Basée à Paris, la Direction des Études Économiques de BNP Paribas est composée d’économistes et de statisticiens :
Les Études économiques ont pour mission de répondre aux besoins des clients, des lignes de métiers et des fonctions de BNP Paribas en matière de recherche économique. Notre équipe d’économistes et de statisticiens couvre un nombre important de pays avancés, en développement et émergents, l’économie réelle, les marchés financiers et l’économie bancaire. Ce site, qui présente nos analyses, nos vidéos et nos podcasts, permet de partager le résultat de nos recherches avec tous ceux qui souhaitent mieux comprendre le contexte économique ou qui s’intéressent à des problématiques spécifiques.
+ 33 1 42 98 26 77 stephane.colliac@bnpparibas.com
Les pays européens limitrophes de la Russie et de l’Ukraine sont plus exposés que ceux situés à l’Ouest. Parmi ces derniers, des divergences existent entre l’Allemagne et l’Italie, plus dépendantes du gaz russe, et la France, l’Espagne et le Portugal, moins exposés. Les pays qui importent le plus de Russie sont également très dépendants des importations provenant d’Ukraine. L’exposition des pays européens à la Russie et l’Ukraine et leur vulnérabilité aux répercussions économiques du conflit entre les deux pays découlent principalement du poids important dans leurs importations des approvisionnements en produits énergétiques russes et en produits alimentaires et agricoles ukrainiens
La France a terminé l’année 2021 avec le taux d’emploi le plus élevé depuis les années soixante-dix, le taux de chômage le plus bas depuis 2008 et un record de créations d’emplois depuis l’après-guerre. Ce dynamisme de l’emploi est imputable pour moitié au rebond des créations d’emplois dans les secteurs les plus affectés par la crise de la Covid-19 (dont la restauration et l’intérim). La pandémie a également soutenu l’emploi dans la santé et l’éducation. Le secteur privé marchand porte néanmoins encore la trace de la crise sanitaire : l’emploi y est inférieur de 1,3% au niveau qu’il aurait atteint si sa croissance observée entre 2017-19 s’était poursuivie jusqu’à fin 2021 (un même calcul sur le PIB réel donne un écart de 2,2%)
La croissance française est restée positive en début d’année 2022, comme en témoignent des enquêtes de conjoncture relativement stables jusqu’en février, tant du point de vue des ménages que des entreprises, ou même du climat de l’emploi. La hausse de l’inflation a été significative, à 3,6% a/a en février, néanmoins la stabilité du tarif réglementé du gaz et la hausse contenue à 4% du prix de l’électricité ont permis de la limiter. D’après le dernier point de conjoncture de l’Insee, l’inflation aurait atteint 5,1% sans ces mécanismes.
La France connait une dégradation structurelle de sa balance commerciale des biens depuis 2015. Son déficit atteint en janvier 2022 le niveau record de EUR 73 mds en cumul sur 12 mois, selon les statistiques de balance des paiements de la Banque de France (EUR 88 mds selon la définition des douanes1). La tendance au creusement du déficit des biens industriels s’est renforcée depuis 2020 avec la baisse des exportations aéronautiques depuis le début de la pandémie de Covid-19. La hausse du prix du pétrole explique l’essentiel de la détérioration observée à partir de novembre 2021.Toutefois, la balance courante, qui synthétise la totalité des échanges extérieurs de la France2, montre un profil différent, avec un déficit limité à EUR 23,4 mds en janvier, en cumul sur 12 mois
D’après les deux indicateurs de santé financière des entreprises - le nombre de défaillances et le taux de marge - la situation des entreprises françaises s’est nettement améliorée entre 2016 et 2021. Le nombre de défaillances a baissé de moitié, permettant de sauvegarder 210 000 emplois sur la période, dont 170 000 au cours de la pandémie. Le taux de marge a augmenté de 1,4 point de pourcentage et le poids de la fiscalité a reflué. La politique budgétaire a joué un rôle majeur avec la baisse des impôts de production et de l’impôt sur les sociétés, ainsi que la hausse des subventions aux entreprises pendant la pandémie. L’année 2022 s’annonce moins favorable, notamment du fait des pressions inflationnistes
