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Pricing power : le retour, et bientôt la fin ?

27/04/2023

La situation inflationniste actuelle est inédite à de nombreux égards. L’inflation trouve, en effet, une partie de sa force dans la capacité des entreprises à répercuter la hausse de leurs coûts de production dans leur prix de vente. C’est ce que l’on appelle le pricing power. Et cela permet aux entreprises de préserver leurs marges dans un environnement difficile.

Transcription

La situation inflationniste actuelle est inédite à de nombreux égards. L’inflation trouve, en effet, une partie de sa force dans la capacité des entreprises à répercuter la hausse de leurs coûts de production dans leur prix de vente. C’est ce que l’on appelle le pricing power. Et cela permet aux entreprises de préserver leurs marges dans un environnement difficile.

Or, un tel pricing power est inhabituel. Le qualificatif qui lui était habituellement associé jusqu’ici était plutôt « faible » voire « inexistant », du fait de l’intensité de la concurrence et de la nécessité, pour la plupart des entreprises, de préserver leurs parts de marché plutôt que leurs marges. Mais depuis 2021, l’envolée de l’inflation sur fond de hausse des prix de l’énergie et des matières premières, de rebond vigoureux de la demande post-Covid et de contraintes d’offre a changé la donne. Dans ce contexte particulier, les entreprises ont retrouvé du pricing power.

La BCE est très attentive à ce sujet, pour déterminer à quel point ce rôle des marges est important et alimente l’inflation. D’après ses calculs, au quatrième trimestre 2022, les marges bénéficiaires unitaires auraient expliqué environ la moitié de la hausse de 6% sur un an du déflateur du PIB, l’autre moitié venant de la hausse du coût unitaire du travail. Sur l’ensemble de 2022, la contribution moyenne estimée atteint même les deux-tiers, ce qui est beaucoup plus que la contribution moyenne d’un tiers entre 1999 et 2021.

Il y a une conséquence positive : la préservation des marges est de nature à soutenir l’investissement et l’emploi, ce qui est bon pour la croissance. Mais cela a aussi, et surtout, pour conséquence négative d’alimenter l’inflation, via la hausse des prix de vente et des revendications salariales, en réponse à l’inflation. Le risque est que les marges, les prix et les salaires se retrouvent entraînés dans une spirale haussière négative. Ce qui appelle à poursuivre le resserrement monétaire. La croissance se trouve doublement freinée, par l’inflation et par la hausse des taux. Et les marges des entreprises devraient aussi finir par souffrir de la situation.

A l’horizon des prochains trimestres, l’environnement devrait toutefois devenir moins inflationniste. La baisse du prix des matières premières, de la croissance et des difficultés d’approvisionnement devrait, en effet, modérer le pricing power des entreprises. On en a déjà un aperçu dans les composantes des enquêtes relatives aux prix des intrants et aux prix de vente, en forte baisse dans le secteur manufacturier et, de manière moins prononcée pour le moment, dans les services. Cette baisse devrait entraîner dans son sillage celle de l’inflation.

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE