Alors que le gouvernement a déjà mis en œuvre une batterie de mesures1 budgétaires pour un montant de EUR 65 mds (soit 1,8% du PIB), Olaf Scholz a annoncé le 29 septembre dernier « une double dose », selon ses propres termes, avec l’instauration d’un bouclier énergétique d’une enveloppe maximum de EUR 200 mds. L’ensemble de l’enveloppe ne devrait pas être consommé, mais seulement la moitié d’après les premières estimations. Ce plan de grande envergure (5,5 % du PIB) doit permettre de subventionner la consommation d’électricité des ménages et des entreprises (environ 80 % de leur consommation habituelle), mais aussi maintenir un taux de TVA sur le gaz à 7 % jusqu’au printemps 2024. Après deux décennies de rigueur, l’Allemagne entre dans une nouvelle ère budgétaire alors que son bien le plus précieux, l’industrie, est en pleine crise.
Le ministre des Finances, Christian Lindner, affirmant ne pas renoncer au « frein à l’endettement », les fonds déboursés prendront la forme de crédits émis depuis un fonds hors budget. Ce jeu d’écriture comptable est une pratique habituelle du gouvernement, déjà mise en œuvre pour le fonds destiné à lutter contre le réchauffement climatique et, plus récemment, pour des dépenses militaires. Mais l’ampleur des déficits de ces fonds spéciaux commence à inquiéter : ils devraient dépasser les EUR 50 mds en 2024, d’après le ministère fédéral des Finances (soit EUR -27 mds pour le fonds dédié au climat et à la transformation, et EUR -24 mds pour le fonds des dépenses militaires).
Dans le même temps, la situation conjoncturelle ne cesse de se dégrader. La production industrielle a reculé de 2% entre janvier et août. La baisse est particulièrement marquée pour les industries très énergivores : -9,3% pour l’industrie chimique et pharmaceutique, -7,5% dans le bois/ papier, -3,1% pour l’aciérie et la métallurgie. Les enquêtes auprès des directeurs d’achat confirment cette contraction puisque le taux d’utilisation des capacités de production a perdu 16 points depuis le début 2022.
De plus, le PMI manufacturier a poursuivi sa détérioration en septembre et s’enfonce en territoire de contraction (-1,3 point à 47,8) pour le troisième mois consécutif. La perte de dynamisme de l’industrie plombe les exportations et l’excédent commercial qui s’est réduit à seulement EUR 1,2 md en août (contre EUR 3,4 mds en juillet). L’institut de Kiel prévoit même que le solde commercial bascule en territoire négatif en octobre pour la première fois depuis 1991. Le climat des affaires, dans les autres secteurs, apparaît tout aussi dégradé. Pire, les anticipations d’activité à 6 mois, mesurées par l’Ifo, sont au plus bas dans tous les secteurs depuis le 1er confinement d’avril 2020. Pour la première fois depuis la crise du Covid-19, d’après l’horloge Ifo, reflétant la position dans le cycle de l’économie, l’Allemagne est entrée en récession.
Les indicateurs du radar sont transformés en « z-scores » (écarts par rapport à la valeur moyenne de long terme exprimée en écart-type). Ces z-scores ont une moyenne de zéro et leur valeur fluctue ici entre -6 et +6. Sur le radar, la zone en bleu indique les conditions économiques actuelles. Elle est comparée aux conditions 4 mois auparavant (pointillés). Un élargissement de la zone bleue indique une amélioration de l’indicateur d’activité.