Une hausse de l’inflation et des anticipations d’inflation, qui reflète une croissance robuste de la demande et de l’activité économique, devrait a priori stimuler les dépenses des ménages en réduisant les taux d’intérêt réels1. La baisse du coût du crédit induite pourrait en effet inciter les ménages à accroître leurs achats et à moins épargner, tout en ayant en tête de reconstituer leur épargne dès que les taux d’intérêt auront augmenté.
Or, il en va tout autrement aujourd’hui. Dans de nombreuses économies avancées, l’inflation est particulièrement élevée et en très grande partie due à des chocs d’offre négatifs – perturbation des chaînes d’approvisionnement, flambée des prix des matières premières – qui pèsent sur la demande tout en poussant les prix à la hausse. Dans l’Union européenne et la zone euro, la confiance des ménages a fortement chuté en mars. En cause : l’effondrement des anticipations relatives à la situation économique en général et une évaluation pessimiste de leur situation financière personnelle, qui a atteint un plus bas historique.
La dégradation de la confiance peut être due à des préoccupations grandissantes concernant soit le rythme de hausse des prix, soit les perspectives du marché du travail. Concernant ce dernier facteur, les anticipations de chômage ont augmenté en mars mais, à 19,9, elles restent inférieures à la moyenne depuis 2000 (24,2). De plus, la remontée du chômage par rapport aux plus bas récents reste, jusqu’à présent, limitée au vu des épisodes précédents (graphique 1).
Néanmoins, comme le montre le graphique 2, les anticipations des ménages concernant leur situation financière, étaient anormalement pessimistes en mars compte tenu de celles relatives au chômage. Autrement dit, l’autre facteur – l’inflation – pourrait jouer un rôle important. C’est ce que confirme le graphique 3 : les anticipations de prix sont, en effet, exceptionnellement élevées et très loin de la fourchette historique2, tandis que le solde net d’opinions des ménages craignant une aggravation de leur situation financière au cours des douze prochains mois se situe dans le haut de la fourchette historique3.
Ces observations posent la question des perspectives de croissance des dépenses de consommation des ménages et, de manière plus générale, de celles du PIB, la consommation des ménages représentant 52% du produit intérieur brut dans la zone euro. Pour une analyse plus approfondie de la question, le graphique 4 illustre la corrélation entre plusieurs mesures de la confiance des ménages4 et la croissance trimestrielle, en termes réels, des dépenses de consommation des ménages5. Les corrélations entre les mesures de la confiance et les dépenses au cours du même trimestre sont fortes mais plusieurs séries donnent également des informations sur les dépenses au cours des trois prochains trimestres.
Étant donné qu’en mars, quatre mesures sur six étaient inférieures à leur moyenne de long terme, parfois de manière significative (graphique 5), il faut s’attendre à une croissance des dépenses de consommation inférieure à la moyenne dans les prochains mois. En revanche, les anticipations de chômage, qui restent inférieures à leur moyenne de long terme, devraient offrir une certaine résilience à la consommation.
Mesurer la confiance des consommateurs de la zone euro permet d’anticiper leurs dépenses dans les trois prochains trimestres. Ainsi, sa baisse récente laisse entrevoir une croissance des dépenses inférieure à la moyenne. En revanche, les anticipations de chômage, inférieures à leur moyenne de long terme, devraient offrir une certaine résilience à la consommation.