Edito

Atterrissage en douceur en vue, mais la prudence reste de mise

30/09/2024
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Moins de 2 ans après avoir atteint des sommets inédits depuis plusieurs décennies, l’inflation se rapproche des objectifs des banques centrales dans la plupart des pays du monde. Il est toutefois trop tôt pour crier victoire, car les décideurs de politique monétaire devront encore faire face à des courants contraires. Ils ont toutefois déjà fait la preuve de leur savoir-faire, et disposent par ailleurs de marges d’action, si nécessaire. Par conséquent, le scénario de référence pour l'année à venir est plutôt favorable tant pour les économies avancées que pour les marchés émergents, avec un assouplissement progressif des conditions financières (en raison de la baisse des taux d'intérêt et de l'affaiblissement probable du dollar américain) permettant à l'activité de se stabiliser autour de la croissance tendancielle.

Près de cinq ans après le début de la pandémie de Covid et après les turbulences économiques historiques qu'elle a générées, un atterrissage en douceur semble enfin être en vue pour l'économie mondiale.

Plus précisément, l’inflation, moins de 2 ans après avoir atteint des sommets inédits depuis plusieurs décennies, se rapproche des objectifs des banques centrales dans la plupart des pays du monde. Fait remarquable, les coûts économiques de cette désinflation rapide ont été bien plus faibles qu’attendu : dans la plupart des régions, l'emploi est maintenant plus élevé qu'avant la pandémie, le chômage est proche des planchers historiques et la croissance est restée positive, voire, dans certains cas, supérieure à la tendance.

Après avoir procédé au resserrement de leur politique monétaire le plus brutal depuis des décennies et s'être maintenues en territoire très restrictif pendant environ un an, les principales banques centrales ont maintenant toutes amorcé un cycle d'assouplissement. En effet, la Réserve fédérale américaine (Fed), a fini par se joindre à la fête le 18 septembre dernier avec une baisse de 50 points de base de son taux directeur.

Il est toutefois trop tôt pour crier victoire, car les décideurs de politique monétaire devront encore faire face à des courants contraires. Et cela même en faisant abstraction de l’environnement géopolitique actuel particulièrement instable. Quels sont-ils ?

Du côté de l'inflation, celle des services reste obstinément élevée : dans la zone euro, elle est quasiment deux fois plus élevée que son niveau prépandémique. Cela signifie qu’elle n'est proche de l'objectif que grâce à deux facteurs qui pourraient n’être que temporaires : une évolution favorable du prix des denrées alimentaires et de l'énergie, et une inflation bien inférieure à l'objectif pour les biens. Cela pourrait limiter le rythme et l’ampleur futurs de l'assouplissement monétaire. Nous constatons d’ailleurs déjà que certains « assouplisseurs » précoces, comme la Banco Central do Brazil, ont dû récemment relever leur taux d'intérêt.

Du côté de la croissance, trois éléments appellent à la vigilance :

· L'industrie est en récession dans la plupart des pays du monde, la chute des importations chinoises exerçant un frein important à l'activité industrielle mondiale. Les mesures de soutien à l’activité et aux marchés tout récemment annoncées devraient aider l'activité chinoise à se stabiliser, mais à un niveau inférieur à celui d'avant la pandémie. Les données les plus récentes en provenance d'Europe suggèrent une faiblesse généralisée du sentiment des entreprises et de l'activité. Pendant ce temps, les tensions sur les marchés du travail s'affaiblissent dans le monde entier, une normalisation bienvenue qui pourrait toutefois facilement basculer dans une nette détérioration, comme l'ont récemment admis certains décideurs de la Fed.

· Sauf aux États-Unis, la consommation n'a pas encore été stimulée par la hausse du pouvoir d'achat venant de la baisse de l'inflation et des taux d'intérêt. Au lieu de cela, les taux d'épargne ont augmenté et sont maintenant bien supérieurs à la moyenne pré-covid en zone euro et au Royaume-Uni. La confiance des ménages est faible et toute détérioration du marché du travail risque de l'aggraver.

· Les ratios dette/PIB étant partout beaucoup plus élevés qu'avant la pandémie, la politique budgétaire doit maintenant réaliser un ajustement pérenne, en particulier là où il a fait défaut en 2024. Dans la plupart des cas, cet ajustement pourra 'être progressif, et le frein à la croissance qui en résultera pourra être compensé par l'assouplissement monétaire. Toutefois, si les politiques budgétaires mises en place échouent à opérer un tel ajustement, voire sont expansionnistes (une éventualité aux États-Unis), les banques centrales pourraient se retrouver dans l'incapacité d'assouplir autant que prévu. Et les craintes du marché quant à la viabilité de la dette pourraient ajouter une prime supplémentaire à son coût, contribuant ainsi au resserrement des conditions financières.

Ainsi, les banquiers centraux seront sur une corde raide pendant un certain temps encore. Mais ils ont fait la preuve de leur savoir-faire, et par ailleurs ont des marges d’action, si nécessaire. Par conséquent, le scénario de référence pour l'année à venir est plutôt favorable tant pour les économies avancées que pour les marchés émergents, avec un assouplissement progressif des conditions financières (en raison de la baisse des taux d'intérêt et de l'affaiblissement probable du dollar américain) permettant à l'activité de se stabiliser autour de la croissance tendancielle.

C'est exactement le genre d'environnement dont les autres décideurs économiques ont besoin pour se recentrer sur la résolution des défis à long terme bien connus mais de plus en plus pressants : faible croissance de la productivité, vieillissement de la population, changement climatique, et plus récemment sécurité économique.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE

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