Eco Conjoncture

L’investissement à l’heure de l’ajustement budgétaire

30/08/2020
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Passage de relais

La lenteur de la reprise économique au Brésil, au cours des trois dernières années, a consacré la thèse de l’épuisement des moteurs historiques de la croissance brésilienne. L’atout démographique disparaît progressivement, le « supercycle » des matières premières s’est retourné et, mise à part la réponse de politique budgétaire apportée à l’épidémie de Covid-19, les dépenses publiques ont été revues à la baisse en raison des préoccupations liées à la soutenabilité des finances publiques.

Au cours de la dernière campagne présidentielle, Paulo Guedes, actuel ministre de l’Économie, a exprimé son intention de soumettre l’économie brésilienne à une révolution copernicienne en vue d’ouvrir une nouvelle phase dans l’histoire du pays. L’ancien modèle — fondé sur une place plus importante de l’État, un large accès au crédit subventionné et un mélange de détente budgétaire et de rigueur monétaire — et identifié comme la source de tous les maux, nécessitait une transformation radicale. Le nouveau modèle économique doit, selon Guedes, reposer sur le repli de l’État fédéral et une transformation de son rôle dans l’économie. La nouvelle équipe économique souhaite notamment limiter l’attractivité des carrières dans le secteur public et introduire davantage de concurrence pour stimuler la productivité. M. Neto, nouvellement nommé au poste de gouverneur de la Banque centrale, s’est fait l’écho de cette même ligne de pensée : « Le Brésil s’est toujours employé à trouver des solutions publiques à des problèmes privés. Et bien, cela ne marche pas. Désormais, nous nous efforcerons de trouver des solutions privées à des problèmes publics. [...] Nous devons nous réinventer en faisant appel à des fonds privés »1.

Avec la crise du Covid-19, les plans de transition, élaborés par le gouvernement, ont été mis de côté de même que le recours à des politiques de l’offre afin de relever les nombreux défis du pays. Pour soutenir l’économie, l’État a déployé l’un des plus importants plans budgétaires au sein des pays émergents. Ces mesures auront pour effet un déficit de l’État à deux chiffres, en 2020. Elles vont surtout différer les efforts en matière d’assainissement des finances publiques. De toute évidence, les plans du ministre Guedes, visant à rompre avec l’ancien modèle et d’insuffler un nouveau policy mix (« austérité budgétaire et détente monétaire »), devront attendre.

Au-delà de la crise, la priorité donnée aux marchés obligera, sans aucun doute, les entreprises et les travailleurs à s’adapter à de nouvelles réalités et à de nouveaux cadres de référence. Cet ajustement ne s’opérera probablement pas de manière organique. Le processus prendra du temps compte tenu de l’interventionnisme étatique ancré dans l’histoire brésilienne.

EVENEMENTS MARQUANTS DE LA DECENNIE ECOULEE AU BRESIL

Dans certaines régions, on continuera à se tourner d’abord vers l’État pour résoudre les problèmes, et la crise récente ne manquera pas de renforcer cette disposition. Avant que l’épidémie de Covid-19 ne frappe l’économie, de premiers signes indiquaient néanmoins que la transition gagnait progressivement du terrain, le secteur privé se développant deux fois plus vite que le secteur public2.

Ce passage de relais se traduira-t-il par une croissance plus dynamique du PIB ? Combien de temps faudra-t-il pour que le secteur privé monte en régime et se substitue à l’État ? Le Brésil peut-il connaître une croissance vigoureuse dans une période d’assainissement budgétaire draconien ? La baisse structurelle de l’investissement public au cours des dernières années a ouvert des opportunités d’expansion à l’investissement privé. Pour autant, ce dernier ne constitue toujours pas un moteur de croissance alternatif. Selon un large consensus, des obstacles de longue date devront être levés avant que cela puisse réellement se concrétiser. Nous nous proposons d’identifier certains d’entre eux. Dans cet article, nous nous concentrons sur l’une des principales causes de la faiblesse de la reprise au Brésil : un niveau d’investissement insuffisant.3 Nous distinguons, dans un premier temps, les obstacles qui ont pesé sur l’investissement public et privé, avant de formuler quelques observations sur l’ajustement macroéconomique en cours en pleine épidémie de Covid-19, et l’impact possible sur les perspectives d’investissement et sur le PIB potentiel.

Ce texte sera suivi d’un autre article Conjoncture, au mois de septembre, où nous examinerons les conséquences, pour l’économie, d’un taux d’investissement durablement bas dans le contexte de transition démographique que connaît le pays. Nous mettrons également en évidence certains éléments du programme de réforme du gouvernement et verrons de quelle manière celui-ci vise à stimuler l’investissement et à accroître la productivité. Nous identifierons aussi les risques à la baisse du programme de réforme, dont certains sont antérieurs à la crise et d’autres sont apparus avec l’épidémie.

Une reprise à la peine : investissements publics et privés sous contrainte

La croissance brésilienne a fait l’objet de nombreux vœux pieux ces dernières années. Le Brésil semblait appelé à se redresser rapidement après une sévère récession (2015-2016) qui aura effacé sept ans de croissance4. Au cours de la période 2014-2016, le PIB par habitant, mesuré en dollars courants, s’est contracté de 28 %. Les inégalités, la pauvreté, y compris extrême, se sont aggravées, tandis que l’investissement et la confiance accusaient de nets replis (graphiques 1-4). Il a fallu quinze trimestres pour que la formation brute de capital fixe réel commence, finalement, à se redresser, illustrant les graves difficultés rencontrées par les entreprises. Le chômage s’établissait à 13,7 % en mars 2017, bien au-dessus du niveau de 6,2 % enregistré en décembre 2013 (graphique 5). Dans le secteur du bâtiment, l’un des principaux employeurs du pays, les emplois formels ont chuté de près de 40 % sur la période 2014-2018 aux environs de 2 millions.

Le redressement de l’activité économique n’a, en fait, jamais eu lieu. Le Brésil a été dans l’incapacité de surfer sur la vague du rebond de la croissance mondiale, observé en 2017-2018. C’est à peine si l’économie a progressé de 1,2 %, en moyenne, sur la période 2017-2019. Certes, ce tableau global cache des profils de croissance différents selon les régions (comme dans l’État de Sao Paulo ou, à l’ouest, les États agro-industriels où la croissance a été plus dynamique), corroborant ainsi la thèse selon laquelle une reprise à deux vitesses était probablement en cours5 avant que le Covid-19 ne frappe l’économie.

Dans l’ensemble, cependant, la croissance est restée nettement en deçà de sa tendance de long terme, aux environs de 2,6 % selon le FMI. Pourquoi l’économie brésilienne a-t-elle eu autant de mal à se redresser ? Quels facteurs ont empêché un ajustement rapide de l’économie après la récession de 2015-2016 ?

Une série de facteurs conjoncturels et externes

La reprise s’est heurtée à un ensemble de facteurs conjoncturels et autres chocs. La grève des camionneurs a mis le pays à l’arrêt en mai 2018 avec des effets durables sur l’économie6. La rupture du barrage de Brumadinho, en janvier 2019, a entraîné une chute importante de la production minière au premier semestre 2019. Par ailleurs, la baisse des prix des matières premières destinées à l’exportation, et le ralentissement du commerce mondial et de la croissance depuis le second semestre 2018 ont également constitué des chocs négatifs sur la demande. La récession en Argentine a durement frappé l’industrie automobile et a affaibli les exportations (les ventes à l’Argentine ont été en retrait de USD 5 mds en 2019). Le cycle électoral (tout au long de l’année 2018), les incertitudes entourant l’orientation future de la politique économique, sans oublier les effets dommageables du scandale de corruption sur la confiance des entreprises, ont également pesé sur la reprise. Plus récemment, et peut-être de manière plus frappante, les conséquences de la pandémie de Covid-19 vont contribuer à retarder encore davantage la reprise, entraînant des pertes d’activité conséquentes.

Des maux structurels

La faiblesse de la reprise trouve également ses racines dans des fragilités structurelles et les héritages du passé : une économie fermée, un important déficit en matière d’infrastructures, des distorsions de longue date dans l’attribution du crédit, ou encore des politiques économiques peu judicieuses7.

Mais l’atonie de la croissance s’explique aussi par la faiblesse de l’investissement. L’impact de la récession de 2015-2016 sur le secteur privé et l’ajustement budgétaire qui a suivi ont lourdement pesé sur le taux d’investissement du Brésil. Le ratio investissement sur PIB a reculé de 20,9 % en 2013 à 14,7 % en 2017, un niveau relativement bas, comparé à celui des plus grands marchés émergents (graphique 7). Après avoir touché un point bas en 2017, le taux d’investissement tarde, depuis, à rebondir. De surcroît, les révisions du PIB et de la balance des paiements, en 2019, ont révélé que le taux d’investissement et le taux d’épargne étaient inférieurs aux chiffres précédemment indiqués, à hauteur de 0,5 point de pourcentage (pp) du PIB (15,5 %) et de 2 pp du PIB (12,1 %), respectivement.

PIB PAR TÊTE – PRIX COURANT (USD)
INVESTISSEMENT ET CONFIANCE DES ENTREPRISES
INÉGALITÉS : PART DES REVENUS DETENUS PAR CHAQUE TRANCHE DE POPULATION
EXTRÊME PAUVRETÉ ET PAUVRETÉ (2011, EN PPA)*
CHÔMAGE ET SALAIRES RÉELS
RÉCESSIONS ET REPRISES
INVESTISSEMENT DES BRIICS (% DU PIB)
DYNAMIQUE DES DÉPENSES ET DES REVENUS
SOLDES BUDGÉTAIRES DE L’ADMINISTRATION CENTRALE
RESSERREMENT BUDGÉTAIRE
FAIBLES CONTRIBUTIONS DE L’INVESTISSEMENT ET DE LA CONSOMMATION PUBLIQUE À LA CROISSANCE
DÉPENSES OBLIGATOIRES VS. DISCRÉTIONNAIRES (% DU PIB)

L’absence de redressement de la formation brute de capital fixe tient à de nombreux obstacles (pour beaucoup structurels) qui ont pesé sur l’investissement public et privé.

