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Défaillances d’entreprises en Europe de l’Ouest : doit-on s’inquiéter de leur remontée ?

16/03/2023

Les défaillances d’entreprises ont connu un début de rebond en Europe de l’Ouest sur l’année 2022. Au Royaume-Uni et en Suède, où la croissance s’est détériorée dès début 2022, elles dépassent même leur niveau d’avant-Covid, avec une hausse plus marquée dans le commerce. En zone euro, les défaillances restent encore inférieures à l’avant-Covid, mais le resserrement en cours des conditions de crédit laisse craindre qu’elles ne se rapprochent de ce niveau en 2023. Ceci vaut aussi pour la France, où les conséquences négatives associées à ces défaillances pourraient être accrues : en effet, ces défaillances prennent la forme d’une liquidation judiciaire dans une proportion plus marquée qu’avant-Covid.

Transcription

Les défaillances d’entreprises sont un indicateur souvent suivi pour évaluer l’intensité du risque de crédit. Elles prennent deux formes principales : la liquidation judiciaire qui s’accompagne de la cessation d’activité, tandis que le redressement judiciaire conduit à un plan de reprise partielle.

En Europe de l’Ouest, ces défaillances ont nettement diminué lors de la période Covid en raison du soutien budgétaire et monétaire mis en œuvre à cette époque. Le retrait de ce soutien a entrainé un rebond des défaillances d’entreprises. Ces dernières atteignent en moyenne un niveau voisin au dernier trimestre 2022 de celui observé au dernier trimestre 2019.

Ceci masque des divergences, avec des pays où ces défaillances dépassent le niveau d’avant-Covid : le Royaume-Uni et la Suède, au contraire des pays de la zone euro.

Le Royaume-Uni et la Suède ont pour point commun d’avoir vu leur croissance décrocher dès début 2022, d’avoir enregistré un pic d’inflation à deux chiffres et d’avoir entamé leur resserrement monétaire plus tôt. Dans ces deux pays, le commerce et la construction connaissent une détérioration marquée. Cette détérioration est proportionnellement plus marquée dans le commerce, en cohérence avec un niveau d’inflation inédit depuis 4 décennies.

En zone euro, plus le temps passe plus le niveau de défaillances se rapproche de celui enregistré avant le Covid-19. Il reste toutefois encore inférieur, particulièrement en raison d’une détérioration des conditions de crédit relativement récente, comme en témoigne l’enquête sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro de la BCE d’octobre 2022.

En France, cet effet contribue à un niveau de défaillances dans la construction accumulé sur les 12 derniers mois qui reste de près de moitié inférieure au niveau annuel moyen entre 2011 et 2015. Cette dynamique encore favorable explique largement pourquoi les défaillances totales restent, sur les deux premiers mois de 2023, inférieures à l’avant-Covid de 8%. A contrario, le commerce a enregistré une remontée des défaillances plus nette et devrait retrouver dès 2023 le niveau d’avant-Covid.

En complément, la forme que prennent les défaillances enregistrées par les entreprises françaises pourrait engendrer davantage de conséquences négatives. Sur les premiers mois de 2023, les liquidations judiciaires représenteraient ainsi près de 74% des défaillances, soit 10 points de plus qu’il y a un an, selon les données des greffiers des tribunaux de commerce.

En conclusion, le rebond des défaillances devrait se poursuivre en France et en Europe de l’Ouest, en raison notamment de l’affaiblissement de la croissance du PIB depuis le 4e trimestre 2022 en zone euro, ainsi que de la poursuite du resserrement monétaire par les banques centrales.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE