La croissance française a surpris à la hausse au 2e trimestre, atteignant 0,5% t/t, et le trimestre a aussi vu une amélioration des revenus.
Du côté des entreprises, la hausse de la profitabilité a renforcé le taux de marge des sociétés non financières, qui a atteint 33,2% soit au-dessus de sa moyenne de long terme (32% sur 20 ans). La hausse des prix de vente a ainsi soutenu la rentabilité nonobstant la hausse des coûts. Dans le même temps, les enquêtes de l’Insee ont montré que les entreprises conservaient un niveau de trésorerie satisfaisant, malgré les hausses des coûts, notamment ceux de l’énergie.
La situation financière des entreprises reste donc correcte, soutenant un taux d’investissement élevé : 26,1% en moyenne sur les 12 derniers mois, soit 3 points au-dessus du niveau moyen sur 20 ans. Des revenus favorables ont donc contribué à financer une dépense.
Ce n’est pas le cas des ménages. Leur revenu disponible brut (RDB) - les revenus corrigés de la fiscalité et des prestations - a augmenté de 9,1% a/a au 2e trimestre, soit plus que l’inflation, le déflateur de la consommation n’ayant augmenté en parallèle que de 7% a/a au 2e trimestre.
Derrière cette dynamique favorable, les rémunérations nettes (qui incluent la part variable) ont augmenté de 6,6%, ce qui ne permet pas de compenser l’inflation. La croissance des revenus du capital (+20,8%) a été nettement plus élevée grâce, à la fois, à la hausse des taux d’intérêt et à celle des profits des entreprises. Cette évolution a grandement soutenu la progression de leur pouvoir d’achat de 2% a/a au 2e trimestre 2023.
Toutefois, la consommation et l’investissement des ménages ont diminué et le taux d’épargne des ménages a atteint 18,8%, un plus haut (hors Covid) depuis 1979. Or, on peut faire deux usages d’une épargne : soit un investissement dans un logement, soit une épargne financière. Les ménages n’ont clairement pas fait le premier choix, leur taux d’investissement ayant diminué. C’est donc la deuxième option qui s’est réalisée. Au global, sur l’année 2023, nous anticipons que l’épargne financière atteigne 8% du RDB, un niveau inédit.
Il semble donc que les ménages renoncent à investir et à acheter des biens durables en raison du niveau des taux d’intérêt. Leur épargne augmenterait donc par manque d’opportunités de dépenses et non par précaution car, en parallèle, les ménages sont peu nombreux à craindre le chômage. Ils ne devraient pas modifier leur comportement dans les prochains trimestres dans la mesure où la hausse des taux de la BCE devrait continuer à se transmettre aux taux d’intérêt domestiques.
Qu’implique l’attitude des ménages ? Une demande faible devrait tirer vers le bas la croissance française et compliquer singulièrement l’atteinte de l’objectif de croissance qui sous-tend le prochain projet de loi de finances : 1,4% pour 2024. Notre prévision de croissance est de 0,5%. Les « bons comptes » ne font donc pas toujours les bons amis.