Échaudée par la crise des marchés monétaires qu’elle n’avait pas anticipée lors de sa première expérience de resserrement quantitatif (Quantitative Tightening, QT), la Réserve fédérale (Fed) entend mieux piloter la réduction de son bilan. Cela suppose de détruire une partie des réserves que les banques détiennent auprès d’elle sans créer de pénurie de monnaie centrale, au regard des exigences de liquidité imposées aux banques.
Depuis le lancement de QT2 - le 1er juin 2022 - la réallocation des avoirs des fonds monétaires, en dehors du dispositif de mises en pension de titres de la Fed (-USD 1 380 mds au 8 mai 2024), a permis d’absorber l’effet du dégonflement du bilan de la Fed (-USD 1 560 mds) sur les réserves des banques (-USD 30 mds), retardant de fait le risque d’une insuffisance de monnaie centrale. Toutefois, le réservoir de liquidités susceptible d’amortir le choc de QT2 est désormais plus mince (les « dépôts » des fonds auprès de la Fed s’établissent à 460 mds en moyenne depuis début mai).
Face à la difficulté d’estimer le montant optimal de réserves1 nécessaire au bon fonctionnement des marchés monétaires, la Fed redouble de prudence. Elle a, d’une part, annoncé qu’elle ralentirait le rythme de réduction de son bilan à compter du 1er juin2. Elle a, d’autre part, révisé son cadre d’analyse. Désormais, un régime de réserves « amples » désigne une situation où le ratio réserves/PIB excéderait légèrement celui observé en septembre 2019 (8% dans le premier scénario), voire plus largement (10% dans le second scénario). La Fed estime qu’afin d’éviter une pénurie de réserves, le QT2 devrait être interrompu, sous l’hypothèse haute, au début de l’année 2025. À cette date, le bilan de la banque centrale avoisinerait les USD 6 500 mds (22% du PIB) et les réserves, 3 400 mds (11% du PIB). Au terme d’une année de stabilisation de la taille du bilan de la Fed, le programme d’achats d’actifs serait réactivé afin de préserver le stock de réserves à hauteur de 10% du PIB.