Investissement public : quels sont les blocages ?

Point de bascule budgétaire

Du fait de la situation fortement dégradée des finances publiques depuis 2014, le gouvernement n’a pas été en mesure de mener une politique budgétaire expansionniste pour soutenir la reprise. À partir de 2014, la croissance nominale des dépenses publiques est devenue de moins en moins compatible avec la trajectoire des recettes, entraînant une détérioration rapide des finances publiques. La croissance plus rapide de nombreux postes budgétaires alimentait la hausse des dépenses : subventions publiques, droits à prestations de sécurité sociale, pensions de retraite (sous l’effet du vieillissement de la population), salaires de la fonction publique (liés à des pratiques extensives d’indexation). Côté recettes, les allégements fiscaux et une profonde récession n’ont fait qu’aggraver la situation. Le solde primaire s’est très rapidement dégradé, accusant un déficit moyen de 2 % du PIB sur la période 2015-2018 après avoir affiché un excédent moyen de 2,6 % du PIB sur la période 2007-2013. Ainsi, la dynamique des ratios de dette publique brésilienne sur PIB s’est fortement détériorée, entraînant la perte de la note « investment grade » en 2016 (graphiques 8-9).

Depuis 2016, l’orientation de la politique budgétaire a été largement restrictive après avoir été expansionniste de 2013 à 2015 (graphique 10). Par ailleurs, en tant que composante de la demande intérieure, la consommation publique n’a apporté une contribution positive à la croissance trimestrielle du PIB que sept fois en seize trimestres, sur la période 2015-2019, et à hauteur d’à peine 0,2 point de pourcentage (graphique 11).

Du fait de contraintes constitutionnelles, l’ajustement budgétaire a presque entièrement été supporté par l’investissement public…

Avec l’entrée en fonction du président Michel Temer en septembre 2016 après la destitution de la présidente Dilma Rousseff, l’attention du gouvernement s’est recentrée sur l’assainissement des finances publiques. Cependant, hormis la compression des subventions (en grande partie liée à des mesures visant à limiter l’octroi de crédits à des taux administrés8), les efforts du gouvernement pour contrôler les dépenses courantes ont été sérieusement limités par des contraintes constitutionnelles.

Au Brésil, le contrôle des dotations budgétaires est d’autant plus difficile que de nombreux postes de dépenses sont protégés par la Constitution (autrement dit, ils sont fixés par la loi). Ce sont les « postes de dépenses obligatoires » qui constituent 96 % du budget de l’État fédéral. Pour modifier les composantes de ces dépenses obligatoires, un avenant à la Constitution est nécessaire, ce qui implique un pourcentage de vote favorable élevé au congrès9.

En l’absence de modifications de la Constitution pour mieux contrôler la trajectoire des dépenses obligatoires, l’introduction (aussi dans la Constitution) d’un plafond des dépenses10, vers la fin de 2016, signifiait que la charge de l’ajustement budgétaire était, pour l’essentiel, supportée par les dépenses publiques d’investissement, principale composante des dépenses discrétionnaires de l’État (graphique 12). En fin de compte, l’Etat a continué à dépenser mais sans contribuer à soutenir la croissance11. Les investissements du secteur public ont fini par se replier à 1 % du PIB en 2019, un plus bas record, contre 5,3 % du PIB en 2010. Dans le budget 2020, les dépenses publiques d’infrastructures devaient initialement atteindre le niveau le plus bas de ces dix dernières années.

…entraînant des pertes d’activité immédiates et des coûts à moyen terme

L’ajustement budgétaire contraint, notamment par l’introduction de nouvelles règles constitutionnelles en parallèle d’autres anciennes, a non seulement causé des pertes d’activité à court terme, mais a aussi eu un effet pénalisant sur la croissance à moyen terme. La réduction de l’investissement public, ces dernières années, a non seulement affaibli l’impact du multiplicateur budgétaire12 mais elle a eu aussi d’importantes répercussions sur la qualité des infrastructures, un déterminant important du potentiel de croissance d’un pays. Ce réajustement est allé à l’encontre de nombreuses recommandations des organisations internationales concernant la qualité et la composition des ajustements budgétaires au sein des pays en développement13. Il sera essentiel pour le Brésil de modifier la composition de ses dépenses publiques afin que l’investissement puisse jouer tout son rôle à terme. Une stratégie permanente de réduction des déficits qui viendrait aux dépens de l’investissement public finira par pénaliser durablement la croissance à moyen et long terme.

Pourquoi les entreprises n’investissent-elles pas davantage au Brésil ?

Les séquelles de la récession et les risques politiques

Pendant la période qui a suivi la récession, la faiblesse des dépenses en capital des entreprises semblait quelque peu justifiée au vu des nombreux obstacles auxquels l’investissement14 s’est heurté : (i) le désendettement des entreprises était en cours mais il progressait à un rythme bien plus lent que celui des ménages (graphique13), (ii) les demandes de redressement judiciaire (sorte de placement sous la protection de la loi sur les faillites) ont continué à augmenter15, (iii) il n’y avait pas urgence à investir en raison du niveau élevé des capacités disponibles dans de nombreux secteurs. Ainsi, des stocks importants de biens immobiliers à usage résidentiel et commercial ont nettement freiné le secteur de la construction avec cependant d’importantes disparités régionales16. L’atonie de la reprise n’était certainement pas due en totalité au ralentissement dans le secteur de la construction mais ce dernier a joué un rôle important. En effet, il représente autour de 50 % de la formation brute de capital fixe, dont la moitié environ est liée à la construction à usage résidentiel ou commercial et l’autre moitié, aux infrastructures. Ainsi, sa faiblesse a généré un manque à gagner important en termes de demande globale.

Du côté de l’accès au crédit, (iv) les conditions de financement avaient aussi considérablement changé, en particulier pour les grandes entreprises, avec la fin d’un cycle marqué par l’accès aux prêts subventionnés et aux allégements fiscaux17. Dans le sillage de l’ajustement budgétaire, le rôle de la banque publique de développement (BNDES) — partenaire historique des entreprises en matière de dépenses d’investissement et source quasi-exclusive de financement de long terme — a été progressivement redéfini18, tandis que les banques publiques ont nettement revu à la baisse leurs offres de crédit (graphique 14) limitant d’autant l’accès des entreprises à des fonds bon marché19. Par ailleurs, du fait de l’incapacité du gouvernement Temer à approuver une réforme des retraites, les spreads souverains se sont maintenus à des niveaux élevés, un facteur dissuasif supplémentaire à l’investissement.20

De plus (v), les entreprises étaient toujours confrontées aux retombées négatives des scandales de corruption, ce qui impliquait une vigilance et une prudence accrues dans les transactions avec les groupes faisant l’objet d’enquêtes. Les dépenses en capital dans le secteur de la construction ont pâti de l’implication de nombreuses sociétés dans l’opération anticorruption Lava Jato.

À l’issue de cette opération, certaines de ces entreprises n’étaient plus autorisées à participer à des projets publics de construction civile21. De manière plus générale, (vi) les turbulences politiques autour de la possible destitution du président Temer, le cycle électoral présidentiel 2018 qui a suivi et les incertitudes entourant le programme de réformes structurelles ont aussi, probablement, renforcé l’aversion pour le risque et pesé sur les décisions de mise en œuvre de nouveaux plans d’investissement (graphique 15).22

ENDETTEMENT DES ENTREPRISES ET INVESTISSEMENT
RÉDUCTION DU CRÉDIT ADMINISTRÉ À TAUX BONIFIÉ
INCERTITUDE POLITIQUE ET INVESTISSEMENT
UN ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES COMPLIQUÉ
BRÉSIL : EN MILIEU DE PELOTON EN TERMES DE COMPÉTITIVITÉ
COMPÉTITIVITÉ: ZOOM SUR LE PILIER INFRASTRUCTURE

La croissance anticipée : principal moteur de l’investissement des entreprises ?

Le rôle de la demande anticipée semble aussi être un important déterminant des décisions d’investissement des entreprises au Brésil. Selon cet argument, de moins bonnes perspectives de croissance économique à moyen terme (déterminant macroéconomique), en pénalisant les rendements attendus futurs des entreprises, seraient de nature à décourager les décisions d’investissement actuelles23. Une étude empirique menée par CEMEC24 montre que les anticipations de croissance de la demande (en moyenne sur trois ans et pas seulement la croissance attendue pour l’année à venir) constitueraient la première préoccupation des entreprises brésiliennes, occupant d’ailleurs, sur le plan empirique, une place plus importante, par exemple, que les contraintes financières ou la rentabilité25.

Ce résultat est corroboré par une autre étude menée par le FMI26 selon laquelle la détérioration des perspectives de croissance à moyen terme, ainsi que l’accroissement des incertitudes entourant les politiques publiques ont constitué, avec le temps, les principaux freins à l’investissement. Cependant, il est difficile de dire si la faiblesse de l’investissement des entreprises est plus une cause qu’une conséquence (par le biais des anticipations) de l’atonie de la reprise. Les deux mécanismes opèrent certainement de concert même s’il est difficile de les tester empiriquement. La difficulté du secteur des entreprises à relancer la croissance confirme cependant la thèse selon laquelle un certain « effet d’entraînement », de la part des autorités, serait nécessaire pour stimuler l’investissement des entreprises.

Les effets persistants de la répression financière et de la faiblesse de l’épargne

D’un point de vue théorique, des déficits élevés, dus aux dépenses publiques, peuvent avoir deux effets opposés sur l’investissement privé : un effet d’éviction (crowding out) et un effet d’entraînement (crowding in).27 Dans ce dernier cas, les dépenses publiques peuvent avoir un effet positif sur l’investissement privé lorsqu’elles amènent les entreprises à anticiper une hausse de la demande globale. Dans le premier cas, en détournant du secteur privé la majeure partie de l’épargne privée pour financer des dépenses publiques, le secteur public le prive de fonds pour financer des investissements, et augmente par ailleurs les coûts de financement pour les entreprises.28

Au Brésil, le besoin de financement historiquement élevé de l’État a davantage entraîné un effet d’éviction qu’un effet d’entraînement. Il est également allé de pair avec une politique de « répression financière », c’est-à-dire « le recours à différentes mesures visant à orienter les flux d’épargne et de capitaux au profit de l’État29 ». Cette situation a engendré de nombreuses externalités négatives pour le secteur des entreprises, décourageant l’investissement au-delà de facteurs conjoncturels.

Le besoin d’emprunt chroniquement élevé de l’État, dû à la hausse des dépenses publiques, combiné à la faiblesse de l’épargne du secteur privé, a entraîné une augmentation des taux d’intérêt. L’opportunité, pour les épargnants, d’obtenir un meilleur rapport risques/rendement en investissant dans les obligations d’État, a historiquement encouragé la recherche de rentes. Pendant longtemps, plus de 70% des fonds investis dans le secteur de la gestion d’actifs étaient dirigés vers des obligations du secteur public30. Le niveau élevé des taux d’intérêt a également incité les entreprises à placer leurs excédents financiers sur le marché de la dette souveraine au lieu de les réinvestir dans leur activité31.

L’orientation de la majeure partie de l’épargne nationale vers la dette publique a non seulement conduit à un effet d’éviction de l’investissement privé, mais il a aussi empêché le développement du marché local des capitaux.

Pour mieux orienter les flux financiers vers le secteur privé, la solution la plus efficace serait de réduire le besoin de financement de l’État. Un autre moyen consisterait à encourager l’épargne du secteur privé tout en maîtrisant le déficit budgétaire, afin de limiter les comportements ricardiens32. L’insuffisance de l’épargne a d’ailleurs pesé sur la progression de l’investissement dans le pays33. Au Brésil, le secteur public, en devenant « la première source de financement de l’investissement privé »34, aura trouvé un moyen de contourner ces deux options. L’État aura toutefois payé un prix élevé pour capter l’épargne, déjà limitée, du secteur privé et étendre simultanément des prêts à taux faibles (en termes relatifs) aux entreprises. Ainsi, sur la période 2015-2016, l’État empruntait généralement à des taux nominaux avoisinant entre 14 % et 15 %, tandis que la banque publique de développement (BNDES) accordait des prêts à taux bonifiés aux alentours de 7 %, bien inférieurs aux taux de marché. Dans cette configuration, la charge liée au différentiel de coûts de financement était naturellement supportée par les finances publiques.

Ces dernières années, cette structure de financement a été revue à la baisse avec l’ajustement budgétaire. Ce dernier a aussi eu, malheureusement, pour conséquence de modifier la nature de l’effet d’éviction : l’investissement privé potentiel n’était plus supplanté par l’investissement public, mais par la consommation des administrations publiques35. La hausse des dépenses publiques, tirée par les engagements obligatoires de l’État, s’est ainsi faite au prix d’une baisse de l’investissement public comme de l’investissement privé.

Le climat des affaires continue de peser sur l’investissement des entreprises

De nombreux défis et autres faiblesses liés au climat des affaires continuent de peser sur l’investissement des entreprises, faisant obstacle à l’esprit d’entreprenariat et à l’innovation au Brésil. Des études empiriques ont montré que la qualité du climat des affaires d’un pays est l’un des principaux déterminants de la croissance économique36. Le Brésil se classe à la 124e place sur 190 pays pour la facilité de faire des affaires, selon le rapport Doing Business 2020 de la Banque mondiale (graphique 16), et à la 71e sur 141 (8e en Amérique latine et dans la région des Caraïbes) dans le rapport sur la compétitivité du Forum économique mondial 2019 (graphiques 17-18). Dans les deux cas, il se classe en dessous des autres BRICS. De nombreux obstacles liés au climat des affaires au Brésil ont contribué dans le passé à décourager ou à reporter les investissements. Nombre d’entre eux figurent au programme des réformes structurelles et, dans certains domaines, le gouvernement fédéral a déjà introduit ces dernières années d’importants changements d’orientation (lancés sous l’administration Temer).

  • Accès limité aux capitaux de long terme pour les PME : d’après un rapport de la Banque mondiale, il est essentiel de prolonger la structure des échéances de financement pour promouvoir la croissance dans la mesure où cela permet « d’offrir une protection contre les chocs d’offre de crédit et d’éviter les risques de refinancement en période peu favorable, facilitant ainsi les investissements à long terme et l’amélioration des performances »37. Au Brésil, il existe une distinction nette, en termes de maturité des prêts, entre les banques du secteur public et celles du secteur privé. Les banques privées accordent essentiellement des prêts à court terme (de moins de 90 jours, environ 70 % du marché, et de 91 jours à un an, environ 60 %), tandis que les banques publiques se concentrent sur les prêts à long terme, (3-5 ans, environ 67 % du marché, et 5-15 ans, environ 82 %, et plus de 15 ans, environ 79 %). La BNDES est le pourvoyeur quasi exclusif des financements de long terme principalement proposés aux grandes entreprises. En 2019, l’échéance moyenne des nouvelles opérations de crédit aux entreprises était d’environ 5,3 ans.
  • Coût d’emprunt élevé : dans l’ensemble, les taux d’intérêt nominaux moyens pour les entreprises (dont les prêts administrés à taux bonifiés et non-administrés à taux de marché) étaient d’environ 15 % en 2019 (11,2 % en termes réels). Le taux d’intérêt moyen sur la part administrée (earmarked credit) s’est élevé à 9 % (5,2 % en termes réels) sur la même période et à 18,7 % sur le segment non-administré (14,9 % en termes réels). En avril 2020, le spread entre le taux de rémunération des dépôts des entreprises et le taux des crédits aux entreprises s’établissait à 8,3 points de pourcentage (pp). Avec le temps, le niveau élevé du coût de l’emprunt a été l’un des facteurs de la faiblesse de l’intermédiation financière au Brésil (environ 50 % du PIB en mai 2020). Devant des coûts d’emprunt prohibitifs et l’impossibilité de conclure des contrats de prêt à long terme, les entreprises (en particulier, les PME, qui n’ont pas accès aux financements extérieurs ni aux marchés des capitaux local ou au crédit de la BNDES) ont, en règle générale, surtout recouru à des fonds internes (bénéfices non distribués) pour investir. Leurs opportunités de croissance ont été, de ce fait, nettement freinées38. Le coût élevé de l’emprunt signifie également que les entreprises consacrent davantage de ressources à assurer le service de la dette qu’à financer des projets productifs. Les différences sont également criantes selon la taille, les entreprises plus petites, sans aucun accès au marché, étant confrontées à des coûts de financement bien plus élevés39.

Plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer le coût élevé de l’emprunt au Brésil. D’abord le rôle des frictions sur le marché du crédit, c’est-à-dire l’asymétrie d’information due à l’absence de registre national des crédits, ainsi que d’autres sources de distorsion telles que les pratiques en matière de répartition des crédits. Ensuite, le caractère limité de l’épargne (dû à une charge fiscale élevée et à l’architecture du système de retraite), la faiblesse de la protection judiciaire en cas de défaillances des entreprises (longueur des procédures de règlement des faillites et faiblesse des taux de recouvrement des créances auprès d’entreprises insolvables), et, enfin, une fiscalité et des coûts de mise en conformité élevés40.

D’importantes frictions sur le marché du crédit (en particulier, la prévalence du crédit administré) ont, à leur tour, empêché une transmission efficace de la politique monétaire, limitant l’action stimulante de la baisse du taux directeur (SELIC) sur l’investissement.41 Comme l’a fait observer la Banque mondiale, « lorsque plus de la moitié du crédit total ne réagit pas directement au SELIC, une modification bien plus importante du taux directeur est nécessaire pour avoir l’effet escompté »42. Par ailleurs, le canal de transmission de la politique est également sans doute atténué par le niveau élevé d’informalité dans le pay43.

  • Complexité du régime fiscal, coûts de mise en conformité, délais de création d’une entreprise : avec un code fiscal complexe et des régimes différenciés selon les États, la comptabilité fiscale au Brésil est un exercice particulièrement délicat. Il faut ainsi près de 1 501 heures à une entreprise moyenne brésilienne pour établir sa déclaration et s’acquitter de ses obligations fiscales (contre 296 au Chili, 175 aux États-Unis, 139 en France, 114 au Royaume-Uni et 49 à Singapour), d’après la Banque mondiale. Il faut aussi, en moyenne, 21 jours environ pour créer une entreprise au Brésil (contre 11 en Colombie, 8 au Mexique et 6 au Chili) selon les données du Forum économique mondial44.
  • Difficultés à fermer une entreprise : selon l’OCDE, il faut en moyenne quatre ans pour fermer une entreprise contre 1,7 an, en moyenne, dans l’OCDE. L’analyse de Nicola Calicchio, du cabinet McKinsey & Co, donne un aperçu des difficultés rencontrées par les sociétés désirant cesser leurs activités dans le pays : « La fermeture […] reste « quasiment impossible ». [...] Les entreprises demeurent exposées à des obligations pendant de nombreuses années après la cessation de leur activité, décourageant ainsi l’entrepreneuriat »45.
  • Importants arriérés dans le traitement des dépôts de brevets : le nombre de dépôts annuels de brevets a considérablement augmenté au cours dix dernières années, en partie en raison des modifications apportées au code de la propriété industrielle (CPI) et à la législation sur la propriété industrielle (LPI) qui a « finalement reconnu des droits de brevet dans les secteurs de la pharmacie, de l’agriculture et des biotechnologies. »46 Cependant, l’insuffisance des ressources a entraîné de sérieux arriérés dans le traitement des demandes : celles en attente étaient estimées à 160 000 en 2019, contre 200 000 en 201547. Selon un cabinet spécialisé en propriété industrielle, BR Latin America, l’Office brésilien des brevets (INPI) peut mettre « dix à quinze ans pour délivrer un brevet ».

Cette situation a fini par devenir « un facteur de dissuasion majeur pour les inventeurs qui ne peuvent espérer mettre rapidement leur innovation sur le marché48 ». Dans son dernier rapport sur les PME et l’entrepreneuriat au Brésil, l’OCDE note qu’un plan de restructuration de grande envergure de l’office national de la propriété industrielle (INPI) a été adopté et que des organismes ad hoc ont été mis en place pour gérer la problématique de la propriété intellectuelle au niveau universitaire49. Le programme d’action accélérée et standardisée (SOAP), récemment mis en œuvre au sein de l’office, devrait permettre de remédier aux arriérés d’ici à deux ans50.

  • Faiblesse des indicateurs de gouvernance : le climat des affaires au Brésil a pâti de la détérioration, au cours de la dernière décennie, des indicateurs de gouvernance du pays, en grande partie sous l’effet des scandales de corruption dévoilés dans le cadre de l’opération Lava Jato. L’indice 2019 de perception de la corruption de Transparency International classe le Brésil à la 106e place sur 180 pays derrière les autres BRICS (l’Inde comme la Chine occupent la 80e place, l’Afrique du Sud, à la 70e) à l’exception de la Russie (137e). Comme l’indique Kaushik Basu, ancien chef économiste à la Banque mondiale, dans une étude pour Brookings : « la corruption ronge les marchés, protège les opérateurs historiques contre la concurrence en empêchant l’entrée de nouveaux acteurs, détruit le tissu moral de la société et freine le développement économique »51. En Amérique latine, plus généralement, la corruption a constitué un obstacle majeur au développement de projets de partenariat public-privé (PPP), limitant ainsi dans une large mesure le développement de l’investissement en infrastructures.
  • Des barrières élevées à la concurrence (subventions, barrières à l’entrée et barrières commerciales) : les subventions, les transferts et autres formes d’exemptions fiscales ainsi que les barrières à l’entrée et les barrières commerciales peuvent expliquer la mauvaise affectation des capitaux et contribuer à soutenir le taux de survie d’entreprises inefficientes52. Plus important encore, ces barrières ont tendance à nuire à la concurrence53. La faiblesse de cette dernière a, à son tour, pour effet de dissuader l’investissement, même si d’après la littérature cela dépend aussi beaucoup de la structure du marché et des secteurs54. L’ajustement budgétaire, opéré au Brésil ces dernières années, a permis de réduire les subventions et les allégements fiscaux. Le chantier de la suppression des barrières à l’entrée et des barrières commerciales reste néanmoins vaste. Les exigences de contenu local restent répandues dans de nombreux secteurs (malgré une levée progressive ces dernières années), tandis que le pays compte « le nombre le plus élevé de lignes tarifaires au-dessus de 10 % de tous les marchés émergents ».

Le pays reste, par ailleurs, à la traîne par rapport à ses pairs en termes d’accords commerciaux, les accords bilatéraux signés ne concernant que « 10 % environ du PIB mondial tandis que ceux du Chili et du Pérou couvrent environ 70 à 80 % du PIB mondial »55.

Qu’en sera-t-il de l’investissement avec le Covid-19 ?

L’épidémie de Covid-19 a compromis le calendrier prévu par le gouvernement pour engager la transition du Brésil vers une économie tournée vers le secteur privé. Alors que les réformes prévues devaient créer des conditions favorisant une vague prochaine d’investissements par des opérateurs privés, l’État devait, quant à lui, se mettre en retrait et s’atteler à réduire ses excès. Les mesures budgétaires mises en place pour atténuer les effets de la pandémie vont au contraire saper les efforts consentis au cours des trois dernières années pour assainir les comptes publics. Les nombreuses mesures adoptées par le gouvernement, la contraction prévue du PIB et la baisse des recettes vont porter le déficit budgétaire à des niveaux à deux chiffres (vraisemblablement plus de 15 % du PIB), cette année, et amener la dette publique à probablement dépasser la barre de 100 % du PIB (contre 77 % en 2019)56. L’effondrement du marché pétrolier, après avoir effacé à un moment donné la moitié de la valeur boursière de Petrobras, va également entraîner une réduction des transferts en faveur des États et des collectivités locales.

L’épidémie a non seulement eu pour effet un report des efforts d’assainissement des finances publiques, mais elle a aussi mis à terre les marchés financiers du pays (graphique 19). Alors qu’au deuxième trimestre 2020, la courbe des taux s’est fortement redressée, dans le même temps, les baisses de taux par la Banque centrale, une aversion accrue pour le risque et des perspectives économiques très dégradées ont généré d’importantes sorties nettes d’investissements de portefeuille. Ceci a amené la monnaie à connaître un nouveau bas historique face au billet vert (près de 6 BRL pour un dollar à la mi-mai). Les crises politiques qui se sont succédées et la gestion controversée de l’épidémie n’auront certainement pas contribué à calmer les marchés.

Investissement : perspectives à court terme dans le sillage du Covid-19

Le Covid-19 a frappé le Brésil à un moment où le pays était confronté à la plus lente reprise économique de son histoire et où environ un quart de sa population active était au chômage ou en situation de sous-emploi. À cela il convient d’ajouter une position budgétaire déjà fortement vulnérable. En effet, on estime qu’il aurait fallu au gouvernement au moins 4 à 5 ans pour afficher un solde primaire positif susceptible de stabiliser son ratio de dette.

Sans savoir quelles seront la durée et la gravité de la crise (d’autant plus que l’épidémie n’est toujours pas maîtrisée), il est difficile à ce stade de réaliser des projections quant au type d’ajustement macroéconomique auquel le pays sera confronté. Les prévisions de croissance ont rapidement baissé au cours des derniers mois.

À l’inverse, la dispersion autour de ces prévisions a fortement augmenté. Cela reflète l’incertitude élevée concernant l’ampleur des effets de la pandémie sur l’économie, mais aussi le scénario de reprise (en V, W, U ou en L). Une chose est sûre néanmoins : l’activité économique sera fortement perturbée. Selon la plupart des projections, le Brésil se dirigerait vers une contraction du PIB de l’ordre de 5 à 9 % en 2020. Le PIB ne devrait retrouver son niveau antérieur à la crise du coronavirus qu’au premier semestre de l’année 2022.

MARCHÉ BOURSIER ET TAUX DE CHANGE
CAPACITÉ D’UTILISATION - INDUSTRIE (INDICES, CVS, 3 MM)
TAUX D’INTÉRÊT RÉELS
TAUX D’INTÉRÊT MOYENS SUR LES NOUVELLES OPÉRATIONS (%)
TAUX D’INTÉRÊT PAR CONTREPARTIE (%)
EMISSIONS LOCALES - TITRES À REVENUS FIXES, ACTIONS, PRODUITS HYBRIDES. VOLUME (BRL MILLIONS)

Si l’incertitude prévaut, certains développements sont néanmoins perceptibles. Les entreprises — pierre angulaire du nouveau modèle économique du gouvernement — sortiront affaiblies de la crise et, en cas d’aggravation de la récession, pourraient subir des dommages à plus long terme57. Dans ce registre, les PME sont tout particulièrement exposées. Les mesures mises en place par les autorités ont certes contribué à soulager la position financière des entreprises, à éviter des licenciements massifs et à prévenir une envolée des événements de crédit58. Toutefois, ces soutiens ne vont être que temporaires. À l’instar de nombreux autres pays du monde, les entreprises au Brésil vont durablement souffrir des pertes d’exploitation irréversibles ainsi que de la baisse de la demande future liées aux pertes d’emplois et de revenus. Le prolongement des délais de remboursement pour les prêts destinés à couvrir les besoins en fonds de roulement des entreprises ne permettra pas de réduire l’endettement. Par ailleurs, le paiement des charges fiscales différées pendant la crise devra aussi être honoré à terme. Ainsi il faudra s’attendre, tôt ou tard, à une augmentation des faillites d’entreprises59 à moins que celles-ci bénéficient d’un allégement de dette. Selon une étude du cabinet de conseil Alvarez et Marsal60, les demandes de placement sous la protection de la loi sur les faillites, déposées auprès des tribunaux, pourraient augmenter de 40 % par rapport au pic enregistré en 2016 (quelque 2 500 entreprises contre 1 800 précédemment)61. Le tissu productif s’en trouverait d’autant plus affecté que les entreprises en faillite perturberaient les chaînes d’approvisionnement des entreprises qui survivent à la récession.62

À court terme, les perspectives d’un fort rebond de l’investissement sont limitées. La formation brute de capital fixe — la composante la plus volatile et procyclique du PIB — devrait être en effet durement touchée, en raison du report de plans d’investissement. Ces derniers ne devraient reprendre qu’après une normalisation des conditions économiques. D’ores et déjà, le géant pétrolier Petrobras a ajourné ses dépenses d’investissement et reporté la vente de raffineries et autres actifs logistiques dans le cadre de son plan de désinvestissement établi sur cinq ans63. Alors qu’Electrobras a repoussé ses plans de privatisation jusqu’en 2021, les tests de réseaux de la technologie 5G ont dans le même temps été reportés. De nombreux appels d’offres pour l’attribution de concessions ont été annulés à Sao Paulo (autoroute) et Fortaleza (port). Six appels d’offres portant sur des concessions d’aéroports ont également été remis à plus tard (Salvador, Confins, Porto Alegre, Galeao, Fortaleza et Florianopolis). L’Agence nationale du pétrole (ANP) a, elle aussi, reporté des enchères qui devaient être organisées plus tard cette année, portant sur l’exploration et la production de pétrole et de gaz.

