSU. Seuls cinq partis ont pu entrer au parlement, réduisant ainsi la fragmentation du Bundestag. Une grande coalition avec le SPD est possible. Les négociations devraient débuter rapidement afin d’établir une feuille de route commune. À leur terme, il faut s’attendre à des changements : un gouvernement allemand plus à l’initiative dans les affaires européennes, plus d’investissements publics, le renforcement des dépenses de défense et, par conséquent, un déficit budgétaire et une dette publique allemands qui pourraient augmenter.
Les enjeux des élections allemandes du 23 février sont importants. Le PIB allemand stagne depuis 3 ans et les capacités de production dans l’industrie ont subi leur première baisse depuis la réunification. La question du maintien du territoire allemand en tant que site de production (standort deutschland) se pose à nouveau. Dans ce contexte, ces élections permettront-elles d’entamer une nouvelle ère (zeitenwende) dans la politique économique allemande, comme ce fut le cas avec les lois Hartz dans les années 2000 ? L’attention se portera sur deux points en particulier : la réforme du frein à l’endettement, ainsi que celles concernant le coût de l’énergie.
Alors que la croissance française a atteint 1,1% en 2023 et 2024, les incertitudes, notamment de nature politique, devraient la conduire un peu en deçà en 2025 (0,7% selon nos prévisions). La différence s’explique en premier lieu par la faiblesse de l’acquis de croissance après le 4e trimestre 2024 et le 1er trimestre 2025. Toutefois, le pire est probablement derrière nous et la croissance devrait se raffermir à partir du 2e trimestre. En effet, la mise en œuvre du budget 2025 devrait restaurer la confiance et permettre une augmentation de la consommation publique par rapport au T1 (où elle avait été pénalisée par la reconduction du budget 2024)
Le climat des affaires allemand est tiré vers le bas par la récession prolongée de l’industrie. La production industrielle au sens large (construction incluse) s’est contractée sur 10 des 12 derniers trimestres (en anticipant un nouveau trimestre négatif au T4 2024). La baisse cumulée atteint 8,4% (-14,7% vs. le pic de fin 2017, cf. graphique). Cette dynamique explique le faible niveau de l’IFO en décembre et janvier (à son plus bas, hors Covid-19, depuis la crise de 2008).
La conjoncture française reste sur une note faible, bien qu’elle montre des signes de stabilisation. Le climat des affaires de l’Insee est resté stable à 95 en janvier, tandis que le PMI composite a marqué un léger rebond (47,6 en janvier contre 47,5 en décembre).
Le déficit de la balance commerciale sur les biens publié par les Douanes le 7 février devrait ressortir à EUR 83 mds en 2024, contre 100 mds en 2023 (mais 58 mds de 2019). L’amélioration du déficit nominal masque la baisse des exportations des biens. En revanche, l’amélioration de la balance en volume et le dynamisme des exportations de services sont des éléments positifs.
La croissance française aurait atteint 0,1% t/t au 4e trimestre 2024 selon notre prévision, portée par quelques éléments sectoriels favorables (production aéronautique et d’électricité). La dynamique générale de l’économie continue cependant de s’affaiblir, notamment les perspectives d’investissement des entreprises, ce qui pèse sur le marché du travail.
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Après avoir surperformé entre 2005 et 2018, la croissance allemande affiche depuis une sous-performance. L’Allemagne est ainsi la seule grande économie européenne dont le PIB stagne pour la troisième année consécutive du fait de la faiblesse de son industrie (qui se traduit cette année par des fermetures de sites et un rebond modéré du chômage). La persistance relative de l’inflation et une politique budgétaire limitée par la règle du frein à l’endettement pèsent aussi sur le potentiel de reprise. Enfin, alors que le manque d’investissements et le coût élevé de l’énergie la pénalisent déjà, l’Allemagne est vulnérable à un éventuel renforcement des tarifs douaniers des États-Unis.