Les créations d’emplois au sein de la zone euro ont été très importantes en 2021. Cela a permis de ramener le taux de chômage à un niveau historiquement bas. Mais cette dynamique s’est aussi traduite par des difficultés de recrutement et un manque de main d’œuvre. Les pénuries de main d’œuvre les plus contraignantes frappent l’Allemagne (dans tous les secteurs), en lien avec un faible taux de chômage, et les plus faibles touchent l’Italie dont le marché du travail est le moins dynamique de la zone (hiérarchie vérifiée quel que soit le secteur). En France, les tensions sont plus vives dans le secteur de la construction et plus modérées par ailleurs
Le pouvoir d’achat est un sujet de préoccupation récurrent pour les ménages, que l’envolée actuelle de l’inflation vient exacerber. L’inflation devrait, en effet, dépasser la barre des 3 % sur l’essentiel de l’année 2022, une première depuis 1989. La croissance du revenu disponible nominal des ménages est cependant dynamique, ce qui implique un gain de pouvoir d’achat au niveau macroéconomique : 2,3 % en 2021 et 0,2 % en 2022 selon nos prévisions. Le revenu disponible total des Français est soutenu par une forte création d’emploi. Or, en considérant l’évolution de la rémunération moyenne, le pouvoir d’achat a connu une progression limitée à 1,1 % en 2021 et devrait se contracter de 0,6 % en 2022
Les restrictions sanitaires instaurées pour maîtriser la vague Omicron semblent avoir eu un impact limité sur la croissance française au début de l’année 2022. De plus, la levée progressive de ces contraintes augure d’une ré-accélération. Ces perturbations sont survenues dans un contexte plutôt favorable.
Le thème de la désindustrialisation est souvent abordé en France. De fait, l’industrie manufacturière ne représente aujourd’hui plus que 13% du PIB et 12% de l’emploi salarié (contre près de 19% et 15% respectivement en 2000). L’industrie française a vu ses capacités de production culminer au début des années 2000, avant de connaître de multiples décrochages, en même temps que l’emploi industriel diminuait et que le déficit commercial se creusait. Les capacités de production se sont encore réduites ces dernières années et sont inférieures de près de 20% à ce qu’elles étaient au début des années 2000. Alors que les carnets de commande sont globalement les mêmes qu’en 2018, les capacités de production sont près de 6% en deçà
L’industrie française bénéficie d’un contexte porteur. La production est soutenue par des carnets de commande remplis depuis le printemps 2021 et par une capacité croissante à répondre à cette demande. En effet, l’enquête de l’Insee de janvier 2022 montre un rebond du stock de produits finis à près de 84% d’un niveau de stock normal, un niveau inédit depuis la mi-2020. Le phénomène s’observe singulièrement dans les biens intermédiaires. Dans la chimie, les plastiques ou l’emballage (secteur « bois, papier »), une partie de l’écart avec un niveau de stock normal a été comblé, même si ces stocks restent à un niveau inférieur à la normale. Dans la métallurgie ou les équipements électriques, le niveau très élevé des stocks souligne un niveau d’activité conséquent
L’économie française semble débuter l’année 2022 sous de relatifs bons auspices, nonobstant la mise en œuvre de restrictions plus fortes liées à la vague Omicron. Ainsi, la dynamique favorable perceptible au 4e trimestre (qui devrait être confirmée par la publication du PIB le 28 janvier prochain) semble s’être globalement poursuivie dans l’industrie et la construction. Les carnets de commande restent remplis dans ces deux secteurs, même s’ils continuent de subir des goulets d’étranglement liés à une insuffisance de main d’œuvre et à des difficultés d’approvisionnement.
