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France : après l’inflation, la récession ?

23/09/2022

Une inflation de la nature de celle enregistrée par la France depuis le début de l’année 2022 est-elle nécessairement suivie d’une récession ? Pas toujours, mais il semble que, cette fois, l’économie française risque de ne pas y échapper. Au premier semestre, déjà, c’est largement grâce au rebond du tourisme que la France a évité la récession. Avec la multiplication des chocs :  sécheresse, prix de l’énergie, et contraintes sur l’offre d’énergie, les entreprises commencent d’ores et déjà à réduire leur activité et une récession pour les six prochains mois gagne en probabilité.

Transcription

La France a connu à partir du premier semestre 2022 un choc consécutif à une inflation inédite depuis le milieu des années 80. L’inflation s’est singulièrement accélérée à partir de mars, sous le poids d’une hausse du prix du baril de pétrole en euro de 23% sur le mois, pesant sur la consommation des ménages (-1,2% t/t au 1er trimestre).

Ce choc a nettement affecté la croissance, sans toutefois la faire totalement disparaitre. En effet, l’économie française a bénéficié en parallèle de la levée des restrictions sanitaires liées à la Covid, pour voir l’activité touristique et de loisirs reprendre, avec pour conséquence une croissance positive au 2e trimestre (+0,5% t/t)

Toutefois, en corrigeant les données de PIB français de ces éléments favorables, il apparait que la croissance aurait plutôt été proche de zéro au 2e trimestre, ce qui implique une chose : hors tourisme et loisirs, et avec une séquence à -0,2% de croissance au 1er trimestre et 0% au 2e trimestre, l’économie française était au bord de la récession déjà au 1er semestre 2022. Une situation que la levée des restrictions sanitaires a permis d’éviter.

Quid des prochains mois ? L’impact favorable du rebond du tourisme devrait être totalement matérialisé au 3ème trimestre, et ne devrait plus soutenir la croissance au-delà.

Et, sans attendre, un ensemble de nouveaux freins à la croissance s’est matérialisé. La sécheresse estivale a d’ores et déjà produit ses effets, d’abord sur la production d’électricité, dont la baisse entamée en mars avec les premières fermetures de centrales nucléaires pour maintenance s’est accentuée à -23% a/a en juillet. La baisse de la production agricole a également eu un impact considérable en provoquant l’inflation mensuelle sur la composante alimentation de l’indice des prix de l’Insee la plus élevée en plus de 20 ans, à 1,7% m/m en août.

Toutefois, des freins encore plus puissants pourraient survenir dans les prochaines semaines. Ils sont liés à la hausse des prix de l’énergie auxquels les entreprises font face, la quantité d’électricité au tarif réduit dit Arenh étant plafonnée et leurs besoins additionnels devant se financer au prix du marché lorsque leur précédent contrat de fourniture arrive à terme : une hausse des coûts d’ores et déjà pénalisante.

De plus, la perspective de contraintes sur l’offre d’énergie pendant l’hiver pourrait affecter encore un peu plus la croissance française, alors même que les hausses de coûts justifient dès à présent des annonces de baisse d’activité dans les secteurs fortement consommateurs d’énergie, que ce soit la métallurgie ou la chimie.

Pour preuve d’une baisse d’activité à venir, l’industrie manufacturière connait un repli notable de ses carnets de commande : de 7,3 à 5,9 mois entre février et août, dont la moitié sur les deux derniers mois. Et trois secteurs subissent une réduction plus forte encore, les plastiques/caoutchoucs, le bois/papier et la métallurgie. C’est le signe que l’automne/hiver français pourrait bien rimer cette année avec récession.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE