Eco Conjoncture

Polarisation de l’emploi en France : quelle ampleur ?

22/09/2019
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La polarisation de l’emploi désigne la déformation de la structure de l’emploi où, conjointement, la part des emplois situés aux deux extrémités de l’échelle des qualifications augmente et celle des emplois intermédiaires baisse. La polarisation prend donc, théoriquement, la forme d’un U. Empiriquement, les données mettent facilement en évidence la baisse de la part des emplois en milieu de distribution (le creux du U) ainsi que la hausse des emplois les plus qualifiés (la « jambe droite »). Cette semi-polarisation dessine une courbe en J, symptomatique de l’effet « revalorisation », c’est-à-dire de l’élévation globale du niveau de formation et de qualification. En revanche, la « jambe gauche » du U (la hausse de la part des emplois situés dans le bas de l’échelle) est souvent moins développée, voire inexistante. En France, selon les études, la polarisation apparaît plus ou moins marquée. Les explications sont multiples : aux effets du progrès technique, semble-t-il dominants, s’ajoutent ceux de la mondialisation et un ensemble de facteurs institutionnels et structurels, comme la régulation du marché du travail, la tertiarisation ou le vieillissement démographique.

Il n’y a pas que le nombre d’emplois créés ou détruits qui compte : le type importe tout autant. A cet égard, le phénomène de polarisation de l’emploi fait l’objet d’une attention croissante depuis une quinzaine d’années. Ce terme désigne la déformation de la structure de l’emploi en faveur des emplois situés en bas et en haut de l’échelle des qualifications et des salaires associés, et en défaveur des emplois intermédiaires. La caractérisation et les causes de ce phénomène sont l’objet premier des travaux de recherche. L’intérêt qui lui est porté vient aussi des questions et des inquiétudes structurantes qu’il sous-tend, en termes notamment d’accroissement des inégalités salariales, d’attrition de la classe moyenne, d’alimentation du sentiment de déclassement. La problématique de la polarisation de l’emploi n’est pas seulement économique : s’y mêlent aussi des considérations sociales et politiques.

Il ne s’agit pas ici de traiter l’ensemble de ces aspects. Cet article vise à mieux cerner l’ampleur du phénomène en France au travers d’une revue (non exhaustive) de la littérature. Le sujet est vaste et complexe : la polarisation ne se mesure ni ne s’explique facilement. Nous commençons par des éléments de définition. La deuxième partie est consacrée aux observations empiriques et la troisième recense les principaux facteurs explicatifs. Nous concluons par quelques éléments de prospective sur les effets de la révolution numérique en cours sur la polarisation.

Qu’est-ce que la polarisation ?

Selon nos recherches, la terminologie « polarisation de l’emploi » revient à Goos et Manning (2003)[1]. Ils désignent ainsi le processus de déformation de la demande de travail due à l’impact de la technologie en général, et des ordinateurs en particulier. Dans les grandes lignes, il aurait pour effet, d’un côté, d’augmenter la demande relative de travail qualifié et peu qualifié et, de l’autre, de réduire la demande relative de travail moyennement qualifié. Il s’en suit une déformation de la structure de l’emploi, avec une hausse de la part des emplois aux deux extrémités de l’échelle des qualifications (et des salaires) et une baisse conjointe de la part des emplois intermédiaires. La polarisation prend donc, théoriquement, la forme d’une courbe en U. C’est l’observation de ces trois évolutions - les trois parties du U - qui qualifie le phénomène de polarisation. Si une seule ou même deux de ces évolutions sont observées, il n’y a pas, à proprement parler, polarisation de l’emploi.

Le niveau de qualification de la profession peut être appréhendé par le diplôme[2], la rémunération (salaire moyen ou médian dans les différentes professions constaté au début de la période d’observation[3]) ou d’après des classifications sociales du travail (cf. le tableau 1 qui détaille les principales professions selon la nomenclature internationale ISCO – International Standard Classification of Occupations). En France, les classifications de référence sont la classification PCS (professions et catégories socio-professionnelles) et les « familles professionnelles », qui sont des regroupements plus larges de métiers.

Classification internationale des professions (ISCO-88)

La polarisation à l’épreuve des données

La polarisation est plutôt bien établie aux Etats-Unis, où le phénomène apparaît dès les années 1980, ainsi qu’au Royaume-Uni. Il a notamment été mis en avant par David Autor et ses co-auteurs (2013) [4], dont les travaux montrent une courbe en U, caractéristique de la polarisation, particulièrement bien dessinée (cf. graphique 1). Entre 1980 et 2005, la hausse de la part des professions peu qualifiées, d’un côté, et qualifiées, de l’autre, est d’ampleur comparable, et le creux est relativement marqué sur une bonne portion de la partie intermédiaire de la distribution. Cependant, même aux Etats-Unis, la polarisation n’est pas un processus uniforme dans le temps et pour l’ensemble des qualifications (Autor, 2014[5]). Elle n’est pas non plus incontestée[6] .

Polarisation aux Etats-Unis : changement de la part dans l'emploi des professions selon leur qualification (période d'observation : 1980-2005)

Le phénomène de polarisation a atteint l’Europe dans les années 1990, comme le montrent notamment les travaux de Marteen Goos et de ses co-auteurs. La polarisation s’y observe toutefois de manière moins évidente qu’aux Etats-Unis, en particulier en France. La courbe en U se dessine plus ou moins nettement. C’est, pour partie, fonction de la façon d’appréhender la structure des qualifications : en termes de caractéristiques des individus (au travers des diplômes, de l’expérience), du travail effectué (au travers des compétences requises) ou de l’emploi occupé (au travers du salaire). Les résultats semblent également sensibles à la période d’observation et dépendre de l’agrégation plus ou moins importante des données.

Dans l’ensemble, les données mettent facilement en évidence le creux du U (la baisse de la part des emplois en milieu de distribution) ainsi que sa « jambe droite » (la hausse de la part des emplois en haut de l’échelle). Cette semi-polarisation dessine une courbe en J, symptomatique de l’effet « revalorisation », c’est-à-dire de l’élévation globale du niveau de formation et de qualification. En revanche, la « jambe gauche » du U (la hausse de la part des emplois dans le bas de l’échelle) est souvent moins développée voire inexistante. Nous avons ordonné ci-dessous les résultats des travaux passés en revue par ordre croissant de « netteté » de la polarisation de l’emploi en France, illustrée par un graphique représentatif à chaque fois qu’il était possible de le reproduire.

Une semi-polarisation en forme de J…

Nous commençons notre revue de littérature par l’étude d’Ast (2015)[7] qui se distingue par la durée de la période d’observation, trente ans, de 1982 à 2012. D’après l’auteur, l’emploi en France ne présente pas tous les signes de la polarisation. L’emploi a effectivement fortement progressé dans la quasi-totalité des métiers les plus qualifiés mais, du côté de l’emploi peu qualifié, les évolutions sont plus hétérogènes (baisse dans certains métiers peu qualifiés de l’industrie et de l’agriculture, hausse dans certains métiers peu qualifiés du tertiaire). Dans l’agriculture, l’industrie, le bâtiment et les travaux publics, l’emploi a eu tendance à augmenter de façon quasi linéaire avec le niveau de qualification. C’est dans le tertiaire qu’une forme de polarisation se dessine (de façon plus particulièrement nette dans les années 1990). Jolly (2015)[8] conclut également à une polarisation peu marquée en France, en forme de J, sur sa période d’observation 1993-2010.

Berger et Pora (2017)[9], qui recourent aux catégories socioprofessionnelles, ne mettent pas non plus clairement en évidence de polarisation de l’emploi en France sur la période observée, entre 1988 et 2014 (cf. graphique 2). D’après leurs calculs, la part des groupes de salariés aux rémunérations intermédiaires aurait même moins baissé que celle de leurs homologues les moins bien rémunérés. Le bémol de cette étude est qu’elle n’inclut pas les salariés des particuliers-employeurs par manque de données et de comparabilité sur l’ensemble de la période. Cette omission contribue probablement à tronquer la polarisation analysée, ces emplois peu qualifiés faisant partie de ceux dont le nombre a le plus augmenté sur la période.

France : évolution de la structure de l'emploi par catégories socio-professionnelles détaillées (période d'observation 1988-2014)

L’approche par profession d’Eurofound (2017)[10] se distingue par son caractère plus agrégé (répartition, en fonction du salaire horaire moyen, en cinq groupes égaux, représentant chacun 20% de l’emploi en début de période), un recul historique plus limité (la période d’observation débutant en 2008) mais des données plus récentes (jusqu’en 2016) et un découpage par période intéressant. La conclusion est toutefois similaire aux études susmentionnées : la polarisation de l’emploi en France n’est pas nette, hormis entre 2008 et 2010 où elle dessine clairement un U (cf. graphique 3).

Sur les deux autres sous-périodes (2011-2013, 2013-2016), les évolutions sont assez contrastées d’un groupe de professions à l’autre, de telle sorte que, sur l’ensemble de la période d’observation 2008-2016, ce n’est ni un J, ni un U qui se dessine, mais un W (cf. graphique 5). A titre de comparaison, au niveau européen, c’est une polarisation en forme de J qui ressort sur l’ensemble de la période (cf. graphique 5). Sur la période la plus récente, tous les types d’emploi progressent même si le cinquième quintile se démarque toujours favorablement (cf. graphique 4), une progression généralisée à l’image de celle observée avant la grande récession, entre 1998 et 2007.

France: évolution de la structure de l'emploie par quintile de salaire et sous-période

France - UE : évolution de la structure de l'emploi par quintile de salaire (période globale d'observation : 2008-2016)

… ou une vraie polarisation en forme de U

UE : évolution de la structure de l'emploi par quintile de salaire et sous-période
Polarisation de l'emploi en France : une illustration à la Autor et Dorn (période d'observation : 1990-2012)

Parmi les études mettant en évidence une polarisation de l’emploi en France, nous mentionnons en premier celle de Catherine, Landier et Thesmar (2015) [11] car la représentation graphique proposée est la plus proche de la courbe en U à la Autor et Dorn (cf. graphique 6).