L’économie ukrainienne a subi une accumulation de chocs externes et domestiques : la pandémie (avec une population encore peu vaccinée), le risque géopolitique et les tensions politiques locales. À ces éléments s’ajoute l’accélération de l’inflation depuis un an. La crise de l’épidémie de Covid-19 a toutefois été nettement mieux absorbée que les crises de 2008 ou 2014. Le solde courant s’est temporairement redressé et les réserves de change se sont accrues grâce, notamment, à la hausse du cours des matières premières (céréales, métaux). Le versement de l’aide internationale (FMI, Union européenne principalement) a apporté le complément nécessaire pour financer, notamment, le soutien budgétaire à l’économie. Toutefois, le pays reste exposé à des arrêts brutaux des entrées de capitaux
Les premières indications pour le 4e trimestre rendent compte du maintien des principaux indicateurs de confiance à un bon niveau, en particulier du côté des entreprises, ainsi que de la poursuite de l’amélioration perceptible depuis plusieurs mois sur le marché du travail. Ainsi, la croissance, qui a été récemment confirmée à 3% t/t au 3e trimestre, devrait aisément atteindre 6,7% sur l’année 2021. La croissance pourrait néanmoins ralentir, comme le suggère notre baromètre, en raison de plusieurs dynamiques. La première tient au décalage entre les carnets de commande et la capacité des entreprises à y répondre rapidement
La Pologne est touchée, comme les autres pays d’Europe centrale, de façon de plus en plus manifeste par les pénuries de biens intermédiaires dans l’industrie. Celles-ci concernent un nombre croissant de composants, que ce soit les semi-conducteurs ou les plastiques. En conséquence, la production automobile est en repli de 15% par rapport à son point haut de la fin 2020, et celle d’équipements électriques de 8% par rapport à son pic de mai 2021. Dans les deux cas, ces baisses ont lieu malgré des carnets de commande relativement pleins. Elles ont, de plus, des conséquences directes sur la balance courante. Cette dernière a, en effet, brutalement basculé d’un excédent de EUR 500 m par mois en moyenne au 1er semestre à un déficit de l’ordre de EUR 1,5 md à partir de juillet
La Hongrie bénéficie à plein du redressement du commerce extérieur, qui tire actuellement sa croissance. Les tensions sur l’offre s’accentuent, avec une forte utilisation des capacités de production et la raréfaction de la main d’œuvre. Ces problématiques locales s’ajoutent à un contexte de pénuries mondiales dans l’industrie. Il en résulte une nette accélération de l’inflation, à laquelle la banque centrale a répondu par une première hausse des taux directeurs en 10 ans. La politique monétaire reste cependant relativement accommodante, car la banque centrale aura acheté pour près de 5 points de PIB de dette publique en 2021
La Turquie bénéficie d’une croissance élevée en 2021 qui fait suite à une relance par le crédit mise en œuvre en 2020. La performance cumulée de 2020-2021 aura permis de combler le retard de croissance lié à une succession de chocs entre 2018 et 2020. L’investissement et l’industrie retrouvent ainsi leurs poids antérieurs. Les réserves de change se sont reconstituées par rapport au faible niveau qu’elles avaient atteint en 2020. Cela a toutefois un prix : l’inflation atteint un niveau nettement supérieur aux autres pays émergents. Aux déterminants communs (remontée du prix du pétrole et des autres matières premières), s’ajoutent des déterminants propres à la Turquie (dépréciation de la livre, changements à contretemps de la politique monétaire)
La Covid-19 n’aura été qu’un frein passager à la croissance polonaise. L’économie surperforme celles de ses voisins, avec une récession plus modérée en 2020 et un rebond plus précoce de l’activité. Le risque de crédit apparaît relativement bien contrôlé malgré une participation élevée des entreprises et des ménages au moratoire de remboursement sur les prêts. Les contraintes d’offre font même craindre un risque passager de surchauffe conjoncturelle avec une hausse de l’inflation. Mais le maintien d’un fort excédent courant et la bonne maîtrise de la dette publique sont des éléments stabilisateurs. Le potentiel de croissance reste inchangé même si la perspective d’une harmonisation fiscale internationale peut ralentir les investissements étrangers.
Le rebond de l’économie roumaine est spectaculaire. Le PIB a déjà retrouvé son niveau pré-Covid et la croissance économique devrait être de 8,2% en 2021. Mais cette performance s’accompagne de déficits budgétaire et externe élevés. En conséquence, la dette publique ne devrait pas se réduire à horizon 2022, contrairement aux autres pays d’Europe centrale. Les emprunteurs qui ont bénéficié d’un moratoire sur les remboursements de dette présentent un taux de créances douteuses élevé (10,9%). Le système bancaire devrait pouvoir les absorber. Cependant, la croissance débridée du crédit à l’immobilier mérite d’être surveillée.
La croissance en Europe centrale devrait s’accélérer de nouveau au 2e trimestre 2021, après déjà une bonne performance au 2e semestre 2020, comme le suggère le taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie. Celui-ci souligne une bonne résilience malgré une pénurie de semi-conducteurs dans l’automobile et une 3e vague de Covid assez sévère au 1er trimestre 2021. L’amélioration de la conjoncture dans l’industrie provient d’un rebond continu de la demande, singulièrement à l’exportation, permettant une activité d’ores et déjà supérieure à l’avant-Covid pour la République tchèque et la Slovaquie, et à peu près équivalente en Pologne et en Roumanie
L’annonce d’un changement de cap de politique monétaire en novembre 2020 avait permis d’apaiser les tensions financières. Avec le remplacement du gouverneur de la banque centrale en mars, l’inquiétude est revenue. La dépréciation de la livre a repris. Les taux d’intérêt et les primes de risque se sont tendus. La priorité sera donnée au soutien de la croissance, au prix du maintien de déséquilibres macroéconomiques élevés. Le risque de crédit ne se reflète pas pour le moment dans le niveau des créances douteuses mais la tolérance, qui permet de reporter leur comptabilisation, prendra fin mi-2021. La reprise observée de l’investissement est nécessaire pour maintenir le potentiel de croissance, mais pas suffisante.
Le pays a relativement bien passé le cap de l’année 2020, nonobstant la récession due à la Covid-19 et le tarissement des entrées de capitaux privés. Avec l’amélioration des termes de l’échange, l’excédent courant a suffi à équilibrer la balance des paiements. L’Ukraine a su bénéficier des progrès réalisés ces dernières années dans la gestion des comptes publics pour obtenir le soutien des bailleurs internationaux. Les défis à venir seront le retour des capitaux, tant privés qu’officiels, et la mise en œuvre des réformes attendues pour favoriser l’investissement et élever le potentiel de croissance. Il sera également important de poursuivre les réformes du secteur bancaire, visant à sa consolidation et à l’amélioration du cadre prudentiel et de supervision.
Le pays a connu une vague de contaminations à la Covid-19 plus sévère au 4e trimestre 2020 qu’au 2e. A contrario, la croissance du PIB a été nettement moins affectée, la production comme la demande (exportations et consommation des ménages) ayant bien résisté. La politique de relance des autorités, ainsi qu’une industrie dont la compétitivité a été peu touchée par la pandémie, ont soutenu l’activité, tandis que l’excédent extérieur s’est fortement accru. Dans ce contexte, la faiblesse relative du zloty provient davantage d’une stratégie visant à soutenir la croissance que de fondamentaux dégradés. L’accord sur le budget européen fera de la Pologne l’un des principaux bénéficiaires du plan de relance, ce qui devrait constituer un soutien additionnel à la croissance.
La croissance tchèque a enregistré des évolutions particulièrement marquées au cours de l’année 2020, amplifiées par le poids du commerce extérieur dans le PIB et par la brutalité de la 2e vague de Covid-19 à l’automne. Le rebond de l’activité au 3e trimestre s’est avéré solide. La production dans l’industrie et les exportations ont notamment affiché une bonne performance, favorisée par un taux de change stable (et des réserves de change élevées). En outre, le gouvernement, aidé par un endettement très modéré, a pu mettre en œuvre un soutien rapide et conséquent à l’économie. Toutefois, le repli de la consommation au mois de novembre souligne la vulnérabilité de la croissance à la pandémie.
Au troisième trimestre 2020, la Turquie avait déjà retrouvé son niveau de PIB d’avant-Covid. Cette « prouesse » s’explique par un soutien conséquent de la politique économique, tant budgétaire que monétaire, qui n’a pas été sans risques. L’inflation n’a pas diminué et le compte courant a de nouveau basculé en déficit, au contraire d’autres pays émergents, ce qui a contribué à la forte dépréciation de la livre turque. Le renforcement de ces tensions a conduit le président Erdogan à changer le cap de sa politique économique. Un policy mix plus rigoureux, avec une politique monétaire plus réactive par rapport à l’inflation, et l’attractivité vis-à-vis des investisseurs étrangers en sont les deux piliers
L’économie hongroise a particulièrement souffert des conséquences de la Covid-19 au 2e trimestre 2020, en raison du poids des exportations dans son PIB. Le choc semble avoir été plutôt bien absorbé, le gouvernement et la banque centrale s’étant attaché en priorité à soutenir le marché du travail, ainsi qu’à appliquer les moratoires de paiements ou de remboursements nécessaires. La relance mise en œuvre l’a été sous contrainte, notamment afin d’éviter une dépréciation trop conséquente du forint. Le désendettement public, interrompu cette année, devrait reprendre ses droits rapidement dans le cadre d’une stratégie inchangée : maintenir une fiscalité modérée afin de continuer à attirer des investissements étrangers dans l’industrie.