Dans la foulée de l’inflation américaine en octobre, l’inflation en zone euro a, à son tour, surpris à la baisse. Elle s’est établie à 10% en novembre en glissement annuel, selon l’estimation préliminaire d’Eurostat, contre une prévision moyenne du consensus de 10,4%. Ce résultat laisse espérer que le pic d’inflation ait, enfin, été atteint dans la zone, ce qui est probable. C’est notre scénario mais l’incertitude reste grande et la prudence est de mise.
Toutefois, un certain nombre de signaux avant-coureurs annoncent une diminution nette des pressions inflationnistes en amont (baisse des composantes du climat des affaires relatives aux prix des intrants, des prix de vente et des délais de livraison, décélération des prix de production). L’inflation devrait également - mécaniquement, et certainement de manière importante - baisser grâce aux effets de base favorables sur les composantes « énergie », d’abord, et « alimentation », ensuite. Enfin, l’atténuation du déséquilibre entre l’offre (moins contrainte) et la demande (moins vigoureuse) devrait contribuer à relâcher les pressions inflationnistes en 2023.
Mais il est trop tôt pour crier victoire, tant l’inflation est généralisée et le point de départ élevé. La baisse de l’inflation totale pourrait, certes, sembler rapide, mais une trop grande persistance de l’inflation sous-jacente, dont la baisse devrait être limitée, devrait freiner le mouvement de fond. Le détail du chiffre de novembre illustre ces différents points : la baisse de 0,6 point de l’inflation totale repose totalement sur celle (-0,7 point) de la contribution de la composante « énergie », tandis que les prix alimentaires ont encore accéléré sur un an (ajoutant 0,1 point à l’inflation) et que l’inflation sous-jacente est demeurée stable (à 5%). La France se distingue cette fois par la stabilité du chiffre d’inflation (7,1%) et les Pays-Bas par sa baisse marquée (-5,6 points, à 11,2%).
La confiance des ménages a également évolué favorablement en novembre. D’après l’enquête de la Commission européenne, elle s’est assez nettement redressée pour le deuxième mois d’affilée. Elle reste déprimée mais l’amélioration est notable. Les ménages se montrent notamment nettement moins inquiets quant aux perspectives d’inflation à l’horizon d’un an et leurs inquiétudes quant à une remontée du chômage restent contenues. Au niveau des secteurs d’activité, la confiance est restée stable dans le commerce de détail. Elle s’est légèrement améliorée dans les services (interrompant quatre mois de baisse marquée), effritée dans la construction et a poursuivi sa baisse dans l’industrie (pour le cinquième mois consécutif). L’indicateur agrégé du sentiment économique de la Commission (ESI) a, ainsi, regagné 1 point : la hausse est peu importante et fragile, mais c’est la première depuis février. L’indicateur relatif aux perspectives d’emploi (EEI) s’est également redressé. La légère hausse du PMI composite de S&P Global (+0,5 point, à 47,8) est, quant à elle, due à l’amélioration du climat des affaires dans le secteur manufacturier (+2,2 points, à 46), tandis que l’enquête est restée stable dans les services (48,6). Un autre point positif à souligner est que l’EEI et la composante « emploi » du PMI composite demeurent, assez confortablement, en zone d’expansion.
Il y a néanmoins aussi matière à voir le verre à moitié vide. Les indices PMI comme l’ESI restent en zone de contraction de l’activité. Au regard de notre baromètre, en moyenne sur les trois derniers mois, la situation conjoncturelle s’est détériorée par rapport aux trois mois précédents (zone bleue en-deçà du trait en pointillé). Et nous n’avons pas encore vu tous les effets négatifs sur l’activité de la combinaison du choc inflationniste, de la crise énergétique (hausse des factures, limitations de l’offre et de la demande) et du resserrement monétaire.
Hélène Baudchon