ECO FLASH
N°21-01
6 janvier 2021
BREXIT : LE PIRE A ÉTÉ ÉVITÉ
Hubert de Barochez
er
Nous y voilà. Le Royaume-Uni est, depuis le 1 janvier, sorti de l’Union européenne sur le
plan économique. Si le pays avait officiellement quitté l’UE le 31 janvier 2020, une période
de transition l’avait maintenu dans le marché unique et l’union douanière de l’UE jusqu’à la
fin de l’année 2020. Pendant cette période, des négociations ont été tenues afin de définir les
termes de la future relation entre les deux parties. Un accord de commerce et de coopération a
er
Le Royaume-Uni a depuis le 1 janvier
les deux pieds en dehors de l’Union
européenne et un accord de libre-échange
entre les deux parties a été trouvé, telle
semble être la coutume, à la dernière
minute.
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finalement été trouvé entre les négociateurs britanniques et européens le 24 décembre 2020
(
voir encadré). Celui-ci couvre les sujets suivants : les échanges de biens et de services, le
commerce numérique, la propriété intellectuelle, les marchés publics, les transports aérien
et routier, l’énergie, la pêche, la coordination de la sécurité sociale, l’application du droit et la
coopération de la justice en matière pénale, la coopération thématique, et la participation du
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Royaume-Uni dans les programmes de l’UE . Il comprend notamment un accord de libre-échange
sans aucun tarif ni quota. Cela faisait plusieurs semaines que les discussions achoppaient sur
trois points, mais des compromis ont désormais été trouvés.
Si cela est une bonne nouvelle pour les
économies britannique et européenne,
le Brexit est néanmoins « dur » et
s’accompagnera certainement de pertes
économiques importantes dans le long
terme.
Le premier contentieux concernait l’engagement des parties à maintenir un « level playing
field », c’est-à-dire à définir un cadre visant à assurer une concurrence loyale, dans le long
terme. Les Européens souhaitaient initialement que le Royaume-Uni s’engage à maintenir des
standards – environnementaux, sociaux, fiscaux, etc. – équivalents aux leurs d’une manière
dynamique. Cela aurait signifié la possibilité pour les Européens d’appliquer des sanctions de
manière unilatérale dans le cas où les Britanniques décidaient d’abaisser leurs standards ou
même de ne pas suivre l’UE dans l’élévation des siens. De l’autre côté, le Royaume-Uni insistait
sur la nécessité de retrouver une entière discrétion dans l’établissement de sa régulation, en
particulier sur la question des aides d’État. Finalement, les deux parties se sont entendues sur
des « clauses de non-régression », c’est-à-dire sur le fait de maintenir leurs hauts standards
actuels dans la durée. De plus, des principes détaillés en matière d’aides d’État ont été définis
afin d’empêcher qu’une des deux parties n’accorde des subventions entraînant une distorsion
des échanges. Chaque partie aura la possibilité de prendre des mesures de manière unilatérale
afin de protéger son économie contre une concurrence déloyale de la part de l’autre.
Le deuxième point de désaccord concernait le secteur de la pêche. Sur ce sujet, le Royaume-
Uni avait l’avantage puisque les discussions portaient sur l’accès des pêcheurs de l’UE à ses
eaux territoriales. Alors que les Européens demandaient initialement des conditions d’accès
inchangées – c’est-à-dire un accès illimité pour ses pêcheurs –, les Britanniques proposaient
de réduire les quotas accordés aux pêcheurs européens d’au moins 60% et de les renégocier
tous les ans. Finalement, au regard de la capacité limitée des pêcheurs britanniques et de
l’importance pour eux du marché européen, la flotte européenne conservera des conditions
d’accès généreuses au moins jusqu’à juin 2026, ne renonçant d’ici là qu’à environ 25% de ses
quotas. Ce n’est qu’à partir de cette date que des négociations annuelles seront établies.
Enfin, Britanniques et Européens n’arrivaient pas à s’entendre sur la gouvernance de l’accord,
c’est-à-dire sur un mécanisme de résolution des litiges. Comme les Européens le souhaitaient, le
cadre de cette gouvernance sera le même pour l’ensemble de l’accord. Les éventuels désaccords
–
y compris sur les sujets des aides d’État et de la pêche – seront discutés auprès du Conseil du
partenariat, qui sera chargé de veiller à la bonne implémentation de l’accord. Si une solution
n’est pas trouvée, un tribunal d’arbitrage indépendant tranchera, ce dernier ayant par exemple
la possibilité d’imposer des tarifs ou des quotas. Dans le cas où cette décision ne serait pas
respectée par l’une des parties, l’autre aura la possibilité de riposter par des sanctions sur un
autre secteur économique.
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La banque
d’un monde
qui change