Depuis le début des années 1990, la position internationale nette des États-Unis est négative. En d’autres termes, les entrées de capitaux sur le sol américain excèdent les sorties de capitaux vers l’étranger. La contribution nette des non-résidents au financement de l’économie américaine s’élevait en juin dernier à plus de 16 000 milliards de dollars, soit 67% du PIB américain. Les États-Unis sont ainsi le pays le plus dépendant des capitaux extérieurs.
Au cours des dix dernières années, la physionomie des créanciers étrangers de l’économie américaine a toutefois évolué. Historiquement, une part importante des capitaux entrants aux États-Unis provenait des réserves de change accumulées par les banques centrales étrangères, notamment asiatiques. Le statut de monnaie de réserve internationale du dollar incitait ces investisseurs officiels à acquérir les titres de dette du Trésor américain.
Au fil du temps, les banques centrales et les États étrangers se sont toutefois partiellement détournés des Treasuries, et plus généralement du dollar. En cause, le souhait de diversifier leurs réserves de change, voire de soutenir leur monnaie. Or, dans le même temps, les entrées de capitaux privés sur le sol américain ont fortement progressé.
Le désintérêt relatif des banques centrales étrangères pour les Treasuries a deux conséquences majeures. La première est que, désormais, le secteur officiel n’est plus la première contrepartie étrangère du Trésor américain. La part de la dette du Trésor détenue par des investisseurs privés étrangers - sociétés d’assurance, fonds de pension ou hedge funds – est aussi importante que la part détenue par des banques centrales et États étrangers. Or, les investisseurs privés ont généralement un horizon de placement plus court que celui des investisseurs officiels, leur poids croissant pourrait donc conduire à une plus grande volatilité des taux d’intérêt.
La seconde conséquence est que la participation globale des non-résidents au financement du Trésor américain a fléchi. Si l’on exclut les titres achetés par la Réserve fédérale dans le cadre de sa politique monétaire, le poids des non-résidents dans la détention de Treasuries s’élevait à 64% il y a encore une dizaine d’années contre 42% aujourd’hui.
Or, à la lumière des projections officielles qui annoncent un quasi-doublement de la dette fédérale américaine au cours des dix prochaines années, le renforcement de l’appétit des non-résidents pour les titres du Trésor américain apparaît primordial. À plus court terme, il faudra notamment espérer qu’une fois le point d’atterrissage du taux des fonds fédéraux atteint, le coût de la couverture contre le risque de change s’allège de sorte que les rendements des Treasuries, nets des frais de couverture de change, redeviennent attractifs aux yeux des non-résidents.