Nous nous intéressons ensuite aux travaux de Goos et al. (2009[12], 2014[13]). Ils sont les premiers à avoir cherché à évaluer à quel point la polarisation était spécifique aux pays anglo-saxons ou, au contraire, plusrépandue et frapperait aussi l’Europe. Ils concluent que la polarisation est la règle plutôt que l’exception. Notre lecture de leurs résultats de 2009 est moins affirmative : leurs premiers travaux (qui couvrent la période 1993-2006) montrent une polarisation davantage en J qu’en U pour l’ensemble de l’UE, et en France en particulier, et un diagnostic plus hétérogène qu’homogène entre les seize pays européens sous revue (cf. graphique 7). La baisse des emplois au milieu de la distribution est le seul point commun. En revanche, dans la version de 2014 de leurs travaux (qui porte sur une période de quatre années plus longue, 1993-2010), la polarisation est plus nette et homogène et la France ne fait pas exception (cf. graphique 8).

Polarisation de l'emploi en Europe : une illustration par grand groupe de professions selon leur rémunération (période d'observation : 1993-2006)

L’OCDE (2017) [14] procède aussi à un découpage en trois groupes de professions, en fonction du niveau de qualification et non du niveau de rémunération comme Goos et al.. Un large spectre de pays développés est couvert et la période d’observation est assez longue (1995-2015). De cette façon, la polarisation de l’emploi ressort comme un phénomène généralisé et relativement marqué (cf. graphique 9). Les graphiques de type OCDE ou Goos et al. présentent l’avantage d’être visuels (la polarisation se dessine nettement) mais l’agrégation importante des données masque des détails intéressants : tous les emplois sous-qualifiés ou intermédiaires ne sont pas logés à la même enseigne.

On le voit particulièrement bien dans l’étude de Peugny (2018) [15] qui présente l’avantage de travailler à la fois sur un niveau plus important de désagrégation des données[16] et en comparaison européenne (cf. graphique 10). La baisse de la part des ouvriers qualifiés et la hausse de celle des cadres (dans une ampleur plus ou moins grande) est la seule tendance commune aux quinze pays européens sous revue. La hausse de la part des professions peu qualifiées et celle des employés qualifiés des services, alliée à la baisse des employés administratifs, est une tendance quasi-générale. L’évolution est plus différenciée du côté des indépendants (artisans et commerçants) et des professions intermédiaires salariées. Dans cette diversité, le U de la polarisation est particulièrement bien dessiné en France. De manière complémentaire, Peugny cherche aussi à évaluer la polarisation sous l’angle des conditions d’emploi, au travers de la fréquence des temps partiels subis.

Polarisation de l'emploi en Europe : une illustration par grand groupe de professions selon leur rémunération (période d'observation : 1993-2010)

Polarisation de l'emploi dans l'OCDE : une illustration par grand groupe de professions selon leur qualification (période d'observation : 1995-2015)

Polarisation de l'emploi en Europe : une illustration par groupe détaillé de professions (période d'observation : 1999-2013)

Sous cet angle, la polarisation est particulièrement marquée en France et en Espagne, ce qui l’amène à la conclusion, assez sombre, d’un cumul dans ces deux pays du développement d’un secteur tertiaire aux professions mal rémunérées et d’un chômage de masse, contredisant les anticipations selon lesquelles le premier résoudrait le second.

Nous terminons notre revue de littérature par les travaux sur la France d’Harrigan, Reshef et Toubal (2016)[17] et Reshef et Toubal (2019) [18], qui se distinguent, notamment, par le niveau de détail de leurs données permis par l’exploitation de la DADS (déclaration annuelle des données sociales). Chaque emploi dans la DADS est identifié par un code PCS à deux chiffres : vingt-deux types de professions du secteur privé sont ainsi répertoriés, les professions agricoles, libérales et du secteur public étant mises de côté (cf. tableau en annexe pour le détail des intitulés et les données sous-jacentes aux graphiques).

Les auteurs concluent à une polarisation claire et rapide de l’emploi en France depuis le milieu des années 1990, d’ampleur comparable au mouvement américain. Dans leur publication de 2016, ils en font une représentation graphique intéressante, en trois dimensions. En plus des deux dimensions habituelles de l’évolution de la part dans l’emploi de chaque profession (en ordonnée) en fonction de leur niveau de qualification-salaire (en abscisse), ils font apparaître le poids dans l’emploi de chaque profession (cf. graphique 11). La distinction entre secteur non-manufacturier et secteur manufacturier est également intéressante. Il en ressort que le phénomène de polarisation s’observe dans le premier secteur mais pas dans le second (cf. graphiques 12, 13). Et dans leur mise à jour de 2019, les auteurs mettent en avant l’accentuation de la polarisation depuis la crise de 2008 (cf. graphiques 14 à 16). La déformation de la structure de l’emploi sur la première période étudiée (1994-2007) s’est produite sur une durée de treize ans tandis que les évolutions observées sur la seconde période (2008-2013) se sont produites en cinq ans. En particulier, le rythme annuel de baisse de la part des ouvriers qualifiés et, dans une moindre mesure, des emplois intermédiaires est plus rapide sur la période récente.

Eléments d’explication

Dans les travaux de recherche passés sous revue, le progrès technique est l’explication première avancée au phénomène de polarisation. Mais, au regard de la diversité importante des situations d’un pays à l’autre, il ne s’agit que d’une explication parmi d’autres et pas nécessairement la plus importante. L’explication peut varier selon la partie de la courbe considérée : les raisons qui poussent à la hausse les emplois se situant en haut et en bas de l’échelle et à la baisse ceux du milieu ne sont pas forcément les mêmes. Les forces à l’œuvre peuvent interférer les unes avec les autres, mais aussi avec d’autres éléments jouant dans l’autre sens. Et ce qui a pu jouer à un moment peut être remplacé par un autre facteur à une autre époque : Mandelman (2013) [19] voit ainsi un effet du progrès technique dans la polarisation de l’emploi aux Etats-Unis au cours des années 1980, puis de la mondialisation dans les années 1990 et enfin de la « croissance à crédit » dans les années 2000.

Le changement technologique

La théorie du changement technologique biaisé en faveur du travail qualifié (SBTC – Skill-Biased Technological Change) est communément avancée comme première explication du phénomène de polarisation de l’emploi. Elle n’est toutefois qu’une explication partielle : elle sous-tend effectivement, pour partie, le développement de la « jambe droite » du U mais elle ne permet pas de comprendre celui de la « jambe gauche ». Les travaux d’Autor, Levy et Murnane (2001, 2003) [20]apportent des éléments d’explication complémentaires en regardant de plus près les effets spécifiques de l’informatisation et le type de tâches remplacées par les ordinateurs. Ils distinguent ainsi les tâches routinières des non-routinières, mais aussi selon qu’il s’agit d’un travail intellectuel (cognitif) ou manuel. Leur idée est que les ordinateurs se substituent au travail humain routinier (répétitif, régi par des règles explicites donc codifiable et automatisable), qu’il soit intellectuel (compter, saisir des données ou des informations) ou manuel (travail à la chaîne, cueillette, tri) tandis qu’ils sont complémentaires des tâches non-routinières, qu’elles soient intellectuelles (diagnostic médical, travail juridique, gestion d’équipe) ou manuelles (chauffeur routier, services de nettoyage et d’entretien, services à la personne).

Selon cette grille de lecture (dite « hypothèse ALM »), le progrès technique n’est pas seulement biaisé en faveur du travail qualifié : il l’est aussi en faveur du travail non-routinier[21]. La demande relative de travail aux différents niveaux de qualification s’en trouve modifiée. La modification se fait en faveur du haut et du bas de l’échelle des qualifications, où les emplois sont plutôt de type non-routinier non-automatisables ; elle se fait en défaveur du milieu de l’échelle où se situent généralement les emplois routiniers automatisables. Dit autrement, les emplois qui se développent le plus sous l’effet du progrès technique sont ceux qui requièrent le plus de tâches non-routinières, car non-automatisables, et ces emplois se situent en haut et en bas de l’échelle des qualifications (et des salaires).

A contrario, les emplois qui disparaissent sous l’effet du progrès technique sont ceux qui comportent le plus de tâches routinières et donc automatisables. Ces emplois se situent généralement en milieu de distribution. On retrouve bien là la description du phénomène de polarisation.

Catherine, Landier et Thesmar (2015) avancent aussi l’argument d’un effet de bascule des personnes dont l’emploi routinier disparaît vers les emplois du bas de l’échelle. Leur identification détaillée des PCS peu ou pas qualifiées (avec un salaire inférieur à 1,5 SMIC), en essor et en recul entre 1990 et 2012, a également retenu notre attention (cf. tableau 2). Au travers d’exemples concrets, elle rend bien compte de l’effet différencié du progrès technique. Tous les emplois non-qualifiés ne sont pas identiquement menacés : ceux automatisables voient effectivement leur nombre baisser mais ils sont remplacés par d’autres emplois non-qualifiés non-automatisables. De plus, d’après les auteurs, il existerait en France un important déficit d’emplois de ce type (estimé à quatre millions), soit autant d’emplois potentiels à créer.

Professions peu qualifiées en progression et en recul

La globalisation

La mondialisation, la concurrence des pays à bas coûts, les délocalisations et l’externalisation qui s’ensuivent, constituent le deuxième ensemble de facteurs explicatifs de la polarisation. Sachant que mondialisation et progrès technique sont liés et que les effets de la première, en termes de polarisation de l’emploi, s’ajoutent et se mêlent à ceux du second.

Comme le progrès technique, la mondialisation modifie la demande relative de travail, en faveur du travail qualifié et peu qualifié et en défaveur du travail moyennement qualifié, avec pour élément différenciant le caractère « délocalisable », ou non, de l’emploi. Ce dernier le sera d’autant plus qu’il est routinier et réalisable à distance, à moindre coût : à la substitution capital / travail s’ajoute une substitution travail / travail ou, plus précisément, importation / travail. Les emplois en milieu de distribution sont les plus concernés. En revanche, l’emploi sera d’autant moins susceptible d’être délocalisé qu’il implique des relations humaines de proximité, des interactions en face-à-face, une activité sur place, locale, de prestations de services non-échangeables. De nombreux emplois du bas de l’échelle sont de cette nature et se développent à l’abri de la mondialisation. A l’autre bout de l’échelle, l’effet positif vient des nouveaux besoins d’emplois qualifiés générés, par exemple, par la plus grande taille des entreprises, leur internationalisation, leur structure plus complexe. Plus globalement, le développement des exportations et l’accès à de nouveaux marchés est généralement considéré comme créateur d’emplois, tandis que l’effet des importations est plus ambiguë. Elles peuvent se substituer à une partie de la production et de l’emploi domestiques mais elles peuvent aussi être un soutien via les gains induits de compétitivité, de productivité et de pouvoir d’achat.

De manière intéressante, Krenz, Prettner et Strulik (2018)[22] analysent les effets des relocalisations permises par les progrès de l’automatisation et de la robotisation. Le phénomène est aussi un vecteur, partiel, de polarisation : s’il n’entraîne pas à la hausse les bas salaires et les emplois du bas de l’échelle des qualifications, il joue favorablement sur le haut de l’échelle.

Les facteurs institutionnels et économiques

La troisième grande famille d’explications met en avant le rôle des institutions et des évolutions économiques. Parmi les aspects institutionnels, l’influence de la régulation du marché du travail (salaire minimum, protection de l’emploi, dialogue social, etc.) et des politiques de l’emploi (baisses de charges en faveur des bas salaires par exemple) est avancée comme un facteur explicatif, non pas de la polarisation elle-même, mais de la différence d’ampleur dans les pays européens par rapport aux pays anglo-saxons. Mais s’il y a accord sur l’existence d’un effet, il n’y pas consensus sur son caractère aggravant ou limitant pour la polarisation. Cela dépend de ce que l’on regarde.

Dans les articles passés en revue et abordant ce point, les éléments de régulation sont considérés comme favorables aux emplois les plus qualifiés et comme un frein à la création d’emplois peu qualifiés, le SMIC étant plus spécifiquement pointé du doigt. La polarisation s’en trouve limitée (plus exactement, le développement de la jambe gauche du U), une évolution présentée comme négative en termes de dynamique de l’emploi. Mais si l’on regarde la polarisation sous l’angle des inégalités salariales, de leur creusement, et de l’attrition des classes moyennes, alors l’effet limitant du SMIC sur la polarisation est une évolution positive puisqu’il permet de préserver les revenus situés en bas et en milieu de distribution. Par ailleurs, les politiques d’enrichissement du contenu en emplois de la croissance et les mesures d’accroissement de la flexibilité du marché du travail (essor des contrats courts, précarisation de l’emploi) soutiennent la croissance des emplois en bas de l’échelle.

Participent également à la polarisation de l’emploi les mutations économiques et sociodémographiques structurelles suivantes : le vieillissement de la population ; l’évolution des structures familiales et sociales ; l’élévation du niveau de richesse économique, l’évolution des besoins, des styles de vie, des modes de consommation, le développement des services à la personne qui en découle ; l’élévation du niveau de formation ; l’augmentation du taux d’emploi des femmes ; l’immigration ; la tertiarisation ; l’« ubérisation », plus récemment.

Enfin, un creux conjoncturel, et la crise de 2008 en particulier, est un autre facteur de polarisation. La partie de la courbe plus spécifiquement concernée est le creux du U, qui se trouve accentué, car les emplois de qualifications moyennes, déjà affectés par l’automatisation et la mondialisation, apparaissent comme les plus sensibles au cycle, en partie parce qu’ils tendent à se situer dans les secteurs d’activité eux-mêmes les plus cycliques, comme l’industrie et la construction[23].

Quelle cause prédomine ?

Dans notre revue des études qui cherchent à quantifier l’effet des différents facteurs, la technologie ressort, le plus souvent, comme le facteur explicatif dominant de la polarisation de l’emploi mais le consensus n’est pas total.

Commençons par les travaux d’Albertini et al. (2017)[24], qui comparent les marchés de l’emploi américain et français. D’après ces auteurs, une polarisation en apparence similaire (au regard des évolutions relatives de la part de l’emploi manuel, routinier et abstrait selon leur typologie) est observée des deux côtés de l’Atlantique mais elle n’est pas due aux mêmes forces. En France, elle serait principalement la conséquence des institutions du marché du travail et de leur évolution au fil du temps tandis qu’aux Etats-Unis elle serait avant tout le résultat du progrès technique et de l’élévation du niveau d’instruction. Si l’on s’arrête sur le cas français, d’après Berger et Pora (2017) comme d’après Harrigan, Reshef et Toubal (2016), le progrès technique (l’automatisation) est le facteur explicatif dominant. Quant à la mondialisation, Harrigan et alii montrent que ses effets « polarisants » ne sont importants que dans le secteur manufacturier.

Plus surprenantes sont les conclusions opposées de l’étude de Cedefop (2011) [25] et des travaux de Goos et al. (2010)[26] . Pour le Cedefop, la polarisation de l’emploi observée en Europe sur la période 1998-2008 serait principalement imputable aux facteurs sociaux-démographiques et institutionnels comme le vieillissement de la population, les institutions du marché du travail et les politiques de l’emploi, ou encore l’immigration. Le rôle de la technologie serait moindre et plus incertain. Plus exactement, le changement technologique jouerait un rôle important dans la hausse du nombre et de la part des professions les plus qualifiées mais pas dans celle des professions élémentaires. Pour Goos et al., dont le terrain d’observation englobe l’Europe sur la période 1993-2006, c’est, au contraire, l’effet de la technologie (l’hypothèse ALM) qui prédomine. L’impact des délocalisations est estimé moindre et les institutions du marché du travail (au travers des différences et des évolutions des mécanismes de fixation des salaires) ne joueraient guère. En outre, les évolutions de la demande (dues aux changements des prix relatifs des produits, eux-mêmes entraînés par les effets de la technologie et de la mondialisation) contribueraient à atténuer la polarisation[27].

Et demain ?

La révolution numérique en cours et les différentes nouvelles potentialités d’automatisation, robotisation et numérisation qu’elle recouvre suscitent de nombreuses interrogations et de grandes inquiétudes sur l’avenir du travail et la possibilité d’un « futur sans emploi ». En conclusion, nous abordons cette vaste question sous l’angle plus restreint des effets envisageables sur la polarisation, sa possible accentuation ou, au contraire, atténuation.

Le risque d’accentuation de la polarisation de l’emploi vient de la probable destruction accélérée des emplois routiniers, destruction qui pourrait s’étendre à d’autres emplois jusqu’ici préservés mais désormais menacés, par les développements de l’intelligence artificielle (IA) notamment. Certaines professions qualifiées (intellectuelles et scientifiques), au moins certaines de leurs tâches, ne sont, en particulier, plus à l’abri d’être supplantées par l’IA à même d’effectuer des tâches complexes. En forçant le trait, on pourrait dire que le progrès technique est moins biaisé en faveur du travail qualifié ou qu’il l’est différemment car d’autres qualifications sont sollicitées. Les premiers travaux qui ont cherché à estimer l’impact à venir de l’automatisation sur l’emploi, ceux de Frey et Osborne (2013)[28], ont retenu l’attention par leurs résultats alarmistes : 47% des emplois aux Etats-Unis et 35% au Royaume-Uni présenteraient, en effet, un risque élevé d’automatisation, et donc de disparition, à l’horizon des dix ou vingt prochaines années. En suivant la même approche, le cabinet Roland Berger estime ce pourcentage à 42% pour la France[29]. Mais ces travaux raisonnent au niveau de l’emploi et le considèrent comme un tout, entièrement automatisable, ce qui constitue une exagération : chaque emploi/métier est multitâches et certaines sont automatisables, d’autres non.

En mesurant le risque d’automatisation de chaque emploi selon le type de tâches qui le composent, les travaux qui ont suivi aboutissent à des projections bien moins défavorables. Arntz et al. (2016)[30] estiment ainsi que 9% des emplois aux Etats-Unis, et la proportion est similaire pour la France, présentent un risque élevé (supérieur à 70%) d’automatisation. Le Ru (2016) montre également que les emplois les plus facilement automatisables (ceux dont le rythme de travail n’est pas imposé par une demande extérieure exigeant une réponse immédiate et qui consistent à appliquer strictement des consignes) sont moins nombreux qu’il n’y paraît[31]. D’après ses calculs, environ 15% des salariés français occuperaient de tels emplois, une proportion qui serait même légèrement en baisse (-4 points par rapport à 1998) à la faveur de l’évolution des métiers et de leur recentrage sur les tâches les plus difficilement automatisables. De plus, comme le met en avant l’auteur, ce n’est pas parce qu’un emploi peut techniquement être remplacé par une machine qu’il le sera forcément : d’autres facteurs jouent, comme le mode d’organisation du travail, l’acceptabilité sociale, le positionnement en gamme et la rentabilité économique. La faible robotisation de la France comparativement à l’Allemagne en est une bonne illustration.

Le Conseil d’orientation pour l’emploi (COE) s’est également penché sur la question, toujours sur le seul cas français[32]. L’étude, de 2017, insiste sur 1/ la proportion relativement faible d’emplois « exposés » - selon leurs termes, « moins de 10% des emplois existants présentent un cumul de vulnérabilités susceptibles de menacer leur existence dans un contexte d’automatisation et de numérisation » - mais aussi sur 2/ la proportion relativement élevée d’emplois « susceptibles d’évoluer » (« la moitié des emplois existants est susceptible d’évoluer, dans leur contenu, de façon significative à très importante », cf. graphique 17). Pour résumer, comme le formule Le Ru, « la révolution numérique détruit certains emplois, mais surtout elle transforme les métiers ». Dans quel sens cela fera évoluer la polarisation de l’emploi s’avère être une question bien plus ouverte que de prime abord.

France : distribution de l'indice d'automatisation dans la population salariée

Citons aussi les estimations de l’OCDE, pour qui 16% des emplois en France présente un risque élevé d’automatisation à l’horizon de vingt ans et 33% risque d’être profondément transformés, des chiffres légèrement plus élevés que ceux estimés pour la moyenne des pays de l’OCDE (14% et 32%, respectivement) [33]. Toutefois, compte tenu de l’incertitude considérable entourant ce type d’estimations, la différence n’est pas significative. L’étude, menée en 2019 par l’organisation, sur la classe moyenne a retenu plus encore notre attention[34].

Elle apporte, en effet, un éclairage complémentaire en estimant le pourcentage de travailleurs exerçant une profession à risque élevé d’automatisation selon leur position sur l’échelle des revenus. En France, un travailleur sur six de la classe moyenne occuperait ainsi un emploi à risque élevé d’automatisation, une proportion similaire à celle de la moyenne des pays développés (cf. graphique 18). Pour l’OCDE, cette proportion relativement élevée - proche de celle estimée pour les travailleurs du bas de l’échelle des salaires (un sur cinq environ) tandis qu’elle n’est que de un sur dix pour les travailleurs en haut de l’échelle - a de quoi alerter. Les classes moyennes et populaires se rejoignent ainsi dans la même crainte de voir leur emploi détruit par la révolution numérique.

Proportion de travailleurs exerçant une profession exposée à un risque élevé d'automatisation, par catégorie de revenus

Si importants et instructifs soient-ils, ces chiffrages ne sont qu’un côté de la médaille : le progrès technique est aussi créateur d’emplois et, comme l’a rappelé le COE, les études rétrospectives convergent vers un effet net positif. Même la révolution numérique n’a pas que des effets négatifs sur les emplois intermédiaires et les qualifications moyennes. Autor (2015) défend l’idée d’une plus forte complémentarité hommes-machines et d’une multiplication des services associés aux biens favorables aux qualifications moyennes et intermédiaires, ce qui contribuerait à atténuer la polarisation de l’emploi[35]. Pour lui, nombre d’emplois intermédiaires qui resteront et se développeront dans le futur combineront des tâches routinières à des tâches non-routinières pour lesquelles l’homme conserve un avantage comparatif sur la machine (interactions personnelles, flexibilité, polyvalence, résolution de problèmes). Cet avenir positif d’un « homme augmenté » l’emportant sur celui de l’« homme inutile » suppose toutefois de relever le défi majeur de l’adaptation des compétences avec un système éducatif et de formation professionnelle à la hauteur de l’enjeu.

Annexe : Liste des professions et catégories socioprofessionnelles et caractéristiques chiffrées


[1] Marteen Goos et Alan Manning, 2003, Lousy and Lovely Jobs: The Rising Polarization of Work in Britain, Center for Economic Performance Discussion Papers DP0604, décembre

[2] Ce critère est néanmoins peu utilisé du fait de la relation variable entre formation et emploi selon les pays et les métiers. Le lien diplôme-qualification-emploi est aussi perturbé par la hausse de la part des emplois peu qualifiés occupés par des individus diplômés (surqualifiés).

[3] Jolly (2015) liste les bémols du critère du salaire. Il masque la dispersion possiblement importante des rémunérations au sein d’une même profession. Le niveau de salaire à partir duquel on considère un emploi comme peu qualifié, moyennement qualifié, très qualifié est aussi un choix arbitraire et sensible. Une répartition en centile, décile, quintile ou tercile n’aboutit pas aux mêmes résultats. Selon que l’on prend comme seuil, en France, le SMIC ou 1,5 SMIC, les proportions de qualifiés et de peu qualifiés peuvent varier considérablement. La distribution des salaires par profession présente l’avantage de permettre des comparaisons internationales mais elle reflète mal le contenu des métiers et les compétences requises pour les exercer : la qualification ne se résume pas au niveau du salaire, même si l’un va généralement avec l’autre.

[4] David H. Autor et David Dorn, 2013, The Growth of Low-Skill Service Jobs and the Polarization of the US Labor Market, American Economic Review, août

[5] David H. Autor, 2014, Polanyi’s Paradox and the Shape of Employment Growth, NBER Working Paper n°20485, septembre

[6] Cf. par exemple Jennifer Hunt et Ryan Nunn, 2019, Is Employment Polarization Informative about Wage Inequality and Is Employment Really Polarizing ?, NBER Working Paper n°26064, juillet

[7] Dorothée Ast, 2015, « En 30 ans, forte progression de l’emploi dans les métiers qualifiés et dans certains métiers peu qualifiés des services », Dares Analyses n°028, avril. L’auteur étudie l’évolution de l’emploi par familles professionnelles, le niveau de qualification étant appréhendé par le salaire horaire moyen en 1990-1992.

[8] Cécile Jolly, 2015, La polarisation des emplois : une réalité américaine plus qu’européenne ?, document de travail n°2015-04, France Stratégie, août

[9] Emmanuel Berger et Pierre Pora, 2017, Y a-t-il eu polarisation de l’emploi salarié en France entre 1988 et 2014 ? Une analyse selon les catégories socioprofessionnelles et le contenu de l’emploi en tâches, in France, portrait social, édition 2017, Insee Références

[10] Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail. Occupational change and wage inequality: European Jobs Monitor 2017, Research Report.

[11] Sylvain Catherine, Augustin Landier et David Thesmar, 2015, Marché du travail : la grande fracture, Etude de l’Institut Montaigne, février

[12] Maarten Goos, Alan Manning et Anna Salomons, 2009, Job Polarization in Europe, American Economic Review, mai

[13] Maarten Goos, Alan Manning et Alan Salomons, 2014, Explaining Job Polarization: Routine-Biased Technological Change and Offshoring, American Economic Review, août

[14] OCDE, Perspectives de l’emploi 2017, Chapitre 3, How technology and globalization are transforming the labor market

[15] Camille Peugny, 2018, L’évolution de la structure sociale dans quinze pays européens (1993-2013) : quelle polarisation de l’emploi ? , Sociologie n°4, vol. 9. Comme Goos et alii, il exploite les EU-LFS (European Union Labour Force Survey) mais il fait ses regroupements sur la base de la nomenclature socio-économique européenne ESeG et non sur la base d’un indicateur de salaire.

[16] Sept groupes de professions sont ici représentés par souci de lisibilité mais les données sont disponibles pour neuf : cadres dirigeants ; cadres experts ; professions intermédiaires salariées ; artisans et commerçants ; agriculteurs ; employés administratifs ; employés qualifiés des services ; ouvriers qualifiés ; professions peu qualifiées. Les trois pays d’Europe de l’est (Hongrie, République tchèque, Roumanie) ne sont pas non plus représentés. Dans la nomenclature ESeG, les cuisiniers, les employés de l’esthétique, les nourrices et assistantes maternelles, les aides à domicile pour les personnes âgées sont classés parmi les employés qualifiés des services. Les femmes de ménage, les travailleurs du nettoyage et de l’entretien et les employés de commerce sont, eux, classés dans les professions peu qualifiées.

[17] James Harrigan, Ariell Reshef et Farid Toubal, 2016, The March of the Techies: Technology, Trade, and Job Polarization in France, 1994-2007, NBER Working Paper n°22110, mars

[18] Ariell Reshef et Farid Toubal, 2019, La polarisation de l’emploi en France : Ce qui s’est aggravé depuis la crise de 2008, collection du CEPREMAP, Editions Rue d’Ulm

[19] Federico S. Mandelman, 2013, Labor Market Polarization and International Macroeconomic Dynamics, Federal Reserve Bank of Atlanta, Working Paper n°2013-17, décembre

[20] David Autor, Frank Levy et Richard R. Murnane, 2001, The Skill Content of Recent Technological Change: an Empirical Exploration, NBER Working Paper n°8337, juin ; article également publié en novembre 2003 dans le volume 118 du Quarterly Journal of Economics.

[21] Cette théorie est résumée par l’acronyme RBTC (pour routine-biased technological change) ou aussi TBTC (pour task-biased technological change), pour faire pendant au SBTC. Mais il est trompeur dans la mesure où c’est en faveur du travail non-routinier que le progrès technique est biaisé.

[22] Astrid Krenz, Klaus Prettner et Holger Strulik, 2018, Robots, Reshoring, and the Lot of Low-Skilled Workers, Discussion Papers Cege (Center for European Governance and Economic Development Research), n°351, juillet

[23] Christopher L. Foote et Richard W. Ryan, 2015, Labor Market Polarization over the Business Cycle, NBER Working Paper n°21030, mars

[24] Julien Albertini, Jean Olivier Hairault, François Langot et Thepthida Sopraseuth, 2017, A Tale of Two Countries : A Story of the French and US Polarization, IZA Discussion Paper n°11013, septembre

[25] Cedefop, 2011, Labour-market polarisation and elementary occupations in Europe: Blip or long-term trend, Research Paper n°9

[26] Maarten Goos, Alan Manning et Alan Salomons, 2010, Explaining Job Polarization in Europe: The roles of Technology, Globalization and Institutions, CEP Discussion Paper n°1026, novembre

[27] Les auteurs tiennent compte des effets d’équilibre général. Dans ce cadre, tout changement affectant la demande d’un facteur, en l’occurrence un type de travail, est susceptible de se répercuter sur tout autre type de travail via des effets prix, de revenu et de substitution. Par exemple, l’automatisation de la production du hamburger réduit le nombre de personnes nécessaires à sa fabrication mais le prix du hamburger s’en trouve également réduit, ce qui en augmente en retour la demande et le nombre de vendeurs.

[28] Carl Benedikt Frey et Michael A. Osborne, 2013, The future of employment: how susceptible are jobs to computerization?, Oxford Martin Working Paper, septembre

[29] Roland Berger Strategy Consultants, 2014, Les classes moyennes face à la transformation digitale. Comment anticiper ? Comment accompagner ?

[30] Melanie Arntz, Terry Gregory et Ulrich Zierahn, 2016, The Risk of Automation for Jobs in OECD Countries: a Comparative Analysis, OECD Social, Employment and Migration Working Papers n°189, juin

[31] Nicolas Le Ru, 2016, L’effet de l’automatisation sur l’emploi : ce qu’on sait et ce qu’on ignore, note d’analyse n°49, France Stratégie, juillet

[32] Conseil d’orientation pour l’emploi, 2017, Automatisation, numérisation et emploi – Tome 1 : Les impacts sur le volume, la structure et la localisation de l’emploi, janvier

[33] OCDE, 2019, Employment Outlook: The Future of Work

[34] OCDE, 2019, Under Pressure : The Squeezed Middle Class

[35] David H. Autor, 2015, « Why Are There Still so Many Jobs? The History and Future of Workplace Automation”, Journal of Economic Perspectives, volume 29, n°3, été

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