De plus, le ministère des Mines et de l’Énergie a repoussé indéfiniment les enchères dans le secteur de l’énergie qui devaient avoir lieu sur la période 2020-2022. 2020 devait aussi être une année record pour les introductions en bourse, mais le record devra attendre. Par ailleurs, la formation brute de capital fixe devrait pâtir du ralentissement des investissements directs étrangers (IDE)64. Dans son dernier rapport sur l’investissement dans le monde, la CNUCED prévoit en effet une baisse de 50 % des investissements directs étrangers en Amérique latine et aux Caraïbes sachant que l’année dernière le Brésil a attiré 44 % de l’afflux total d’IDE entrants dans la région, soit environ USD 72 mds.

Aussi, la crise sanitaire ne contribuera pas à éliminer la forte sous-utilisation des capacités de production dans l’économie. À l’approche de la crise, l’industrie manufacturière comptait déjà des marges importantes en termes de capacités disponibles, réduisant d’autant plus le besoin d’achat de nouveaux équipements65 (graphique 20). En dépit d’un environnement de taux bas, le secteur de la construction — qui devait être l’un des principaux moteurs de la reprise — pourrait pâtir d’un ralentissement dans l’immobilier dû à une baisse de la confiance des ménages. De plus, de nombreuses entreprises devront reconstituer leur trésorerie, accroître leur épargne de précaution et une fois que l’activité se sera normalisée, honorer les engagements suspendus pendant la crise66.

Les entreprises pourraient aussi rencontrer davantage de difficultés à actualiser leurs anticipations de la demande. En plus de perspectives de croissance à court terme plus dégradées, elles devront composer avec une incertitude plus grande concernant la fréquence et les effets sur l’activité des pandémies à venir. Par ailleurs, la confiance des entreprises pourrait mettre du temps à rebondir, surtout si l’incertitude politique demeure élevée, que l’avancée des réformes est perturbée et que la monnaie demeure faible et volatile67. Devant tous ces sujets d’inquiétude, certains projets du secteur privé pourraient, en fin de compte, être suspendus.

Dans ces conditions, les entreprises pourraient attendre de l’État qu’il fasse le premier pas en engageant une politique de relance vigoureuse. Cependant, même si les dépenses sociales sont susceptibles d’augmenter, les pouvoirs publics ne disposent plus de la marge de manœuvre, qui était la leur en 2009, pour mettre en place des politiques contracycliques susceptibles d’accélérer la reprise. De plus, l’équipe économique a déclaré ne pas vouloir répéter les erreurs du passé en pérennisant des mesures temporaires au point d’en faire des dispositifs à part entière de la politique économique. Faute de budget, l’État devrait se contenter de renouer avec sa politique d’assainissement des finances publiques et favoriser de ce fait la convergence vers le nouveau policy mix.68

Le très important programme de concessions et de privatisations devrait, néanmoins, permettre d’amortir partiellement le coup porté à l’investissement, à condition qu’il puisse reprendre assez rapidement (2021) et qu’il ne soit pas freiné par les préoccupations des investisseurs concernant la soutenabilité des finances publiques. À cet égard, deux facteurs pourraient compliquer le processus d’ajustement. Premièrement, la situation budgétaire au niveau infranational. Avant l’éclatement de la crise sanitaire, douze États étaient déjà en infraction par rapport aux dispositions de la loi sur la responsabilité budgétaire (les dépenses au titre des salaires de la fonction publique étaient supérieures au plafond de 60 % des recettes courantes nettes); certains d’entre eux pourraient d’ailleurs demander une aide supplémentaire en plus de celle déjà reçue pendant la crise. Deuxièmement, si, en dépit de l’assouplissement des conditions monétaires, les banques commerciales privées se montrent plus prudentes que nécessaire dans l’octroi de financements, le gouvernement pourrait être amené à revoir ses plans visant à réduire le poids des banques publiques au sein du marché du crédit69.

Des séquelles potentiellement durables sur l’investissement et la production

Outre l’impact préjudiciable sur l’investissement à court terme, la crise sanitaire devrait aussi avoir des conséquences structurelles à plus long terme, surtout sur les conditions de l’offre dans l’économie. De nombreux chercheurs considèrent qu’il est encore trop tôt pour évaluer les impacts à plus long terme de l’épidémie de Covid-19 sur l’économie et appréhender la manière dont celle-ci pourrait durablement affecter le comportement des agents économiques70. Toutefois, on peut d’ores et déjà considérer que certains éléments de la crise auront des effets plus atténués tandis que d’autres laisseront des séquelles plus profondes. Pour Boissay et al. (2020), le premier élément positif est que, contrairement aux catastrophes naturelles, les pandémies ne détruisent pas le stock de capital physique. L’autre facteur positif, propre au Covid-19 (contrairement à d’autres pandémies dans l’histoire), est que le taux de mortalité du virus notablement plus faible chez les jeunes, devrait permettre d’atténuer les pertes de main-d’œuvre et, de ce fait, avoir un impact plus limité sur le PIB potentiel.71

Dans le même temps, les épisodes de crise précédents ont montré que les récessions donnent souvent lieu à un phénomène d’hystérèse. Même en cas de reprise plus forte que prévu post-Covid-19, il pourrait en effet y avoir des séquelles persistantes sur l’économie, au point d’affecter la croissance de moyen terme.

Premièrement, sur le marché du travail, on pourrait assister au retrait de certaines catégories de travailleurs au sein de la population active (ex : les travailleurs âgés pourraient décider de prendre une retraite anticipée). Aussi, des résultats empiriques montrent que les femmes ont tendance à être disproportionnellement plus affectées par les crises économiques que leurs homologues masculins ; elles se trouvent notamment plus facilement exclues du marché du travail72. Par ailleurs, plus la période de chômage dure et plus le risque de perte de compétences est grand, ce qui aggrave les difficultés à retrouver un emploi (« érosion du capital humain »). Si l’on ajoute à cela le fait que le Brésil était d’ores et déjà confronté à un problème de chômage persistant (et élevé) avant la crise, et que cette dernière a contribué à fortement augmenter le nombre de « travailleurs découragés », il se pourrait que l’on assiste à une réduction plus durable de la population active, qui serait préjudiciable à la croissance potentielle73. Le manque de visibilité, autant au niveau économique qu’au niveau sanitaire, dans un monde devenu de plus en plus incertain, pourrait aussi affecter la productivité au travail.74

Deuxièmement, des pertes plus durables pour l’économie pourraient résulter des 1/ faillites (« les compétences propres à une entreprise perdant de leur valeur lorsque la société qui les utilise fait faillite »75) et 2/ d’occasions manquées d’accumuler du capital humain en raison de la fermeture des écoles ou des lieux de travail « privant de nombreuses personnes de la possibilité d’améliorer leurs compétences et leur productivité grâce aux programmes d’apprentissage ou à la formation en milieu de travail »76.

Troisièmement, même si le grand nombre de projets d’investissement en infrastructures actuellement à l’étude par les autorités stimulera à terme le taux d’accumulation du stock de capital, son rythme pourrait être moins dynamique que prévu. En effet, si l’on tient compte du fait que les deux dernières récessions ont conduit à une accélération de la désindustrialisation au Brésil entraînant à chaque fois une destruction de capital, mais aussi que l’expansion des capacités de production pourrait être freinée par la faiblesse durable du taux d’utilisation des capacités productives77, alors il parait raisonnable d’anticiper une progression plus lente de l’accumulation du capital. Sur ce dernier point, la Banque mondiale souligne, dans sa publication Perspectives économiques mondiales, que « les faibles niveaux d’utilisation des capacités découragent l’investissement et laissent un héritage de capacités obsolètes ; les anticipations de croissance faible découragent l’investissement et deviennent ainsi auto-réalisatrices »78. Par ailleurs, les « contraintes de trésorerie et la hausse des charges d’exploitation » pourraient amener les « entreprises à reconsidérer leur budget de R&D »79, avec des conséquences défavorables sur la croissance de la productivité.

En fin de compte, s’il est encore trop tôt pour évaluer les dommages à plus long terme associés aux effets de la pandémie80 sur la main-d’œuvre, le capital ou la productivité, il existe de réels risques de voir la crise exacerber de nombreuses faiblesses pré-existantes, notamment en termes d’investissement privé et de croissance de la productivité.

Les analyses empiriques, qui étudient les épisodes de fortes récessions, font également ressortir un risque de « dommages durables pour les niveaux de PIB potentiel », parfois même jusqu’à « quatre à cinq ans après l’événement »81. Dans une certaine mesure, ces enseignements amplifient d’autant plus les enjeux liés à l’approbation du programme de réformes structurelles du gouvernement car celui-ci, en permettant d’améliorer la productivité, pourrait atténuer les dommages sur les perspectives de croissance à moyen terme du pays.

En outre, la compréhension des effets directs et indirects de la crise sur le PIB potentiel, et des canaux de transmission par lesquels les facteurs de production sont affectés, sera d’une importance particulière pour la conduite de la politique monétaire, appelée à occuper une place de plus en plus grande dans le policy mix. « Une mauvaise évaluation de l’output gap » et un « cadre erroné pour orienter les politiques publiques » pourraient autrement avoir des conséquences défavorables sur l’économie82.

Il existe néanmoins des facteurs susceptibles de donner une impulsion à l’investissement

Au-delà du programme pluriannuel de privatisations et de concessions, d’autres évolutions favorables devraient participer à stimuler l’investissement sur le moyen terme et accompagner la transition du Brésil vers un nouvel équilibre macroéconomique :

  • Grâce à une inflation largement maitrisée, la politique monétaire a pu être nettement assouplie au cours des deux dernières années. L’assouplissement monétaire aura par ailleurs participé à accélérer la convergence du taux de change vers un nouvel équilibre (plus bas), ce qui à terme devrait favoriser la compétitivité du pays83. La maîtrise de l’inflation devrait également avoir des effets favorables sur les comportements d’épargne à moyen terme84.
  • Les taux d’intérêt réel et neutre ont considérablement baissé (graphique 21). À cet égard, l’adoption de la réforme des retraites à l’automne 2019 aura contribué, pendant un temps, à réduire le risque souverain à moyen terme et à abaisser, de ce fait, les taux longs. En plus de permettre une diminution des coûts d’emprunt public, la baisse structurelle des taux d’intérêt a aussi permis d’améliorer les conditions de financement des contreparties privées (graphiques 22-23). Suite à la crise sanitaire, l’environnement actuel de taux bas devrait soutenir la reprise dans le secteur de la construction, vecteur on ne peut plus important de l’investissement au Brésil85. La baisse des taux d’intérêt a aussi été à l’origine d’une transformation structurelle des marchés financiers domestiques (voir ci-dessous).
  • Mutation des marchés du crédit. En 2019, et ce, pour la première fois en dix ans, la part du crédit privé a dépassé celle du crédit public, dont la progression (avant l’épidémie de Covid-19) se contractait en termes réels. Par ailleurs, de nombreuses distorsions ont été progressivement levées sur le marché du crédit (un processus entamé sous le gouvernement Temer). Les banques publiques ont notamment procédé à un réalignement progressif de leurs pratiques sur celles du marché. Avec le temps, une plus grande part de l’encours de crédit devrait répondre aux changements d’orientation de la politique monétaire, ce qui devrait permettre de renforcer le canal du crédit.
  • Développement des marchés financiers locaux. Au cours des dernières années, la chute des taux d’intérêt réels a entraîné dans son sillage une baisse des rendements des titres de dette souveraine. Elle a ainsi contribué à déplacer de nombreux investisseurs locaux vers le marché des actions et celui des obligations d’entreprises, donnant lieu à une nouvelle vague d’investissements financiers86. C’est ce qui explique, dans une large mesure, la forte croissance en 2019 de l’indice boursier B3-Ibovespa, qui a crû de 35 % sur l’année. L’appétit accru pour les actifs risqués est une bonne nouvelle pour les entreprises. Celles-ci disposent ainsi de sources de financements plus diversifiées pour financer leurs investissements. L’apparition, ces dernières années, d’émetteurs de taille moyenne — un phénomène nouveau sur le marché de la dette privée brésilien — témoigne de cette évolution.

Face aux contraintes liées à des coûts de financement élevés au niveau local et au manque de profondeur du marché de la dette privée, les entreprises ont longtemps dû emprunter à l’étranger pour se financer. Ces dernières années, elles ont cependant racheté des dollars, remboursé leurs dettes et levé plutôt des fonds sur les marchés locaux87. Les changements dans l’allocation d’actifs des portefeuilles financiers devraient à terme accroître la liquidité sur le marché secondaire de la dette privée.

À son tour, cela permettra d’abaisser encore davantage le coût du capital et de rallonger les échéances des facilités de financement88. Ces dernières années, déjà, certaines obligations d’entreprises (debentures) ont trouvé preneur sur le marché primaire, à des taux inférieurs à l’ancien taux TJLP de référence de la BNDES89. Par ailleurs, la suppression de certains obstacles administratifs propres au marché primaire boursier devrait dans le même temps favoriser la croissance des volumes d’introduction en Bourse dans les années à venir.

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Le taux d’investissement a fortement chuté au Brésil sur la période 2013-2017. Depuis, la reprise reste molle, confrontée à une série d’obstacles conjoncturels et structurels (ex. : sous-utilisation des capacités de production, obstacles liés à l’environnement des affaires, faiblesse du taux d’épargne, etc.). Les anticipations de croissance faible ont également agi comme un frein sur l’investissement des entreprises. L’ajustement budgétaire — engagé par le gouvernement Temer, à la fin de 2016 et renforcé sous celui de Jair Bolsonaro — a eu, dans le même temps, des répercussions défavorables sur l’investissement public comme sur l’investissement privé.

L’aggravation des déséquilibres budgétaires après la crise du Covid-19 va renforcer l’urgence avec laquelle les autorités devront agir pour promouvoir le développement du secteur privé, lever les obstacles à l’investissement et accroître l’épargne domestique. Dans l’immédiat, cependant, le processus de transition sera délicat et les perspectives d’investissement plutôt sombres. En effet, avec une contraction anticipée de l’économie, de l’ordre de 5 à 9 % en 2020, les dommages pour l’investissement des entreprises seront considérables. La récession aura aussi un impact sur l’investissement par ses effets sur les anticipations. Une marge de manœuvre budgétaire limitée et la nécessité d’assainir les finances publiques vont, par ailleurs, freiner l’expansion de l’investissement public.

Malgré quelques facteurs de soutien de nature à encourager l’investissement à moyen terme, la route vers la reprise sera longue. Même en partant du postulat qu’un redressement est à l’œuvre dans le secteur de la construction, que le gouvernement est en mesure de faire approuver ses réformes (favorables au marché) et de poursuivre la mise en œuvre de son vaste programme de privatisations et de concessions et, qu’enfin, un environnement de taux bas est de nature à donner une impulsion à l’investissement privé, il faudra encore du temps avant que la formation brute de capital fixe retrouve son niveau antérieur à 201490. Avant la crise du Covid-19, déjà, le taux d’investissement ne devait pas, selon les prévisions, se redresser avant la deuxième moitié de la décennie, et ce, même dans les scénarios optimistes concernant la trajectoire de croissance économique91.

L’impact durable de l’épidémie de Covid-19 et la lenteur prévue de la reprise de l’investissement posent, de toute évidence, la question des perspectives de croissance à moyen terme du pays. La théorie économique nous enseigne que l’investissement doit être suffisamment élevé pour permettre une croissance future, surtout si la productivité stagne et que la population active se contracte.


1 Harris, B. (2019, October), Bolsonaro’s central bank chief vows to ‘reinvent’ Brazil economy, Financial Times

2 McGeever J. & Ayres M. (2020, January), Brazil bank lending up 6.5% in 2019, default ratio falls to historic low. Reuters : « Les chiffres du ministère de l’Economie, publiés au début de ce mois, montrent que derrière une accélération progressive de la croissance économique au Brésil, se cachent des réalités différentes : le secteur privé progresse au rythme de 2,72 % alors que le secteur public se contracte de 2,25 % ».

3 Au même titre que la définition retenue par le FMI, et sauf indication contraire, le terme « investissement » renvoie principalement, tout au long de l’article, à la formation brute de capital fixe, à savoir l’investissement en actifs physiques, non l’investissement financier, l’investissement en main-d’œuvre ou l’investissement dans la recherche et développement, etc. FMI (2015), World Economic Outlook, April 2015: Uneven Growth: Short-and Long-Term Factors

4 OCDE (2018), OECD economic survey: Brazil 2018

5 Arruda, G. (2019, October), Brazil: Desynchronized Growth. Deep dive, Emerging Markets. BNP Paribas, Markets 360

6 Le transport de marchandises s’effectue à 60 % par camion au Brésil, 90 % hors transport de pétrole brut et de minerai de fer, selon The Brazilian Report. La grève d’une durée de onze jours a donc sévèrement perturbé les chaînes d’approvisionnement et les activités agro-industrielles du pays.

7 Pour plus de détails voir Spilimbergo, A., Srinivasan, K., & Walutowy, M. F. (Eds.) (2018), Brazil: Boom, bust, and the road to recovery, FMI

8 Selon la Banque mondiale, à raison de plus de la moitié du crédit total proposé à des taux administrés/subventionnés, le coût budgétaire correspondant a été estimé à environ 1,5 % du PIB, en 2015, par exemple. Voir Pazarbasioglu-Dutz, C., Byskov, S., Bonomo, M., Carneiro, I., Martins, B., & Perez, A. (2017), Brazil financial intermediation costs and credit allocation, World Bank Discussion Paper.

9 La proposition du président Temer, relative à la réforme de la sécurité sociale et des retraites, quoique beaucoup moins ambitieuse que celle adoptée en novembre 2019 sous l’administration Bolsonaro, a été enterrée précisément parce que le gouvernement n’a jamais réussi à obtenir le soutien du Congrès.

10 La mesure introduite par le gouvernement Temer et adoptée par le Congrès limitait la hausse des dépenses primaires à celle de l’inflation sur une durée de vingt ans.

11 Banque mondiale (2018), Public Policy Notes, Brazil: Towards a fair adjustment and inclusive growth

12 Les multiplicateurs budgétaires des investissements publics et des transferts sociaux sont bien plus élevés que ceux des dépenses courantes ; voir Banque mondiale (2018).

13 Le FMI souligne : « la charge de l’ajustement budgétaire ne devrait pas être supportée par les dépenses publiques d’investissement et les politiques publiques devraient être orientées vers la préservation des dépenses publiques si nécessaires en matière d’éducation et d’infrastructures (principaux déterminants du potentiel de croissance) ». IMF(2018), Regional Economic Outlook, October 2018, Western Hemisphere Department: An Uneven Recovery.