La France devrait voir sa croissance économique diminuer au cours des deux prochaines années et le taux de chômage remonter, alors que les gains de pouvoir d’achat, associés à la désinflation, sont derrière nous et que l’incertitude politique devrait peser. Une période difficile que pourrait venir amortir le rebond de la production aéronautique, mais qui pourrait voir aussi se matérialiser des risques à la baisse equi pèsent sur les débouchés commerciaux en Allemagne et aux États-Unis. L’un des défis pour la France sera de mener à bien une consolidation budgétaire sans altérer son attractivité, avec notamment la faculté de son marché du travail à créer des emplois lorsque la reprise surviendra.
D’après les dernières enquêtes sur le climat des affaires et celles réalisées auprès des ménages, le rebond de l’économie allemande devrait encore se faire attendre. Le climat des affaires IFO a retrouvé en novembre (85,7) un niveau proche de celui de septembre (85,4, soit son plus bas niveau depuis mai 2020), après un rebond ponctuel en octobre (86,5). Ce retour à un niveau bas s’explique principalement par l’indice sur les services dans un contexte politique incertain, l’éviction du ministre des Finances C. Lindner ayant soudainement fait entrer l’Allemagne dans une période pré-électorale (élection anticipée prévue le 23 février 2025).
La conjoncture française enregistre une détérioration comme en témoignent le climat des affaires et la confiance des ménages. L’indice composite du climat des affaires de l’Insee est en repli d’un point par mois, passant de 98 à 96 entre septembre et novembre (moyenne de long terme à 100). Cette détérioration s’observe dans la totalité des secteurs, y compris dans les services, ce qui indique que le refroidissement de la conjoncture s’est diffusé dans l’économie.
En France comme en Allemagne, un nouveau rebond de l’inflation devrait marquer le mois de novembre, à 1,8 et 2,6% a/a respectivement selon nos prévisions contre 1,6 et 2,4% en octobre et 1,4 et 1,8% en septembre (indice harmonisé d’Eurostat). La persistance de l’inflation dans les services explique le niveau encore relativement élevé de l’inflation globale.
En France, au 3e trimestre 2024, pour la première fois (les séries statistiques débutant en 1949), les entreprises non-financières ont davantage investi (Mds EUR, prix constants) dans le poste « information et communication » que dans la construction. Un basculement qui devait survenir tôt ou tard, en raison du développement tendanciel de l’investissement immatériel (dans lequel l’ « information et communication » représente le poste principal). Ce poids croissant accompagne, en particulier, le recours de plus en plus répandu à l’électronique et au logiciel dans les biens consommés aujourd’hui, y compris au sein des secteurs traditionnels, comme l’automobile.
Le climat des affaires (enquêtes PMI et IFO) n’a cessé de se détériorer en Allemagne depuis son pic du mois de mai, jusqu’en septembre. L’optimisme relatif du printemps ne s’est pas prolongé, comme l’illustre notamment la dégradation du PMI des conditions à l’export (51,9 en mai, 49,8 en septembre). En conséquence, si notre prévision reste de 0,1% t/t pour la croissance du 3e trimestre, le gouvernement allemand a souligné le risque d’un nouveau chiffre négatif (après déjà -0,1% t/t au T2) et donc d’une récession. Au global, le PIB serait proche de son niveau enregistré fin 2021 (soit trois années de stagnation).
Les Jeux Olympiques (JO) auront été une courte parenthèse positive, désormais refermée, comme en témoigne le PMI services, qui a culminé à 55 au mois d’août au milieu de performances nettement plus atones. Toutefois, cet effet JO devrait avoir soutenu la croissance au T3 (0,4% t/t selon notre scénario). Notre nowcast est un peu plus bas (0,3%) et souligne le risque que, hors effet JO (estimé à 0,2% par l’Insee), l’économie française ait ralenti au T3 (après 0,2% t/t de croissance au T2). Elle ralentirait encore au T4, à en juger par la détérioration récente dans les services (PMI à 48,3 en octobre après 49,6 en septembre) et dans l’industrie (PMI sur la production en repli de 44 à 42,5).
