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Créances douteuses dans l’Union européenne : forte baisse et moindre dispersion depuis 2019

10/07/2025
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Les ratios des prêts non performants (NPL) aux sociétés non financières se sont repliés dans la plupart des systèmes bancaires de l’UE/EEE entre 2019 et 2024. En moyenne, le ratio a nettement baissé pour s’établir à 3,38% au T4 2024 (-2,4 points de pourcentage depuis le T1 2019). Seuls les systèmes bancaires allemand, autrichien et luxembourgeois ont enregistré une hausse mais ils partaient d’un niveau sensiblement inférieur au ratio de NPL moyen de l’UE/EEE.

RATIOS ET VARIATIONS DES CRÉANCES DOUTEUSES AU SEIN DES SYSTÈMES BANCAIRES DE L’UNION EUROPÉENNE

Une homogénéité régionale se dessine

Une dichotomie peut être observée entre les systèmes bancaires situés plutôt au nord-est de l’Europe et ceux situés plus au sud. Les ratios de NPL des premiers étaient initialement assez faibles et ont peu baissé entre 2019 et 2024, tandis que les ratios des seconds étaient à la fois plus élevés historiquement et en plus forte baisse sur la période. Enfin, les systèmes bancaires du cœur de l’Europe affichaient des ratios non seulement proches de la moyenne de la zone euro mais avec des variations (hausses ou baisses) d’amplitude plus modérée entre 2019 et 2024 ; ces pays centraux géographiquement se distinguent également par une proportion sensiblement plus élevée de prêts à taux fixe. Cela illustre le caractère protecteur des taux fixes pour les emprunteurs et, en conséquence, le moindre impact de la hausse des taux d’intérêt sur les ratios des créances douteuses.

Vers une moindre divergence ?

Tandis que la dichotomie entre les systèmes bancaires du nord-est et du sud de l’Europe était déjà visible avant la pandémie, la dispersion entre les deux groupes s’est fortement réduite depuis. Partant de niveaux bien supérieurs, l’assainissement du bilan des banques d’Europe du Sud a permis à leur ratio de NPL de baisser plus fortement qu’au nord-est, et de se rapprocher de la moyenne de la zone euro. Les encours des NPL en Espagne, en Grèce et en Italie ont même été inférieurs à l’encours en Allemagne au T4 2024, alors qu’ils le dépassaient au T1 2019. Le reflux des ratios des créances douteuses en Europe du Sud tient au développement du marché secondaire, ainsi qu’à un ensemble de réformes du droit des entreprises en difficulté. Ces réformes visaient à raccourcir les délais des procédures de recouvrement et à accroître le taux de récupération pour les créanciers, afin d’éviter que les créances douteuses n’obèrent durablement la distribution du crédit bancaire et la transmission de la politique monétaire.

Pourtant, le cadre juridique apparaît toujours plus propice à la sortie rapide des créances douteuses du bilan des banques dans les pays du nord-est[1] de l’Europe

En outre, dans les pays d’Europe du Sud, le tissu industriel est souvent plus fragmenté, car constitué d’entreprises de plus petite taille, moins diversifiées et appartenant à des secteurs plus cycliques (immobilier, tourisme, etc.). Elles sont ainsi plus sensibles aux retournements de la conjoncture nationale. Compte tenu de la persistance des écarts structurels entre Europe du Nord-Est et Europe du Sud, les évolutions des ratios des NPL pourraient diverger à nouveau. Cela se fera néanmoins probablement dans des proportions bien moindres qu’en 2014 et 2015 car la fragmentation financière entre pays du cœur de la zone euro et ceux de la périphérie est moins prononcée aujourd’hui.

[1] Commission européenne, 2025, EU Justice Scoreboard.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE