Depuis la mi-avril, le calme est revenu sur les places financières des pays émergents. Pour la plupart des pays, les taux de change se sont réappréciés. Par ailleurs, les taux d’intérêt monétaires et obligataires se sont réduits grâce à la détente générale des taux directeurs et une utilisation plus large de l’assouplissement quantitatif par les banques centrales nationales, mais aussi grâce au soutien financier extérieur (lignes de financement des institutions financières internationales, accords de swap de change avec les banques centrales) et au retour des investissements de portefeuille. Comme souvent, les marchés boursiers ont salué cette normalisation de façon excessive et prématurée. La reprise d’activité, qui semble se confirmer, reste en effet très fragile.
L’économie se redresse progressivement depuis mars, et le rebond vigoureux du PIB réel au second trimestre 2020 lui a déjà permis de récupérer le terrain perdu au premier trimestre. Cependant, le choc provoqué par l’épidémie et le confinement a fragilisé un grand nombre de secteurs (notamment les industries exportatrices), de sociétés (les micro entreprises et les PME en particulier) et de ménages (notamment ceux à bas revenus). La banque centrale assouplit prudemment les conditions de crédit et le gouvernement a introduit un plan de relance estimé à environ 5 points de PIB pour 2020. L’investissement public dans les infrastructures reste un instrument privilégié, mais les aides destinées aux entreprises et aux ménages devraient également soutenir la demande privée.
L’Inde pourrait enregistrer, cette année, une contraction sans précédent de son activité économique. Toute la question est de savoir quelle sera l’ampleur du rebond à venir. Les agences de notation commencent à douter d’un retour à son potentiel de croissance au cours des prochaines années car le ralentissement de l’activité est bien antérieur au choc de la Covid-19. Il remonte, a minima, à 2018 mais pourrait être le prolongement de la crise financière de 2009. Depuis 2014, la croissance indienne semble n’avoir été soutenue que par des chocs extérieurs positifs et avoir donné l’illusion d’une croissance robuste. Or, le secteur bancaire reste encore trop fragile pour relancer la croissance sur ses rythmes passés.
Alors que l’épidémie de Covid-19 continue de progresser, les mesures de confinement ont commencé à s’assouplir dans certaines régions du pays. La baisse d’activité au T2 devrait être forte avec un creux atteint en avril. Le scénario d’un redressement rapide de l’économie semble contraint par la faiblesse des moteurs de croissance, notamment l’investissement. Des mesures de politique budgétaire et monétaire continuent d’être annoncées ou prolongées pour contenir les effets de la crise. Tandis que les équilibres budgétaires se dégradent et que la monnaie reste faible, la poursuite du cycle d’assouplissement monétaire a contribué à doper la Bourse.
L’économie est plus solide aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Depuis la crise de 2014-15, le gouvernement est parvenu à reconstituer son fonds souverain qui lui permet aujourd’hui de compenser la perte de recettes pétrolières. Ses finances publiques sont moins dépendantes des revenus pétroliers (grâce à la hausse de la TVA en 2019) et le gouvernement ne devrait pas avoir de difficultés à remplir ses engagements à court terme. Pour autant, l’impact du confinement et de l’effondrement des prix des matières premières sur la croissance sera élevé, et il ne sera pas sans conséquence pour le secteur bancaire, encore fragile, mais moins vulnérable à un choc de change.
L’économie polonaise est affectée par la pandémie de Covid-19 au travers de la baisse de la demande étrangère et des effets de son propre confinement sur la consommation domestique. Toutefois, le gouvernement dispose de marges de manœuvre, notamment grâce à un niveau de dette publique raisonnable à fin 2019. Certes, le PIB ne devrait pas retrouver son niveau d’avant-crise avant mi-2021, ce qui devrait contraindre la reprise de l’investissement. Cependant, la Pologne devrait ensuite retrouver sa trajectoire de croissance. En effet, ses atouts – compétitivité du change, abondance de la main-d’œuvre, coûts salariaux avantageux, gains de productivité – qui font de la Pologne la 5e industrie de l’Union européenne, perdurent.
L’Ukraine est habituée à subir une succession de chocs sévères et à s’en relever. Pour autant, ces difficultés récurrentes n’ont pas permis de construire une indépendance vis-à-vis des capitaux extérieurs, notamment ceux du FMI ou de l’Union européenne. Toutefois, il apparaît que cette expérience, ainsi que de réels progrès ces dernières années ont permis à l’Ukraine de faire face à la crise de la Covid-19 sans tensions financières. La forte demande étrangère pour les céréales ukrainiennes, la baisse du pétrole et l’afflux rapide de l’aide internationale sont autant d’éléments favorables qui ont aidé et laissent entrevoir un retour rapide à la croissance une fois la crise de la Covid-19 terminée.
L’économie slovène aborde la crise liée à la Covid-19 dans une situation relativement favorable. Depuis trois ans, la croissance a été soutenue, des excédents budgétaires ont été enregistrés et les bilans bancaires se sont progressivement assainis. Néanmoins, les conséquences de cette crise vont être d’autant plus significatives que la Slovénie est une petite économie ouverte fortement liée à l’Union européenne. Les soutiens budgétaire et monétaire européens, ainsi que des finances publiques assainies devraient permettre de modérer les conséquences de la crise sur les finances publiques et sur les perspectives de croissance.
Les perspectives de croissance se dégradent continument au Mexique. À court terme, l’économie est affaiblie par l’effet des mesures de confinement sur la demande interne, par la baisse du prix du pétrole, les ruptures dans les chaînes d’approvisionnement et la faiblesse de la demande externe. En l’absence de plan de relance budgétaire, les mesures de soutien annoncées par la banque centrale ne suffiront pas à atténuer le choc. À moyen terme, la capacité de rebond de la croissance est limitée. Les facteurs de ralentissement qui prévalaient avant la crise, tels que la détérioration du climat des affaires liée aux signaux contradictoires envoyés par le gouvernement, continueront de peser sur l’investissement.
Le rebond d’activité espéré à partir du deuxième semestre 2020 se fait attendre. L’épidémie semble, pour le moment, maîtrisée et plusieurs phases de déconfinement se sont déjà succédées. Néanmoins, la demande interne semble tourner au ralenti et les exportations ont de nouveau lourdement chuté en mai. Surtout, l’absence de touristes internationaux pèse sur les perspectives de croissance, du moins à court terme, car le soutien des politiques budgétaire et monétaire, pourtant massif, ne suffira pas à totalement absorber le choc. Dans ces conditions, la reprise devrait être plus contrainte que pour les autres pays d’Asie.
L’emploi massif de travailleurs expatriés, élément-clé du modèle de développement dans le Golfe, est remis en cause à la fois par la récession, l’aggravation des déficits budgétaires et les programmes de nationalisation de l’emploi, notamment dans le secteur public. Les secteurs de la construction et des services, qui emploient également massivement des expatriés, souffrent en retour de la réduction des dépenses publiques. Néanmoins, il n’est pas certain que la réduction attendue de l’emploi expatrié donne lieu à une augmentation significative et durable de l’emploi pour les nationaux. Les pays du Golfe pourraient avoir du mal à se passer de la main d’œuvre étrangère.
Le choc provoqué par l’épidémie de Covid-19 est violent et frappe une économie déjà très fragile. La croissance économique n’a atteint que 0,8% en moyenne au cours des cinq dernières années et le pays est en récession depuis déjà la mi-2019. En 2020, la contraction de l’économie sera sans précédent, tout comme la dégradation des finances publiques. Le pays pourrait ne retrouver son niveau de PIB réel d’avant la crise qu’en 2025. Le gouvernement ajuste habilement sa stratégie de financement pour couvrir ses besoins, qui augmentent fortement avec la mise en œuvre du plan de relance budgétaire. Le soutien des créanciers multilatéraux, attendu à court terme, rassure mais la dynamique de dette publique va rester préoccupante à moyen terme.
Bien que contenue sur le plan sanitaire, la pandémie du coronavirus associée au retournement des cours du pétrole aura des conséquences économiques sévères. Sans réelle marge de manœuvre budgétaire, le gouvernement a introduit un plan de soutien à l’économie très modeste, alors que l’érosion rapide des réserves de change provoquée par des sorties importantes de capitaux et la chute des exportations pétrolières met le naira sous pression. La fragilisation des comptes publics et externes, malgré le soutien des bailleurs de fonds, obère ainsi toute perspective de reprise. Seulement quatre ans après sa dernière récession, le PIB devrait de nouveau se contracter significativement en 2020. En l’absence de remontée des cours du pétrole, le rebond sera modeste en 2021.