La discussion du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 vient de débuter à l’Assemblée nationale. Le contexte qui sous-tend ce PLF doit être rappelé. La France s’engage dans un effort de consolidation budgétaire nécessaire et important, mais incertain étant donné les rapports de force à l’Assemblée nationale. Ces dernières années ont conduit à un niveau élevé du déficit budgétaire : son niveau en 2024 ainsi que celui de la charge d’intérêt (qui devrait augmenter de près de 1 point de PIB d’ici à 2027) ne laissent pas de choix. Pour stabiliser son ratio de dette publique, la France devra ramener son déficit budgétaire sous les 3% du PIB et donc le réduire chaque année pendant au moins cinq ans
Allemagne et France présentent des perspectives différentes en matière de consolidation budgétaire. Cette dernière est davantage engagée en Allemagne, où la dette est pourtant plus modérée. Toutefois, celle-ci s’accompagne d’une réduction du soutien au verdissement de l’économie, ainsi que par une stagnation du PIB depuis deux ans. En France, où la dette publique est plus élevée, le maintien d’un soutien budgétaire conséquent s’est accompagné d’une hausse de l’épargne. La littérature souligne que dans ce contexte une consolidation budgétaire fondée sur une baisse des dépenses pourrait soutenir la croissance.
Alors qu’en début d’année, des signes de rebond de la croissance allemande étaient apparus, la récession industrielle a finalement repris, avec un impact négatif sur le marché du travail désormais perceptible, puisque le taux de chômage remonte. Dans ce contexte et à la suite du retrait du soutien à l’achat de véhicules électriques en décembre 2023, les ménages ont accru leur taux d’épargne. Pour autant, des signes encore timides de rebond commencent à se dessiner, avec un léger regain en termes de demande. La prise de conscience du décrochage industriel allemand par le gouvernement pourrait, en parallèle, déboucher sur le retour de mesures de soutien.
L’inflation et la hausse des taux d’intérêt ont entraîné un atterrissage de l’ensemble de la demande intérieure privée (ménages et entreprises), sans empêcher la croissance française de se maintenir sur un rythme modéré (1,1% en 2023, 1,2% en 2024 selon nos estimations), à la faveur d’une baisse des importations et donc d’une contribution positive du commerce extérieur. La croissance a également été soutenue par la production de services (l’investissement des entreprises en information et communication devrait même passer sous peu devant la pierre). Ce support devrait continuer de soutenir une croissance au global stable en 2025, à 1,2%.
Le taux d’épargne des ménages français a encore augmenté, passant de 17,6% de leur revenu disponible brut (RDB) au 1er trimestre 2024 à 17,9% au 2e trimestre 2024 selon l’Insee, soit 1 point de plus en un an. Un signal précurseur d’une tendance à la hausse en cours également dans la zone euro. Si les chiffres pour le T2 ne sont pas encore disponibles, ceux du T1 ont souligné un taux d’épargne supérieur de 3 points (à 15,4%) à son niveau d’avant-Covid.
En août 2024, l’inflation française devrait revenir pour la première fois depuis trois ans (août 2021) sous les 2% en glissement annuel. Cette désinflation est principalement liée aux prix de l’énergie et devrait encore se renforcer début 2025 pour les mêmes raisons (baisse attendue du prix de l’électricité). L’inflation dans les services, notamment affectée par un effet Jeux Olympiques, devrait, en revanche, rester élevée à court terme, sans empêcher toutefois la poursuite de la désinflation.
La croissance des exportations vers les États-Unis (premier client à l’exportation pour l’Allemagne) a continué de porter le commerce extérieur allemand ces dernières années alors que les échanges avec la zone euro et la Chine étaient en relative stagnation. Depuis 4 mois, toutefois, le PMI allemand des conditions à l’export est supérieur au seuil de 50 (bien que plus bas en juin à 50,8 qu’en mai à 51,9) suggérant une dynamique plus globale.
La conjoncture française subit de nouveau le poids des aléas conjoncturels, comme en témoigne le rebond de l’indicateur d’incertitude de la Banque de France qui atteint en juillet un plus haut depuis l’automne 2022 (crise énergétique). Ceci pourrait fragiliser un climat des affaires déjà un peu moins favorable en France (PMI composite à 48,8 en juin) qu’en zone euro (PMI supérieur à 50 depuis 4 mois).