14 La littérature sur les déterminants de l’investissement des entreprises propose plusieurs facteurs à l’origine de la décision d’investissement des entreprises. Nombre de facteurs possibles ont été identifiés et testés, entre autres, la croissance réalisée et attendue du PIB (c’est-à-dire la croissance de la demande), les différentes mesures de l’incertitude (ou de la confiance), les taux d’utilisation des capacités, l’endettement du secteur des entreprises, le coût réel du capital (ou, plus globalement, les contraintes financières), les taxes et exonérations fiscales, le ratio Q de Tobin (soit le rapport entre la valeur de marché d’une entreprise et le coût de remplacement de ses actifs), le taux de change, les taux de rendement, les anticipations de bénéfices. Voir De Vijlder, W. (2016) What is driving corporate investment? Conjoncture, BNP Paribas, pour un récapitulatif et des références bibliographiques, notamment 1/ Bussiere, M., Ferrara, L., & Milovich, J. (2015), Explaining the recent slump in investment: the role of expected demand and uncertainty, Banque de France Working Papers No 571, 2/ Pinto, E. P., & Tevlin, S. (2014) Perspectives on the Recent Weakness in Investment (No. 2014-05-21), FEDS notes, Board of Governors of the Federal Reserve System (US). 3/ Banerjee, R., Kearns, J., & Lombardi, M. (2015), (Why) Is Investment Weak? BIS Quarterly Review, March.

15 D’après Dwyer, R. (2016, May), Brazil: Corporate default fear drives impeachment, Euromoney, plus de 5 500 sociétés ont cherché à se placer sous la protection de la loi sur les faillites pour la seule année 2015 (le plus grand nombre depuis 2008). De plus, les procédures d’insolvabilité et de liquidation sont particulièrement longues (env. 4 ans selon la Banque mondiale) et de nature à freiner l’entrepreneuriat.

16 L’activité de construction résidentielle a pâti 1/ de la contraction des prix et des ventes de logements dans les vingt plus grandes villes du pays pendant la récession, mais aussi 2/ d’importantes réductions des dépenses publiques concernant les programmes de logements à prix abordables (qui représentent la majeure partie de l’activité de construction résidentielle au Brésil). Concernant les immeubles non résidentiels, il y avait déjà des signes d’offre excédentaire avant la récession. La crise a exacerbé les pressions à la baisse des prix, réduisant d’autant plus les incitations à investir en particulier dans le segment de l’immobilier commercial.

17 Anderson P. (2019, November),Brazil Apart, Financial Times; Gamarski R., Andrade V., & Biller D. (2019, March), Elusive Economic Growth Points to Depth of Brazil’s Problems, Bloomberg.

18 Dwyer, R. (2018, April), BNDES embraces its evolution, Euromoney

19 Les taux d’intérêt appliqués aux crédits administrés (earmarked credit) accordés par les banques publiques représentaient, en moyenne, un quart de ceux appliqués aux crédits non-administrés (c’est-à-dire les prêts au prix du marché) selon Pazarbasioglu et al, 2017. Voir aussi OCDE (2018).

20 Les taux longs servant typiquement de benchmark pour l’investissement privé.

21 OCDE (2018)

22 Selon une étude à partir de données d’entreprises, menée par le FMI, l’incertitude des politiques publiques semble avoir un effet significatif sur les niveaux d’investissement dans les secteurs de la santé, l’industrie, l’immobilier et les services aux collectivités. Krznar, M. I., & Matheson, M. T. D. (2018), Investment in Brazil: from crisis to recovery, IMF Working Paper.

23 Krznar, M. I. et al. (2018)

24 Carlos A. Rocca (2019), Ancorar as expectativas de crescimento para destravar o investimento privado, CEMEC. Seminário IBRE (powerpoint).

25 Le taux critique de rentabilité : « le taux de rentabilité que les entreprises exigent pour se lancer dans de nouveaux investissements » Sharpe, S. A., & Suarez, G. (2015), Why Isn’t Investment More Sensitive to Interest Rates: Evidence from Surveys, disponible à SSRN 2667352. Résultats similaires mentionnés dans De Vijlder, W. (2016).

26 Selon laquelle l’investissement au Brésil « 1/ croît avec la hausse des anticipations de croissance et l’augmentation des termes de l’échange (ayant, en particulier, un impact sur les exportateurs de matières premières) et 2/ décroît avec la hausse des taux d’intérêt réels, les coûts unitaires de main-d’œuvre, les prix administrés, l’endettement et l’incertitude des politiques publiques.» Krznar, M. I., et al. (2018).

27 Creel, J., Hubert, P., & Saraceno, F. (2015), Une analyse empirique du lien entre investissement public et privé, Revue de l’OFCE, (8), 331-356

28 In fine les deux mécanismes résultent d’une expansion budgétaire mais dans un cas, l’effet multiplicateur domine tandis que dans l’autre, l’effet sur les taux d’intérêt prime.

29 FMI (2019), article IV Jamaica

30 OCDE (2018). Il convient de noter que les années de taux d’intérêt à deux chiffres ont également attiré l’épargne étrangère. À son point culminant, en 2015, la part de la dette publique détenue par des

non-résidents était d’environ 21 % contre moins de 10 % en 2020.

31 Arnold, J. (2011), Raising investment in Brazil, OECD Economics Department Working Papers No 900

32 Les comportements d’épargne et de consommation des ménages, via des mécanismes d’anticipations, seraient contraints par les équilibres budgétaires présents et futurs. Selon la théorie de l’équivalence ricardienne, lorsque le déficit budgétaire se dégrade (hausse des dépenses ou bien baisse de l’impôt, ou bien les deux), la hausse de la dette peut conduire les agents économiques à augmenter leur épargne de précaution (en anticipation d’une hausse des impôts dans le futur) ce qui à terme pourrait venir comprimer la consommation et ainsi empêcher une hausse de la production et donc peser sur la croissance.

33 Arnold, J. (2011)

34 OCDE (2018) référençant les travaux de Canuto, O., & Cavallari, M. (2017) Long-term finance and BNDES tapering in Brazil (No. 1720), Policy Center for the New South.

35 OCDE (2018)

36 Canuto, O. (2018, November), Is It Finally Getting Easier to Do Business in Brazil? Americas Quarterly

37 Banque mondiale (2016), Global financial development report 2015-16: Long-term Finance, World Bank Publications

38 Crisóstomo, V. L., Iturriaga, F. J. L., & González, E. V. (2014), Financial constraints for investment in Brazil, International Journal of Managerial Finance

39 Kumar, A., & Francisco, M. (2005), Enterprise size, financing patterns, and credit constraints in Brazil: analysis of data from the investment climate assessment survey, The World Bank Working Papers

40 Segura-Ubiergo, M. A. (2012), The puzzle of Brazil’s high interest rates (No. 12-62), FMI Working Papers. Et OECD (2018), Arnold, J. (2011).

41 Cela peut expliquer pourquoi l’investissement des entreprises n’a pas réagi de manière plus nette aux importantes baisses des taux d’intérêt ces dernières années. Par ailleurs, les chercheurs, qui ont étudié l’élasticité des dépenses en capital aux variations des taux d’intérêt, soulignent que les effets des taux d’intérêt sur l’investissement ont tendance à être contrastés : Sharpe et al (2015) notent dans leur étude que la plupart des entreprises prétendent que leurs plans d’investissement sont assez peu sensibles à la baisse des taux d’intérêt et ne seraient qu’un peu plus réactifs aux hausses de taux d’intérêt.

42 Pazarbasioglu-Dutz, C., et al. (2017) and Dwyer, R. (2017, July), Brazilian government to press ahead with reform of TJLP, Euromoney

43 Alberola, E., & Urrutia, C. (2020), Does informality facilitate inflation stability? Journal of Development Economics, 102505

44 Le Brésil a fait quelques progrès dans ces domaines. En 2014, il fallait, en moyenne, 2600 heures pour calculer l’impôt et s’acquitter de ses obligations fiscales, soit deux fois plus de temps que le pays à l’avant-dernier rang, la Bolivie (1025 heures). Concernant le délai nécessaire à la création d’une entreprise, le Brésil se classait en 2016-2017 à la 135e place sur 138 pays (contre 104/141 en 2020) avec 83 jours en moyenne.

45 Cité dans Biller David & Lima M.S. (2019, August), Five Lesser Known Obstacles to Brazil Growth and How to Fix Them, Bloomberg

46 Di Blasi, G. (2014, February), Tackling the patent backlog in Brazil, LISPR review

47 Biller David & Lima M.S. (2019) and Di Blasi, G. (2014)

48 Biller David & Lima M.S. (2019)

49 OCDE (2020), SME and Entrepreneurship Policy in Brazil 2020

50 Nunes, R.D & Romano, R.S. (2019, September), Brazilian Patent Backlog’s Days Are Numbered: Meet The Standardized Office Action Program, Daniel Law

51 Basu, K. (2019, August), Corrupt anti-corruption campaigns, OP-ED, Brookings

52 Canuto, O. (2018, August), Benefits and Costs of Opening Brazil’s Foreign Trade, Blog post. Economonitor and Policy Center for the New South.

53 Sauvage, J. (2019, April), Why government subsidies are bad for global competition, OECD Trade, Opinion. Voir aussi Sorsa, P., Arnold, J. & Garda P. (2020, January), Informality and weak competition: A deadly cocktail for growth and equity in emerging Latin America, VOX EU, CEPR Policy Portal.

54 Mathis, J., & Sand-Zantman, W. (2014), Competition and investment: What do we know from the literature? Institut d’Economie Industielle

55 Voir chapitre 2 de l’étude économique de l’OECD (2018). Pour une analyse plus approfondie du faible niveau d’intégration du Brésil dans le commerce international et des opportunités qu’il a manquées du fait de sa faible ouverture aux échanges commerciaux. Voir aussi World Bank (2018).

56 En supposant que les garanties publiques ne sont pas utilisées.

57 Banque mondiale (2020), LAC Semiannual Report April 2020: The Economy in the Time of Covid-19. A joint product of the Chief Economist Office for Latin America and the Caribbean and the Macroeconomics, Trade and Investment Global Practice.

58 Voir OCDE key country policy tracker et le policy tracker du FMI, pour un résumé des mesures adoptées par les autorités budgétaires et monétaires.

59 La Coface prévoit un bond de +25 % des défaillances d’entreprises dans le monde en 2020 . Coface (2020, June), Coface Barometer: COVID-19 - heading towards a sudden global surge in business insolvencies, Coface Economic Publications.

60 Publié dans un journal local et cité en référence dans Scalzaretto, N. (2020, April). « Covid-19 could push over 2,500 Brazilian companies close to bankruptcy » The Brazilian Report.

61 Scalzaretto, N. (2020, April)

62 Boissay, F., & Rungcharoenkitkul, P. (2020), Macroeconomic effects of Covid-19: an early review (No. 7), Bank for International Settlements. BIS Bulletin No 7

63 Voir les daily briefs - Latin Finance

64 D’après les données de la CNUCED, les IDE représenteraient 25,5 % de la formation brute de capital fixe.

65 De manière plus générale, la faiblesse de l’industrie est un problème de longue date. Pour certains, le secteur ne s’est jamais redressé depuis la crise de 2008-2009. Depuis longtemps, un taux de change surévalué et des taux d’intérêt élevés ont fortement affecté la compétitivité des biens intermédiaires, amenant de nombreux observateurs à penser que le Brésil traversait une période de « désindustrialisation prématurée ».

66 Pour des études faisant ressortir la relation entre l’investissement et l’évolution des niveaux de trésorerie d’une entreprise voir Oliveira, F. N. D. (2019) Investment of Firms in Brazil: do financial restrictions, unexpected monetary shocks and BNDES play important roles? Revista Brasileira de Economia, 73(2), 235-251. Fazzari, S. M., Hubbard, R. G., & Petersen, B. C. (2000) Investment-cash flow sensitivities are useful: A comment on Kaplan and Zingales, The Quarterly Journal of Economics, 115(2), 695-705.

67 Les effets de la volatilité de la monnaie sur la confiance des entreprises est analysé dans de Brouwer, G. (2003) The cost of crises and learning to live with exchange rate volatility: evidence from survey measures of consumer and business expectations, Routledge, London.

68 La charge de piloter l’ajustement économique reviendra donc aux autorités monétaires, dont la politique, ces derniers mois, a porté le taux directeur SELIC nettement en dessous du taux neutre. Les autorités doivent actuellement soupeser les risques de baisses du SELIC face à ceux du redressement de la courbe des taux et ceux d’un nouveau fléchissement de la monnaie.

69 La BNDES connaît déjà un second souffle depuis le début de la crise. Elle accompagne les PME et le secteur des entreprises dans son ensemble grâce à l’octroi de près de BRL 100 mds de financements. Mise à contribution pour le sauvetage des compagnies aériennes Gol, Azul et Latam, elle est également en train de préparer les plans de renflouement des constructeurs automobiles. Depuis 2015, la BNDES a reversé près de BRL 410 mds au Trésor, ce qui a permis à l’administration centrale de réduire son ratio d’endettement. Ces transferts ont à présent été interrompus ; la BNDES a également suspendu son plan de cessions et va probablement monter dans le capital des grandes entreprises confrontées à des difficultés.

70 Boissay, F., & Rungcharoenkitkul, P. (2020)

71 Boissay, F., & Rungcharoenkitkul, P. (2020)

72 Ghosh, J. (2013), Economic crises and women’s work. Exploring progressive strategies in a rapidly changing global environment, UN Women report : « Cela tend à corroborer l’argument précédent selon lequel dès que la crise s’installe et que l’austérité budgétaire se confirme, l’emploi des femmes dans un ensemble de services publics et sociaux est appelé à reculer. Cela ne se traduit pas toujours par une hausse des chiffres du chômage déclaré, d’autant que l’effet dit des « travailleurs découragés », selon lequel ces personnes quittent simplement le monde du travail au lieu de continuer à chercher un emploi, est connu pour être particulièrement important chez les femmes (Seguino 2009). La décision de quitter le marché du travail en période difficile n’est pas souvent un choix purement individuel chez les femmes : elle peut être dictée par des normes sociales, liées au genre, qui incitent les femmes à abandonner l’espace de production aux maris, frères et autres représentants du sexe masculin. »

73 Selon les données de l’IBGE, les « travailleurs découragés » représentaient 25,6 millions de personnes en mai 2020. Toutefois, il convient également de noter que l’adoption récente de la réforme des retraites (qui fixe l’âge minimum de départ à 65 ans pour les hommes et à 62 ans pour les femmes dans le secteur public comme dans le secteur privé, contre un âge de départ moyen antérieur de moins de 55 ans) devrait constituer un facteur atténuant en maintenant davantage de travailleurs dans la vie active.

74 Boissay, F., & Rungcharoenkitkul, P. (2020)

75 Eichengreen B. (2020, April), The Human Capital Cost of the Crisis, Project Syndicate

76 Banque mondiale (2020), Lasting Scars of the Covid-19 Pandemic in Global Economic Prospects, Chapter 3, June Issue

77 En partie, sous l’effet d’un fléchissement de la demande (peut-être dû à des changements d’habitudes de consommation, à l’augmentation de l’épargne de précaution, à la baisse de la confiance, etc..)

78 Banque mondiale (2020)

79 Erken, H. et al. (2020, April), Looking beyond the Covid-19 crisis, Rabobank, Economic Research. See also Portes, J. (2020, June), The lasting scars of the Covid-19 crisis: channels and impacts, VOX EU, CEPR Policy Portal.

80 Comme le souligne la Banque mondiale dans sa publication de juin des Perspectives économiques mondiales, les travaux de recherche sont encore limités concernant l’évaluation de l’impact de la pandémie à moyen et long terme sur la production mais il y aura assurément une littérature de plus en plus abondante sur la question dans les années à venir qui sera utile aux décideurs.

81 Banque mondiale (2020)

82 S&P Global Ratings (2020, April), Economic Research: COVID-19 Deals A Larger, Longer Hit To Global GDP

83 Campos E. (2019, November), Brasil tem que escolher entre céu do juro baixo ou inferno da crise, diz Tony Volpon, Seudinheiro.

84 Dans les épisodes d’hyperinflation, les agents économiques ont historiquement tendance à privilégier des considérations de court terme qui découragent l’épargne.

85 Ce secteur, qui a beaucoup pâti de son implication dans l’opération Lava Jato, commençait à donner des signes de redressement avant l’épidémie de Covid-19.

86 Dwyer (Euromoney). Jusqu’alors, l’investisseur brésilien typique effectue des placements peu diversifiés et principalement dans des titres obligataires au sein desquels les produits de dette publique sont très fortement privilégiés. Par ailleurs, il convient de noter que la quête de rendement dans ce nouvel environnement de taux bas a également donné l’opportunité au souverain d’allonger la maturité moyenne de sa dette.

87 Ceci peut s’apercevoir dans les chiffres des IDE. En 2019, les IDE (USD 72 mds, selon la CNUCED) auraient pu enregistrer une hausse bien plus importante si les entreprises brésiliennes n’avaient pas revu à la baisse leurs opérations de financement par l’intermédiaire de filiales étrangères (comptabilisées dans la partie des prêts intra-groupe des IDE).

88 Comme le souligne Dwyer (Euromoney) : « en 2016, 25 % à peine des émissions d’obligations locales sur le marché primaire étaient achetées par des fonds d’investissement privés. En 2019, ce pourcentage a grimpé à 55 %, tandis que la part détenue par les banques a chuté de 35 % à 10 % à peine. La croissance de la demande (conjuguée à cette baisse des taux d’intérêt) a également permis de rallonger les échéances. En 2018, 31,5 % de l’ensemble des opérations était d’une durée inférieure à trois ans, contre 20,5 % à peine, cette année. Dans le même temps, les opérations assorties d’échéances comprises entre quatre et six ans sont passées à 46,3 %. »

89 Le taux TJLP, un taux subventionné fixé par le Conseil monétaire national, n’est plus en application. Il a été remplacé par le TLP (nouveau taux d’intérêt à long terme) davantage lié aux taux du marché et qui devrait converger vers le rendement de l’obligation d’Etat à 5 ans. Depuis 2018, c’est le nouveau taux de référence pour les prêts accordés par la BNDES.

90 À la fin du T1 2019, le taux d’investissement était de près de 30 % inférieur à son plus haut, atteint au T2 2013.

91 Selon les projections de la banque locale Bradesco : « Sur la base d’un taux de croissance du PIB de 3 % à compter de 2021 et d’une augmentation des investissements de 6 %, le taux d’investissement n’atteindrait de nouveau 20 % que dans la deuxième moitié de la décennie » (mars 2020). Des observations similaires peuvent être faites sur l’évolution du PIB par habitant. Après intégration de la croissance démographique, si la croissance économique annuelle avait progressé de 2 % à compter de 2020, le niveau du PIB par habitant de 2013 n’aurait été atteint qu’en 2026, selon les calculs de GSP. Avec une contraction de 5 %, le « PIB par habitant touchera un point bas à près de 13 % en dessous du niveau de 2013 et il faudra dix ans pour retrouver ce même niveau de 2013 ».

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE