Graphiques de la semaine

Etats-Unis : ne combattez pas la Fed !

10/04/2024
PDF

Chaque réunion de fin de trimestre de la Réserve fédérale (FOMC) donne lieu à la publication du Summary of Economic Projections (SEP). Ce jeu de prévisions est scruté de près car il comprend notamment les dot plots, à savoir l’anticipation médiane de la trajectoire du taux directeur à moyen terme par les membres du Comité. Les avant-dernières projections du T4 2023 incorporaient trois baisses de taux (de 25 pb chacune) en 2024, pour une cible de taux de +4,6% en fin d’année. En parallèle, Jerome Powell, le président de la Fed, prenait acte des progrès réalisés sur le front de l’inflation (IPC à +3,2% a/a au T4 2023, contre +7,1% un an plus tôt) mais se refusait à déclarer victoire.

L’anticipation des baisses de taux a fait souffler un vent d’optimisme sur les marchés. D’après les Fed Implied Rates (taux implicites), dérivés des contrats à terme négociés sur les fonds fédéraux, les marchés priçaient, au 12 janvier 2024, de six à sept baisses de taux en 2024, la première intervenant dès la réunion de mars 2024. Dans le même temps, les interventions médiatiques des officiels de la Réserve fédérale ont toutefois cherché à modérer cet enthousiasme.

Or, les chiffres de l’inflation publiés par la suite ont plutôt surpris à la hausse, marquant une réaccélération mensuelle en janvier (+0,3% m/m) et février (+0,4% m/m)[1], un rythme incompatible avec la cible de 2%. En février, l’inflation totale s’élève à +3,2% a/a et l’inflation sous-jacente à +3,9% a/a (mesure IPC du BLS). Ce rythme toujours élevé a conduit à tempérer sensiblement les anticipations de baisses de taux des marchés financiers qui se sont progressivement alignés sur les projections de la Fed. D’autre part, l’économie américaine a continué de se montrer robuste, le rééquilibrage du marché du travail ne constituant pas, à ce jour, une détérioration de nature à appeler une réponse de politique monétaire (par rapport à l’objectif de plein emploi dans le mandat dual de la Fed).

Le SEP du mois de mars 2024 ne contient, en apparence, pas de changement par rapport au SEP de décembre 2023 en matière de baisses de taux en 2024. La médiane demeure à 4,6% et Jerome Powell s’est appliqué à se montrer confiant quant à la trajectoire de désinflation, malgré les progrès mitigés au regard des derniers chiffres. Néanmoins, les membres du FOMC se montrent moins confiants vis-à-vis des perspectives de baisses de taux. Le groupe de ceux anticipant moins de trois baisses s’est étoffé d’un membre (9 sur 19, contre 8 auparavant) et le groupe de ceux qui en prévoient davantage n’en compte plus qu’un seul (contre 5 précédemment). Quant aux anticipations de baisses de taux des marchés, elles apparaissent désormais en-deçà des prévisions du FOMC, priçant un taux directeur à 4,7% fin 2024 (entre deux et trois baisses) et la probabilité d’une première baisse en juin n’est plus que légèrement supérieure à 50%.

[1] Données CVS.

Taux Fed funds US : ne combattez pas la Fed !
LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE