Eco Charts

Baromètre de l'inflation - novembre 2025 | Rebond limité de l’inflation en septembre

31/10/2025
PDF

En septembre, l’inflation a légèrement rebondi aux États-Unis, en zone euro et au Japon, tandis qu’elle est restée stable au Royaume-Uni. Côté américain, l’effet inflationniste des droits de douane demeure jusqu’à présent contenu (cf. graphique du mois). Dans les autres pays, on notera des signaux favorables : la stabilité des anticipations d’inflation autour de 2% en zone euro, la modération de la croissance des salaires au Royaume-Uni et la baisse des prix à la production au Japon.

Retrouvez le pdf complet

Aux États-Unis, l’inflation (IPC) a légèrement augmenté en septembre (de +0,1 pp à 3,0% a/a) sous l’effet d’un rebond de la composante énergie (2,8% a/a ; +2,6pp m/m)

L’inflation sous-jacente, quant à elle, s’est modérée (3,0% a/a ; -0,1pp m/m). Les salaires poursuivent leur décélération et les anticipations d’inflation à 1 an des ménages ont nettement reculé depuis mai (de 6,6% à 4,6%) ; celles à 5 ans demeurent toutefois élevées sur une base historique. Ces évolutions, combinées à la stabilisation de l’indice de pression sur les prix et au ralentissement des prix à la production (2,6% a/a, -0,5pp m/m), confortent le scénario d’une poursuite des baisses de taux de la Fed.

L’inflation en zone euro reste significativement inférieure à celle observée aux États-Unis

Mais elle rebondit également en septembre et retrouve son niveau d’avril (2,2% a/a ; +0,2pp m/m). L’inflation sous-jacente suit la même tendance (2,4% a/a ; +0,1pp). Chypre se distingue par une inflation nulle pour le deuxième mois consécutif. La France (1,1%), l’Italie (1,8%), la Grèce (1,8%) et le Portugal (1,9%) affichent les taux d’inflation les plus faibles de la zone euro, tandis que la Slovaquie (4,6%), la Croatie (4,6%) et l’Estonie (5,3%) continuent de subir les plus fortes hausses. Les perspectives restent favorables : les prix à la production poursuivent leur repli et repassent en territoire négatif (-0,6% a/a) et les anticipations d’inflation des prévisionnistes à court (1 an) et long terme (5 ans) restent proches de 2%. Toutefois, des tensions sous-jacentes persistent : l’indicateur de pression sur les prix et la croissance des salaires négociés (4,0% a/a contre 2,5% en mars) repartent à la hausse.

Au Royaume-Uni, l’inflation s’est stabilisée à un niveau élevé en septembre : 3,8% a/a

L’inflation sous-jacente ralentit légèrement pour le deuxième mois consécutif (3,5% a/a ; -0,1pp). La croissance des salaires, toujours très soutenue, se modère néanmoins depuis janvier (4,7% a/a contre 5,3% en janvier) et l’indicateur de pression sur les prix poursuit son repli. En revanche, les anticipations d’inflation des ménages à 1 an repartent nettement à la hausse ; celles à long terme demeurent, par ailleurs, supérieures aux niveaux observés durant la crise inflationniste.

Au Japon, l’inflation s’est légèrement renforcée (à 2,9% a/a ; +0,2pp m/m) principalement sous l’effet d’une hausse de la contribution de la composante énergie

Cette augmentation s’observe aussi sur la composante sous-jacente (3,0% selon la mesure BoJ ; +0,3pp m/m). Les perspectives s’orientent toutefois vers une stabilisation de l’inflation : l’indice des prix à la production a nettement ralenti depuis le début de l’année et demeure stable en septembre (2,7% a/a). De plus, la progression des salaires commence à s’essouffler après une accélération cet été (1,9% contre 2% sur les trois mois précédents). De même, l’indicateur des pressions sur les prix se situe bien en deçà des niveaux observés sur les douze derniers mois. En outre, les anticipations d’inflation des ménages à 1 an se sont très légèrement repliées depuis le début de l’année, évoluant de ce fait inversement aux anticipations des prévisionnistes, toujours en hausse. Le Japon se distingue également des autres pays avec un point mort d’inflation stable mais élevé sur une base historique.

Retrouvez le pdf complet

Graphique du mois | États-Unis : un autre regard sur la transmission des droits de douane à l’inflation

Avec la hausse des droits de douane, l’inflation ne semble pas (encore) clairement tirée vers le haut mais sans elle, elle aurait été nettement plus basse. L’inflation américaine a surpris favorablement en septembre avec une remontée plus limitée que prévu du CPI headline, de 2,9% a/a à 3%, et une baisse inattendue du core de 3,1% à 3%. Au regard de ces chiffres, la transmission de la hausse des droits de douane aux prix à la consommation n’est pas encore notable.

Cette transmission transparaît toutefois, d’abord à grands traits, dans l’évolution de l’inflation entre janvier et septembre 2025. L’inflation totale a suivi une courbe en U pour revenir à son point de départ : partie d’un glissement annuel de 3% en janvier 2025, elle a reflué à 2,3% en avril 2025 avant de remonter à 3% en septembre 2025. La baisse de l’inflation sous-jacente (contribuant à hauteur de -0,2 point de pourcentage) a été contrebalancée par la hausse de l’inflation énergétique et de l’inflation alimentaire (contribution de +0,1 pp chacune).

La diminution de l’inflation sous-jacente masque elle-même deux évolutions opposées significatives : le recul de l’inflation dans les services (contribution de -0,5 pp) et la remontée de celle sur les biens (contribution de +0,3 pp). Cette dernière porte la trace de la hausse des droits de douane (à laquelle se greffe aussi la baisse du dollar).

La transmission - progressive et incomplète, mais sans retard particulier - de la hausse des droits de douane à l’inflation se dessine également d’après un autre tracker développé par A. Cavallo, P. Llamas et F. Vazquez (2025) . L’échantillon de prix y est beaucoup moins étendu que celui du CPI mais l’intérêt des données réside 1/ dans leur collecte en temps réel auprès de cinq grands distributeurs américains et 2/dans la distinction qui est faite entre produits importés et produits domestiques. On peut voir sur le premier graphique que l’écart entre le niveau des prix des premiers (courbe jaune) et celui des seconds (courbe bleue) ne semble pas important : il était d’à peine 1% au 12 octobre 2025 (dernier relevé disponible).

En variation cumulée depuis début mars 2025 (date des premières annonces de durcissement tarifaire à l’encontre du Mexique, du Canada et de la Chine), les prix des biens importés ont toutefois augmenté à peu près deux fois plus vite que ceux des biens domestiques (environ +4% contre +2%). L’effet des droits de douane se voit plus encore dans le contraste entre la tendance haussière des deux indices de prix depuis le choc tarifaire et leur tendance baissière antérieure. Les auteurs estiment à 20% le taux de transmission, en six mois, des droits de douane aux prix à la consommation et à environ 0,7 point de pourcentage la contribution cumulée au CPI (sans la hausse des droits de douane, l’inflation d’août 2025 aurait été 0,7 point plus basse, à 2,2% au lieu de 2,9% a/a).

Les auteurs ont procédé à une décomposition supplémentaire en distinguant, parmi les produits domestiques, ceux relevant d’une catégorie de biens affectés par les droits de douane (courbe noire, graphique 2) et ceux qui ne sont pas affectés (courbe verte). Le résultat paraît contre-intuitif : l’indice de prix des premiers se situe en dessous de l’indice de prix des seconds, avec un croisement des courbes à la mi-septembre. Les prix des biens domestiques « affectés » reflètent probablement les pressions baissières pour que ces prix restent concurrentiels par rapport à ceux des biens importés, tandis qu’un effet de reconstitution des marges a pu, au contraire, soutenir les prix des produits domestiques « non affectés » par les droits de douane.

1 Données et graphiques accessibles ici : Tariff Tracker – HBS Pricing Lab ; article de référence : TrackingTariffs_Cavallo_Llamas_Vazquez.pdf (27 octobre 2025).

Achevé de rédiger le 29 octobre 2025

LES ÉCONOMISTES AYANT PARTICIPÉ À CET ARTICLE
Equipe : Économies avancées