Des politiques macroéconomiques très accommodantes
Pour atténuer l’impact de la pandémie sur l’économie, le Conseil fédéral a déboursé CHF 15 mds (2% du PIB) en 2020, principalement au titre du dispositif de travail partiel (CHF 10,8 mds) et de la compensation de la perte de revenus (CHF 2,8 mds). De plus, un programme de garantie des prêts a été mis en place en collaboration avec la Banque nationale suisse (BNS). Avec la chute des recettes fiscales, due à la contraction de la production, les finances publiques ont accusé un déficit de 2,6% du PIB en 2020, après avoir affiché des excédents de plus de 1% du PIB depuis 2017. Le ratio de dette sur PIB a grimpé à 40%.
La politique budgétaire devrait rester très accommodante en 2021. Dans son budget 2021, le Conseil fédéral a provisionné CHF 24,4 mds pour les dépenses liées à la pandémie. Le montant très élevé de cette enveloppe budgétaire doit permettre de réagir rapidement si nécessaire. Il est probable que le déficit budgétaire final n’atteigne guère plus de 3,5% du PIB en 2021.
L’orientation monétaire demeurera très accommodante. La BNS devrait ainsi maintenir son taux directeur à -0,75% et pourrait intervenir sur le marché des changes pour contrer les pressions à la hausse sur le CHF. L’orientation monétaire expansionniste a conduit à une flambée des prix sur les marchés immobiliers.
Un fort rebond mais des nuages à l’horizon
Ces politiques ont été très efficaces : le PIB s’est contracté de 2,7% en 2020, soutenant favorablement la comparaison avec les pays voisins. À partir de septembre 2020, le pays a été confronté à une deuxième vague de contaminations de Covid-19, qui a obligé le Conseil fédéral à imposer à nouveau des mesures de confinement. L’économie s’est contractée de 0,5% au premier trimestre, après une croissance de 0,1% à peine au trimestre précédent. Cependant, le repli a été bien moins important qu’au deuxième trimestre 2020, la croissance de l’activité dans le secteur manufacturier ayant en partie compensé la forte baisse enregistrée dans les services.
À partir du mois de mars, l’activité des entreprises a rebondi, avec la suppression progressive des restrictions par les autorités. En mai, le baromètre conjoncturel du KOF a de nouveau atteint un plus haut historique, indiquant une forte reprise à partir de la mi-2021, à condition que les progrès réalisés en matière de maîtrise de la pandémie se poursuivent. La reprise est générale, le secteur manufacturier bénéficiant de la croissance de la demande extérieure et les services, de la levée des mesures de confinement. La consommation privée sera l’un des principaux moteurs ; les ménages devraient en effet utiliser pour leurs dépenses une partie de l’épargne accumulée pendant la période de confinement. En 2020, l’épargne des ménages s’est élevée à 21% du revenu disponible net, contre 16 % avant la crise. L’activité économique va probablement dépasser le niveau pré-pandémie au second semestre 2021.
Deux risques majeurs menacent l’économie à moyen terme. La Confédération helvétique a récemment rompu les négociations avec l’UE, portant sur un contrat-cadre destiné à réglementer les relations entre les deux parties. Les conséquences immédiates sont limitées dans la mesure où plus d’une centaine de traités bilatéraux restent en vigueur. Cependant, l’absence d’un tel contrat crée un climat d’incertitude pour les investisseurs concernant la relation future. De plus, elle va freiner l’expansion de la coopération dans de nouveaux domaines.
Le deuxième risque réside dans le mouvement en faveur d’un impôt minimum mondial sur les entreprises. Dans la plupart des cantons suisses, l’impôt sur les sociétés est inférieur à 16%. C’est là un argument de poids pour attirer de nouvelles entreprises. En cas d’accord sur une taxe minimale mondiale, les cantons suisses perdraient cet important outil d’attraction.
raymond.vanderputten@bnpparibas.com